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nina dipla

  • Dans la forêt

    Pas franchement sauvages les spectacles, libres surement, plutôt inattendus dans leurs enchaînements -c'est d'ailleurs sympathique-nous permettant libres d'imaginer entre eux rapprochements, clins d'oeil, correspondances, par accidents (une fois oubliées les trop longues et toujours inutiles présentations). Pour tous goûts et publics, donc à me laisser moi-même au bord du chemin tout au long de deux des propositions. Baroques et athlétiques, irréprochables avec sauts impeccables à la croche pres, elles  laissent mon imaginaire au calme plat.

    A l'opposé, Pièce détachée, sonore de Stéphanie Auberville et Tirez sur le danseur de Fréderic Werlé  ont ceci en commun qu'ils parlent de la danse en elle-même (ou la laissent entendre ;-)). Au risque de se trouver à court d'autre fond, même si ces deux projets ne manquent ni d'audace et de subtilité. Dans le premier cas, il s'agit de la mise en espace (et cartons!) de la bande son des répétitions d'un spectacle à venir en avril àl'Echangeur. Je reste sur ma faim, préfère accepter l'entreprise comme une bande annonce. Fréderic Werlé parle avant tout de lui-même (au mieux: de la condition de l'artiste en général), fait son strip tease moral et professionnel, déballe littéralement son bagage de danseur et partage les propositions miséreuses et déshabillées qui lui sont faites par Pôle Emploi. Cela ne manque ni d'humour ni de poésie ni de franchise. Mais l'auto-centrage de ce propos désabusé, l'abondance de private jokes, sont suceptibles de lasser ceux des spectateurