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Rechercher : Point Ephémère

  • Mme Stéphanie et Docteur Aflalo

    Pour cette conférence performée, Stéphanie Aflalo s'est dédoublée: l'une sur scène , l'autre sur un écran de télé.  Est-ce le corps et l'esprit ? Un dédoublement de personnalité? Le cerveau gauche et le cerveau droit? La tête et les jambes? L'une ordonne, l'autre exécute, les deux philosophent, s'interrogent. Nous interrogent vers essentiel jusqu'à l'impossibilité, en passant chaque fois par la drôlerie. On en sortira joyeusement blindé d'incertitudes.  
    Dédoublement: l'auteure met l'actrice à l’épreuve, sans complaisance. Dans un rythme contre-intuitif. D'abord une attente qui s'étire- l'absence portée jusqu'à sa limite- puis le corps et la voix de la Stéphanie Aflalo physique sous la contrainte de rafales de consignes de son double cathodique. C'est alors que tout le talent fuse, juste, la force d'expression s'impose chaque fois instantannée.
    L'irréprochable rationalité du questionnement de l'une, suscite de l'autre de joyeuses réponses faites de créativité absurde, qui transcendent la rationalité. Et quand la philosophie a achevé son entreprise d'auto-destruction, sur un fond irréductible d'inquiétude, sortie de secours pour ne pas finir en cendres avec le chant et la musique. 
     

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    Création de Jusqu’à présent, personne n’a ouvert mon crâne pour voir s’il y avait un cerveau dedans de Stéphanie Aflalo ,vu le 25 octobre 2019 au Point Ephémère dans le cadre du festival Zoa.
    Zoa continue jusqu'au 30 octobre
     
    Guy
     
    image avec l'aimable autorisation de Zoa
  • Corps et cordes

    Depuis Man Ray, qui peut encore ignorer les correspondances entre le violoncelle et le corps féminin? 
    Ce soir la rencontre se fait à nouveau, une fusion qui s'opère en trio: deux danseuses et un instrument. Qui évoluent ensemble avec délicatesse et fragilité, entre les trois on ne pourrait glisser une feuille de papier. Le regard creuse les gestes, interroge ces interdépendances, et refuse toute impatience à voir ces lentes évolutions, prudentes. Ces mouvements se vivent sur le mode des sens sans facilités, de la profondeur, sans brusquerie comme de peur que l'instrumentent en suspend ne tombe, que le charme ne se rompe. Refus du spectaculaire, temps retardé et pesanteur abolie, mais dans l'espace concentré au milieu de l'obscurité prospèrent les détails: rondeur de la chair démentie par l'aigu de l'archet, vertèbres dorées des dos nus en harmonie avec le vernis ... Rien autour si ce n'est l'obscurité pour laisser le champ libre à l'espace musical. Cette dimension s'avère essentielle, consubstantielle. La note tient, ample, consistante. Sa vibration constante installe la permanence. Née du frottement des cordes, elle s'amplifie, se renforce d'harmoniques et entoure les corps en retour, leur rend le sens, nous aussi plongés dans ce cocon de son.

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    Marsyas de Flora Gaudin, vu au Point Ephémère le 25 octobre dans le cadre du festival Zoa
     
    Guy
     
    Photo de Jeff Humbert avec l'aimable autorisation de Zoa
  • Mildred Rambaud: la femme et l'objet.

    Avant, glaise et peau ne faisaient qu'un, ici ce soir l'objet est de papier, blanc plié, sec, net, extérieur, delimité. Pourtant en continuité avec la robe immaculée, toujours tenu au corps, tout contre, lié. Il semble un prolongement protéiforme: vêtement, fardeau, membre, aile, paravent... 

    Porter papier plié.jpg

     

    Un objet chéri, précieux, une pensée matérialisée, un double inerte, un être aimé... Qui des deux se fait prisonnier de l'autre? Notre regard avec le corps dans la blancheur confond l'objet, abolit les limites entre eux. Dans ce trouble, peu de mouvements. Sur ce peu d'espace un lent renoncement: le corps inquiet porte l'objet, dans l'inconfort, le regard abandonné le long d'un chemin de croix détaché. De stations en stations, ce transport d'émotions ne dure que dix minutes d'une sourde lenteur, contenue, entretenue dans l'espace sonore par des pulsations engourdies. Le poids du papier s'accroit jusqu'au déséquilibre, la tête penche, dans un vertige contagieux, le corps plie aussi. Jusqu'au sol, toujours portant le papier plié, lui s'ouvre et se déploie en corolle au coeur des jambes nues. C'est d'une simplicité résolue, d'une puissante évocation.

    C'était Porter papier plié de Mildred Rambaud, créé à Point Ephémère, revu dans le cadre du 54e salon d'art contemporain de Montrouge, à la Fabrique.

    Guy

    lire aussi: pot.

    Photo (D.R.) avec l'aimable autorisation de Mildred Rambaud

  • Veronica Vallecillo: surveiller la chute

    C'est un travail en cours, qui court fébrilement et va se heurter avec énergie, mais déja très élaboré, en bordure de beaucoup de genres: tout 1771396240.2.jpgsemble se propager du centre, du regard de la danseuse, intense, hagard, fier, fiévreux? Un regard presque furieux, qui part en vol pour ne plus s'arrêter, on guette la chute promise dans le titre. Plutôt d'abord on est soi même assez secoué à force de remarquables vibrations: Veronica Vallecillo martèle sans relâche le sol de coup de talons néo-flamenco, et le cataclysme se propage irrésistiblement. La danseuse est vetue code noir baroque, bottines- mais sans ailes de géants-, trés dense, main peinte en rouge, poitrine en transparence gazée. On est déstabilisé aussi par, projetées sur le fond, des images de chutes et ascensions, d'immeubles qui défilent au vertical, vertigineusement. V.V., devant, vole par transparence. Pour la recadrer: deux personnages, d'abord à la vidéo et la batterie histoire de relancer la pulsation, V.V. en est alors projetée vers d'autres danses. Qui a dit Hip hop? Les assistants interviennent par la suite plus physiquement, pour contrôler ou aider l'artiste, on ne sait, c'est en tous cas entre eux trois un rapport intéressant, qui évolue ou dérive en un cérémonial curieux: les deux deviennent officiants d'un rituel inédit et un peu sulfureux: notre sujet toujours provocante et maintenant yeux bandés marche sur des têtes de plâtre, guidée par ses comparses courbés. Troublante encore, elle tombe plus tard , en passivité... mais c'est tout pour le moment, la suite parait il pour plus tard en Avignon. Frustrations!

    C'était une étape de travail de Solo sous surveillance, Alb'atroz II, le temps de la chute, par Veronica Vallecillo-Cie Anouchka Vallon , avec Uriel Barthélémi et Elise Boual, à Point Ephémère.

    Guy

    P.S. : et un peu de video ici

    photos de Veronica Vallecillo avec l'aimable autorisation de Myriam Martinez

  • Eleonore Didier: service minimum

    Elle n'a peur de rien et déjà pas d'étirer son solo pas loin de deux heures, et devant si peu d'yeux. Peur de rien; on lit qu'en résidence ici durant un an elle a dansé chaque semaine pour un spectateur seulement. 639f8287cb21d879f422e48938865312.gifConcept radical, à l'évidence intimidant. On regrette de ne pas avoir postulé alors, mais le lundi matin ça n'est pas un horaire. Elle n'a non plus pas peur d'être, plutôt que de faire, de nous laisser seuls remplir le vide de pensées, plutôt que de montrer le plein. On ne peut d'ailleurs plus ici parler de danse, plutôt d'un exposé d'états de corps. A prendre ou à laisser, en deux parties bien contrastées.

    Au début le sujet gît au sol, noyée dans une doudoune d'une couleur douteuse, tête sous la capuche et visage bouffé par les cheveux. En état d'apathie extrême. Ça traîne par terre, ça remue de l'orteil juste alors qu'on commence à désespérer. Une quasi immobilité, de l'intérieur inerte, rien à voir avec l'énergie contenue d'une danseuse de buto. Encéphalogramme plat. Quand même, une jambe bouge et l'autre, et à quoi bon au fond? Retombe. Sans qu'on ait vu très bien comment, elle a rampé presque d'un mètre. S'est retournée sur le dos, se tord vaguement, un doigt agité. C'est qu'elle a manifestement du mal à exister. Est ce par peur, amnésie, doute, lassitude? En tous cas on s'y fait, on s'intéresse. On baille un peu mais on reste. Ou cette passivité apparente est elle l'effet d'une volonté? Peut-être la danseuse résiste-t-elle placidement contre la tentation du mouvement, peut-être lutte-t-elle obstinément contre le temps qui passe et l'impatience. Étrange: elle finit par gagner et nous gagner dans le même temps, elle remporte la première manche dans combat de la non-urgence. Dans cette quête léthargique, l'égarée perd en route pompes et jean. C'est l'effeuillage le plus long et mou de l'histoire de la danse, durablement stabilisé à l'étape doudoune et petite culotte bleue. Les jambes nues dessinent en bas un commencement d'animation, une personnalité s'esquisse, qui lutte contre l'anonymat que fait peser encore sur le haut du corps la doudoune informe. Elle s'agite presque, puis pour de bon, puis plus franchement encore, et on identifie jusqu'à ne plus pouvoir les nier les mouvements subis d'un coit rude et essoufflé, impulsés par un partenaire imaginaire. Après, en récupération, cinq bonnes minutes d'immobilité complète. Rien. Vide. Silence. Blanc. Les sept spectateurs sont disséminés le long de deux des cotés de la salle, aussi visibles que celle au milieu, et qui ne bouge plus. Ceux qui la regardent semblent un peu plus nerveux qu'elle, sans qu'ils n'osent s'interroger du regard pour autant. L'un consulte quand même furtivement sa montre au poignet. Fausse alerte, la performance n'est pas finie: la performeuse a bougé. Se hisse sur une marche d'une fesse hésitante, en glisse et retombe lourdement, inerte. Une heure presque est passé et si on est resté jusqu'à travers ces cinq dernières minutes, on a renoncé à tout. Désormais la danseuse peut parfaire sa victoire en prenant possession de l'espace entier, venant nous frôler les uns et les autres, ainsi les uns après les autres à la somnolence arrachés. Elle est tout à fait réveillée, et réussit le passage au vertical. Maintenant s'ouvre la possibilité du mouvement: hop, et les pieds aux murs, incroyablement spectaculaire et acrobatique par rapport à tout ce qui a précédé. Exploration de l'espace disponible: il y a-t-il une vie possible entre le mur et les cloisons en placo? Disparition dans d'impossibles interstices.

    Réapparition et rupture de ton: la seconde partie partie se dénude franchement et sans manières, face aux fenêtres grandes ouvertes sur le canal Saint Martin, dans la chaleur nonchalente de cette fin d'aprés-midi de juin. Peur de rien décidément, sauf qu'il n'y ne reste en fin de compte ici pas plus de provocation que de pudeur. C'est juste qu'à ce moment elle "est" enfin pour de bon. Libérée de la doudoune et de la culotte bleue, occupée à se définir elle-même. A trouver sa place dans cet espace flou. Un lieu brut et nu, sans espaces nets ni décors, tout de récupération industrielle, où chaque spectateur s'est installé au hasard en rentrant. Un lieu qui mérite bien son nom de Point Ephémère. Eleonore Didier est très occupée, à deux pas d'elle on se sent à peine exister. Devant sept spectateurs, ou un seul, ou aucun, ou juste face aux fenêtres devant toute la berge opposée du canal Saint Martin, son entreprise resterait sans doute la même: seule et affairée, s'examiner imaginaire (s'examiner l'imaginaire? ) à travers la visée d'un appareil photo sur pied, déclencher le retardateur et venir devant l'objectif poser, plaquée contre le mur, sérieuse et laborieuse, dans diverses positions convenues, ou alors beaucoup moins. En tension, plaquée, ou renversée, vers les limites, sang à la tête, l'équilibre forcé. Jusqu'à, à nouveau, essayer de se couler dans les angles perdus du mur, la chair contre le grain du béton. Le naturel forcé. Impasse et peine perdue. La séance photos abandonnée on passe à l'évocation d'un musée vivant, une promenade figée en postures empruntées à la statuaire antique. Comme la recherche d'autant images idéales et rêvées.

    Enfin se répète deux, trois fois un dérisoire épilogue, à nouveau en doudoune mais toujours sans culotte bleue, à poser ci et là une échelle dans les axes successifs de nos points de vue de chacun, et s'y percher pour des acrobaties pendues, lasses et un peu crues. A l'avidité du regard presque un pied de nez.

    Puis E.D se rhabille enfin, prenant son temps jusqu'au bout, de la capuche aux chaussures. Sans marquer la fin, sans solliciter d'applaudissements. S'en va et ne revient plus. Pour une absence tout aussi existentielle que ses présences d'avant.

    Paris Possible? Paris tenu.

    C'était Eléonore Didier pour la création de Paris, possible , à Point Ephémère.

    C'est gratuit et ça recommence au même endroit, mardi prochain le 26 juin, à 19h ou à peu prés.

    Guy

  • Je baise les yeux (je n'ai pas trouvé de meilleur titre pour ce texte que celui de la pièce)

    Alors que s'installe l'assistance, les trois conférencières déja assises discutent à mi-voix, dénudées derrière la table, l'air de rien et seins à l'air... Cette entrée en matière nous place dans la perspective d'une pièce de danse contemporaine débribée, la feuille de salle suggère une performance aux développements plutôt intellectualisés, les premières minutes nous installent dans la fiction d'un talk show télévisé avec des professionnelles du strip-tease... Il s'agit un peu de tout cela à la fois, et aussi d'un drôle de canulard qui nous prend à contre-pied, comme l'annonce la barbe postiche de mlle Gaëlle Bourges et ce titre à retourner en tout sens: je baise les yeux.

    Au premier degré, on écoute les effeuilleuses invitées. Elles témoignent sur un mode documentaire auprés de l'animateur des réalités du théatre érotique. A savoir les conventions du strip tease en tant qu'acte spectaculaire, les conditions économiques de l'exercice de ce métier, les relations de travail et motivations personnelles des artistes, la sociologie et la psychologie du public, ainsi de suite... La bonne nouvelle, c'est que traités à juste distance, avec quelques ruptures déconcertantes, ces échanges sont décalés et hilarants, et les rôles savoureusement bien distribués. Gaspard Delanoë plus que parfait en interviewer pédant et féru de références culturelles hors de propos pour réhausser les évidences. Les trois performeuses se distribuent les rôles du jeu, de la généreuse candide à la contradictrice systématique. Le débat s'épice pince sans rire, et l'on se rend compte que les platitudes qui sont dites n'en sont pas moins des vérités. L'ironie n'est elle ici qu'un habile moyen pour y nous sensibiliser?

    L'exercice risquerait pourtant de lasser sans les travaux pratiques...Nous surprend alors un nouveau renversement: puisque que la conférence est nue, les strip-tease resteront habillés, les attentes du public déjouées. Chacune se révèle dans son style. Gaëlle Bourges dans une recréation effrénée de Saturday Night Fever en talons aiguilles, Marianne Chargois en contorsionniste à la fois poétique et provocatrice, Alice Roland en créature de cuir et de chaos.... Derrière les codes aguicheurs et les poses explicitement sexuées se profilent des imaginaires érotiques singuliers, et de fulgurantes affirmations chorégraphiques. La lecture à plusieurs niveaux de leurs paroles et de leurs gestes s'enrichit dans l'ambiguité lorsque l'on considère que les trois interpretes pratiquent professionellement le strip tease... Mais à l'issue de cette performance drôle et fine, focalisée sur l'ailleurs d'un théatre ouvertement libidineux, est paradoxalement occulté une interrogation inhérente à la situation qui vient d'être vécue: la place de l'érotisme dans le cadre d'une performance contemporaine.

    C'était Je baise les yeux, m.e.s. par Gaëlle Bourges, avec Alice Roland, Gaspard Delanoë, Marianne Chargois, Gaëlle Bourges, à la Ménagerie de Verre.

    Gaëlle Bourges est en résidence à Point Ephémère, et crée en mai La Belle Indifférence aux rencontres du 9-3

    lire aussi télérama et les trois coups

  • Le Chantier de La Ribot et Mathilde Monnier

    C'est une idée fertile que d'ouvrir aux spectateurs des étapes de création et autres travaux en cours. On y goûte coté danse, dans des lieux de résidence comme Point Ephémère, ou au Regard du Cygne. Coté théâtre, le théatre2genevilliers en fait une des preuves de sa volonté d'ouverture sur la ville et à tous les publics. Ce sont des situations inattendues, le regard s'étonne de moments fragiles, ambigus, veut aider et imaginer. Le jugement se désarme au profit d'une compréhension plus généreuse de ce qui se met en route vers des directions encore incertaines.

    gustavia par marc coudrais.jpg

    On se sent dans cette situation à regarder La Ribot et Mathilde Monnier dans un dense enchaînement de duos et situations. Les dames commencent en des faux pleurs qui ressemblent à des fous rires, pétillent et se renvoient la balle, nous font partager leur jubilation de se découvrir l'une l'autre. Font montre de brio et de virtuosité, on en n'attend pas moins d'elles vues les quelques décennies d'expériences que  les deux chorégraphes ensemble totalisent. De multiples ambiances sont traversées, les références au cinéma de Charlie Chaplin et Buster Keaton sont évidentes et assumées, témoin le stekch inusable de la planche que l'une retourne pour assommer l'autre. Mais on se fait alors la reflexion que les deux génies du muet avaient su oublier l'âge des batailles générales de tartes à la crème pour mettre le comique visuel au service de vrais personnages, et de la représentation de la condition humaine. Durant les temps morts, on lit, pour essayer de recoller les morceaux, le texte de Gérard Mayen sur la feuille de salle qui évoque un "laboratoire" et souligne que le duo garde un coté "fripé". On apprend tout le plaisir qu'elle ont eu à créer ensemble: tant mieux. On lit: "Une pièce doit-elle forcement parler de quelque chose?" et "(Gustavia) est une forme profondément originale, comme échappée de ses auteurs, pour un jeu constamment relancé, jamais arreté". On ne saurait mieux dire. Celle des ébauches qui vient en dernier est la plus prometteuse, un dialogue drôle et endiablé, sous-titré de gestes. Inédit et entrainant.

    Dans le parking du Centre Georges Pompidou un couple en discute encore: "T'as vu comme La Ribot fait trembler ses muscles, elle est extraordinaire", "Mmmmouias, mais je n'ai pas compris où elles voulaient en venir" bougonne le monsieur. On est d'accord avec le monsieur, mais c'est frais et prometteur, on ne manquera pour rien au monde la création de Gustavia, quand la pièce sera achevée.

    C'était Gustavia, de et avec Mathilde Monnier et La Ribot, au Centre Georges Pompidou, avec le Festival d'Automne à Paris. Jusqu'à dimanche.

    Guy 

    photo par Marc Coudrais avec l'aimable autorisation du Festival d'Automne à Paris

    Voir Gustavia en images (costumes noirs sur fond noir) chez Vincent Jeannot, lire le Tadorne à Montpellier Danse, et Rosita Boisseau pas emballée dans Télérama.

  • Hier

    Bilan ?

    …Anti-Bilan ?

    … Rapport d’activité ?

    Il est sans doute moins malaisé de commencer par les chiffres? 53 nouveaux spectacles chroniqués cette année 2012, juste au-dessus du seuil symbolique d’un par semaine. Impossible de nier que le rythme se ralentit depuis le début du blog (500 entrées entre mi-2006 et mi-2012). Pourquoi? J’écris lentement  depuis toujours, aujourd'hui plus lentement sans doute. La production au rythme actuel suffit sans doute pour justifier la continuité du blog, compte tenu de contraintes liées à ma vie professionnelle, familiale, personnelle… La lassitude vient parfois, jamais au point de me faire envisager d’arrêter. Tant qu’il y aura de l’étonnement et de l’émotion, et la sensation que l’écriture ensuite réordonne la perception…

    Ce chiffre ne correspond pas au nombre de posts publiés. Certains posts rassemblent plusieurs spectacles, mis en perspective dans le cadre d’un festival (Frasq) ou par choix personnel (Fauve et this is the end autour de la jeunesse). A l’inverse, il y a une bonne vingtaine de spectacles dont je n’ai pas parlé, presque autant de autant de regrets, quand ce n’était pas par manque d’intérêt, mais  par manque de temps ou difficulté dans l’approche.

    Aussi, j’ai rediffusé une dizaine de chroniques (La mort et l’extase, show funèbre à sept voix...) à l’occasion de reprises, encouragé par les remarques d’amis frustrés de ne jamais pouvoir voir des spectacles dont ils ne lisent souvent le compte rendu qu’après la fin des programmations (souvent courtes). Je me rends ainsi compte que je dispose d’un fond de textes, mais qu’en faire?

    L’une des vocations du blog était de découvrir de nouveaux artistes. Le rapport entre propositions d’artistes que je connaissais déjà, et d’artistes que j’ai découvert a été en 2012 de 60%/40%. J’ai dans les faits plutôt privilégié la fidélité au détriment du renouvèlement. J’ai vu cette année deux créations de de Thibaut Croisy, de Laurent Bazin, de Sandra Abouav, des artistes donc prolixes et assez bien programmés. Au moins sont-ils jeunes et émergeants. Il y a des artistes dont je suis les travaux avec passion sur la durée, voire des propositions dont j’ai  rendu compte plusieurs fois à différentes étapes  de la création (Le modèle d’Eléonore Didier, Sous ma peau de Maxence Rey). Les choix sont compliqués. L’offre est si abondante à Paris que je ne peux en embrasser qu’une fraction. Au-delà de mon plaisir et de ma passion, le désir d’être utile vis-à-vis d’artistes entre trop peu connus et de partager constitue un moteur. L’animation cet automne d’un atelier d’écriture en milieu carcéral a été pour moi une expérience forte et féconde.

    Si l’on parle de catégories…. Les choix se portent plutôt vers ce qui est considéré comme de la danse de danse, aussi du théâtre, un peu de cirque, des performances, des lectures, des concerts… en privilégiant des formes mixtes, surprenantes, incisives, qui transcendent les genres, à forte teneur en émotions, incarnées, avec de vrais sujets et utilisant de nouveaux modes narratifs. Les propositions de Viviana Moin (hélas absente cette année) répondent bien à cette définition. Seule contrainte définie dès le départ, ne parler que  ce qui peut être qualifié de spectacle vivant. Je suis tenté, paradoxalement de faire de plus fréquentes incursions dans des genres populaires (théâtre classiques, café-théâtre)… sans y parvenir pour le moment.

    Je me sens bien incapable de tirer un bilan artistique de l’année, ce pour plusieurs raisons. Mon regard sur chaque proposition est singulier, subjectif, et indissociable de circonstances particulières, n’existe que dans le cadre d’une relation à un moment donné avec des artistes. Et surtout, j’assiste qu’à 1% de ce que ce qui est proposé à voir, ne participent pas aux festivals (Avignon) ou saisons (Théâtre de le Ville) qui forment, même en négatif, l’opinion.

    Ma fréquentation se concentre sur certains lieux pour différentes raisons: une confiance en leur programmation, l’habitude d’y rencontrer des personnes avec qui j’au plaisir à échanger, et pour des raisons pratiques et financières tenant aux invitations. J’ai beaucoup fréquenté La Loge (8 fois), ce qui rend justice au développement de ce jeune lieu, sans délaisser des valeurs sures (Théâtre de Vanves et Artdanthé: 7 fois), Etoile du nord (5 fois), les lieux de résidence où se travaillent de jeunes  chorégraphes (Point Ephémère 6 fois à l’occasion des petites formes, Mains d’œuvres, Micadanses 3 fois). J’y vois beaucoup de Solo, duo, trio, des propositions sensibles et intimes, en rapports serrés avec les artistes, au détriment du spéculaire avant grand moyens décors et effectifs. Dans des lieux aux salles à taille humaines à l’exception de la villette (2), du nouveau théâtre de Montreuil (2), de la cité la cité internationale (3), le Rond point (1). Pour être complet, je suis aussi passé par Gennevilliers, Regard du cygne, le colombier, atelier Carolyn Carlson, le centre culturel suisse Ma fréquentation se concentre clairement sur quelques lieux, ce qui porte à réflexion. J'ai cependant assisté à 6 proposition dans des lieux inattendus: Salon de coiffure (Lionel hoche) appartements, lieux publics…

    L’écriture…Elle est toujours difficile à produire, mais me semble plus s’assagir, moins libre dans la forme que ce que je rêverai. Banalisation ou maitrise ? J’ai au moins le sentiment d’assumer ma position de spectateur concerné sans être érudit, ainsi que l’exposé de ma subjectivité, et d’adopter une juste posture entre bienveillance et lucidité.

    Fréquentation: Plusieurs milliers de visites uniques par mois me laissent à penser que je suis lu, ainsi que de nouvelles inscriptions à ma mailing list d’une grosse centaine d’abonnés. Peu de commentaires sont laissés, mais les « j’aime « sur facebook, témoignent de lectures actives plutôt de de visites fortuites. Certains échanges me confirment mon rôle de prescripteur même vis-à-vis de professionnels.

     Vos suggestions?

     Bonne année

    Guy

  • !Kung Filage

    !Kung Solo est présenté les 12 et 13 janvier à Mains d'Oeuvres dans le cadre du festival Faits d'Hiver.
    l'article qui suit a été mis en ligne le 8 janvier.
    La piece se file, le temps plus lentement, lui-même ne s'enfuit même plus du tout quand tous les mouvements se figent. Qui voire revient deux ans avant. Ce !Kung Solo est d'abord pour moi le souvenir de Paris Possible, en plus net désormais, et plus coloré.

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    La répétition de ce soir à Mains d'Oeuvre est grande ouverte: nous sommes une bonne vingtaine. Le hasard place assise à mes cotés, Eléonore Didier: il y a matière à sourire et à s'interroger-à défaut de penétrer ses pensées- en surprenant du coin de l'oeil ses gestes et ses mimiques muettes, ses réactions attentives aux actions de son interpréte: Mathilde Lapostolle. Celle dernière qui reprend le rôle dansé jusqu'alors par la chorégraphe elle-même, plutôt transpose, parait solidifier ce qui errait jusqu'à présent dans le territoire de la recherche, de l'incertain. Du soi à l'interprète, quelque chose échappe à l'intime, s'objectivise, comme un manuscrit que l'on voit enfin imprimé en livre. Par moment Eléonore sourit ou se fige, trépigne lorsque-deductivement-quelque chose ne file pas comme pévu. Se découvre-t-elle en double, sa disparation organisée, ce nouveau corps installé dans ses pensées? A un moment les yeux de Mathilde Lapostolle semblent noyés, braqués vers Eléonore qui alors plisse les siens. Les deux femmes semblent alors se scruter, de prunelle à prunelle. Du souvenir brut chair sur béton, dépouillé, de Point Ephémère , à la répétition de ce soir, le background s'est théatralisé; tapis vert pomme, jaune vif les chaussettes et frou-frous. La réprésentation est plus fantaisiste que le chantier. Mais l'échelle est restée. Eléonore, Mathilde: on pourrait d'abord confondre l'une et l'autre, corps planqué sous la doudoune, tête sous la capuche, visage sous les cheveux. Les mouvements pourtant ont ce soir quelque chose de plus définitifs, nets, dansés. Même quand elle retombe au repos, aprés être retombée plusieurs fois de suite comme si elle tentait de retomber toujours plus bas en vain, dans ce repos ou ce renoncement qui semble désormais interprété. Je jubile de revoir autrement ce moment provocateur (mais ce soir joué devant un public d'avance bienveillant). Je suis certain que, les prochaines fois, beaucoup en seront exaspérés. Le temps de la création a beau avoir laissé la place à celui de la réprésentation, il garde cette qualité d'indécision. Je retrouve aussi- agencées différement-d'autres pièces du mécano, d'autres matériaux. Déja vue, cette partie de jambes en l'air solitaire, d'une narquoise indécence, la tête qui s'entête à heurter le carton, et le corps mu par l'absent, corps muet et assymétrique, passif. Plus loin l'énergie épuisée, recroquevillée, le désir agite les seuls doigts, comme un premier ou dernier chatouillement. Toujours ces tentatives pour se glisser dans les interstices, y disparaitre, en autruche sous le tapis, sous le plastique. Il y a tous ces instants pour longtemps, et l'absence omniprésente. Mais pour en revenir sans cesse à un corps trivial et matériel, d'un humour incertain. D'autres passages réinterprétés semblent se préter à de nouveaux sens. Mathilde nue dans le rôle d'Eléonore- mais les photographes frustrés pour ce soir des instants les plus photogéniques, et drôles aussi- se dédouble elle-même sur la scène en photographe et modèle, rive son oeil à l'objectif, prend des poses inquiètes habillée de cartons, crée des images à foison, se refugie dedans comme sur un bateau de fortune, pour partir ailleurs. Cette piece me parle du temps qui passe, de pensées fugaces et plutôt inavouables, de l'insaisissable, du possible et de renoncement. Mais avant de partir -moi-même préssé, attendu ailleurs- je regarde chorégraphe et interprête dans ce processus, l'une dépossédée, l'autre captive, toutes deux frêles et volontaires. Cette sourde obstination à matérialiser les mêmes obsessions en art et gestes fait le jeu de mon regard, de ma mémoire de spectateur.

    C'éait une répétition de !Kung Solo d'Eléonore Didier avec Mathilde Lapostolle, à Mains d'Oeuvres. Guy

    Photo de Camille Muret (dossier de presse de Mains d'Oeuvres)

    Ici les photos de Vincent Jeannot-Photodanse et Jerôme Delatour- Images de danse.

  • Speed dancing

    Ce n’est ni à une répétition, ni à un spectacle, ni un festival, auquel j’assiste aujourd’hui, mais à des rencontres entre professionnels de la danse. Une vingtaine de compagnies, connues ou moins, présentent durant deux jours, à la Maison des Arts de Créteil, leurs créations à des programmateurs, en présentent plutôt des extraits. Pour la troisième année le CDC du Val de marne m’invite aux Plateaux, j’en suis content, attiré ici par la variété des propositions, m’y sentant toujours pourtant comme un peu clandestin, au milieu de professionnels. Il y a là plus d’une centaine de programmateurs, de représentants de lieux de spectacles et de création, qui viennent quant à eux  autant pour le travail que pour le plaisir de la découverte. Je leur souhaite d’arriver à concilier les deux. Le rythme est soutenu. Afin de permettre à un maximum de compagnies d’être vues dans le temps par définition limité de la manifestation, ce sont des échantillons- idéalement représentatifs- des pièces qui sont proposées. Des teasing de 10 à 30 minutes, c’est quitte ou double. Cette contrainte est d’évidence réductrice pour le chorégraphe, et souvent frustrante pour le spectateur. Mais la curiosité est éveillée, tant les propositions, sur le fond et la forme, sont variées. L’essentiel est que cette louable initiative du CDC permette à des compagnies de gagner ici en visibilité. Se crée ici pour quelques heures tout à la fois un lieu de création et une place de marché,  un lieu d’approches, d’étonnements et de rencontres. On devine que réputation et notoriété se construisent sans doute sur un plus long terme que ne souhaiteraient ici les artistes.

    J’arrive pourtant en terrain connu. Je retrouve Veronica Vallecillo pour Redressage, Redresser, Redresse-toi. Et me retrouve saisi par l’intensité déjà vécue qu’il y a trois ans à Point Ephémère, gagné par des sensations lourdes déjà ressenties alors, par la même étrangeté. Le sol semble trembler sous le martèlement guerrier des talons de la danseuse, les vibrations s’insinuer dans mon inconscient, accompagnées par de graves chuchotements, et par le grain palpable de l’image et du son. Le noir domine, déchiré d'écarlate, l’espace dessiné libre pour des rêves troubles. Au fond le paysage s’enfuit, des banquises s’effondrent. Au centre, farouche, la figure féminine: corps raide et en défi, corseté en robe noire, voile et bottines, en pleine flamenco attitude. Entrainé dans un vertige érotique, dans une danse post-apocalyptique, entretenant avec les comparses vêtus de collant noirs et munis de trousseaux de clés des relations réversibles et ambigües. Fouets, baisers et étreintes avec la mort rouge: les scènes se chargent d’autres images fortes et fantasmatiques….et la création en reste là, inachevée, pour le moment en recherche de budget. Impossible d’oublier ici que la dance est aussi une activité économique, dont on connait la fragilité des paramètres (faiblesse des recettes de billetteries, complexité des soutiens publics, grande richesse de l’offre créative,  précarité de la situation de beaucoup d’artistes…). En l’absence de financements beaucoup de créations restent longtemps à l’état d’ébauches, je souhaite que cela ne soit pas le cas de celle-ci.

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    La jauge est ensuite annoncée quasi complète pour Claudio Stellato, je m’efface pour laisser plus de place aux pros. Louves, de Christian Ben Aïm, ensuite me laisse perplexe. Au moins je ressens avec évidence un déluge inquiétant de piano et percussions. Il faut d’abord s’habituer à la féminisation du danseur, qui, dans ce songe de fées, se rêve petit chaperon rouge puis grand méchant loup, se débat dans sa robe. Le suivre, alors qu’il se déplace par mouvements paniqués, puis lorsqu’il évolue de personnage en personnage, sa hache brandie, du comique au menaçant. Le temps me manque, sans doute, pour m’adapter à ces changements de modes. Pourtant, il semble que la création-qui sera reprise cette saison à Artdanthé- aie été dés le départ prévue pour ce format: c’est l’exception qui confirme la règle.

    Au retour du déjeuner Bruno Pradet, avec Des Cailloux sous la peau nous emmène déambuler aux quatre coins de la Maison des Arts. Afin de présenter en continu les différentes propositions des compagnies, une demi-douzaine de lieux du bâtiment du M.A.C. sont utilisés tout au long de la journée. Ce chorégraphe ci a choisi de mettre en mouvement avant tout les matières: sable, lumière, fumée, images projetés… Aux danseurs de s’y confronter, de glisser leurs corps dans ces environnements. A défaut de pouvoir en vingt minutes nous guider dans la profondeur, Pradet nous place dans un état de jubilation enfantine, impressionnés par le renversement des sensations et l’inventivité des effets. Et tire bien son épingle de ce jeu de démonstration accéléré.

    Pas le temps de souffler- tout juste de saluer des visages connus, voire des personnes moins bien identifiées dans la cohue et qui ne m’ont peut être plus reconnu non plus, ou de reconnaitre d’autres personnes pour de bon mais sans avoir le temps de les saluer, et d’abord ne pas reconnaitre Veronica Vallecillo (qui sur scène était masquée)-il faut aller ensuite découvrir Palle Granhoj (Danemark), qui présente un extrait de 2men2mahler. Ce duo masculin joue d’abord drôlement des muscles, et à cache-cache avec la nudité, dans une suite de gags qui trouveraient leur place dans une salle de gym…mais la pièce passe progressivement du comique à la subtilité, les rapports entre les deux personnages gagnent en intensité et incertitudes… Leur relation muette semble riche et  annonciatrice de futurs développements. Mais à dire vrai, ma concentration commence à se perdre, plus par l’effet de ma propre fatigue qu’à cause de la pièce, sa douceur permet d’agréablement m’évader ailleurs. Cette proposition est ouverte. Si j’étais programmateur, je voudrais en voir plus, mais plus tard peut-être.

    La proposition suivante commence avec du retard, de tels aléas techniques étant la rançon de cette course en flux tendu, et la transformation de tous les espaces d’ici en lieux de représentations. Toucher terre de Laura Nercy me lasse très vite, la fatigue y est peut –être pour quelque chose. C’est la cinquième proposition vue aujourd’hui, à chaque fois un effort d’adaptation à un univers différent, un exercice d’humilité. Mon empathie d’assèche, et le public de professionnels qui m’entoure me semble plus difficile et retenu qu’un public d’amateurs. Mais j’aurais eu, confronté à cette pièce dans un autre contexte, des réactions similaires: confinée sur une chaise la proposition me parait trop statique, introspective et auto-centrée, sans la grâce ou le mouvement qui pourrait la transcender. Ni la subtilité de la proposition d’avant, ni le spectaculaire de la précédente. Gros coup de fatigue et saturation, je sèche INAWTP de Kasja Sandström. Brève évasion dans le réel, dans un rade de la dalle-esplanade de Créteil, lieu vaste, vide, blanc, plat et venteux entre Hôtel de Ville, Commissariat, Chambre de Commerce, Préfecture et Maison des Arts et de la Culture. J’admire les pros, qui pendant ce temps enchainent sans sourciller (mais peut-être certains font-ils l’école buissonnière ?).

    Retour à la M.A.C. Grand hall central encore désert, mais dans la fosse quatre jeunes femmes plus nues qu’en intégral, bronzées et huilés, aux physiques calibrés au poil prés selon les canons du jour, qui s’étirent alanguies sur un tapis de danse. Réveil instantané. Il s’agit de la mise en place de la prochaine performance, Broken Glass Performance d’United-C (Nl). Le show s’enclenche sans heurts ni ruptures à la sortie du public de la salle d’avant. Les belles évoluent en frôlant au sol des verres cassés, pour donner le sentiment de pouvoir se blesser durant l’exercice. Elles caressent les tessons du bout des doigts de pied, lentement se retournent, se fraient horizontales des chemins des les verres coupants en glissements charnels, étirements sensuels et pivotements luisants. Les verres tintent aussi agréablement. Personne ne m’en voudra de révéler que les belles s’en sortent indemnes, les amateurs de sang ou de coupures en restent pour leurs frais. A dire vrai, je ne parviens pas à avoir peur pour elles. Les danseuses semblent plus exposées aux regards qu’au danger (sinon au niveau symbolique). A défaut d’être vraiment intense ou cruel, c’est « plastique » et visuellement généreux. Et très lisible à la fin d’une journée bien remplie. A suivre: une autre création de la même série dans quelques mois à Artdanthé (décidément).

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    Ensuite, T.R.A.S.H. (Nl) délivre avec T+Bernadette ce qu’il faut, à 18H00 passé, d’adrénaline. Je connais leur style (et n’ose plus dire d’où), on ne peut plus physique et nerveux, on craint plus pour eux que pour les danseuses d’United-c. Courses et saccades, gestes tendus, pendus, tremblés, équilibres pénibles, corps qui se trainent et se heurtent, se saisissent et se culbutent cris et tremblements, agitation extrême, le sol en est secoué. Et un violoncelle est là pour taper sur les nerfs. L’Il et l’Elle du duo changent souvent de rôles et de costumes, mais je ne sais lesquels. Si je ne comprends rien à ce qu’ils disent, je goute à de belles fulgurances. J’en sors en n’ayant rien découvert de plus: ni conquis ni déçu.

    Je commets une dernière erreur, aller voir, le regard épuisé, la représentation publique de Mais le diable marche à nos cotés d’Heddy Maalem mon regard épuisé. La pièce est nerveuse et intense, situé dans un désert aux couleurs rouges traversé de migrations inquiètes, la musique entêtante, le tout est trop oppressant, je ne suis plus, après cette journée, armé pour affronter cela. La rencontre n’a pas lieu. Les plateaux continuent le lendemain, ouverts au public. pour des raisons personnelles je ne peux assister à cette seconde journée et n’entend tirer ni bilan ni conclusion de la première. C’est un voyage express dans un paysage contrasté et morcelé, avec d’étonnant aperçus, un paysage modelé par les différents artistes, qui me donne envie d’encore marcher et découvrir. Sans règles, ni tendances lourdes qui se dégageraient, ni directions partagées: tant mieux.

    Guy

    photo 1 avec l'aimable autorisation de Véronica Vallecillo

    photo 2 avec l'aimable autorisation de United-C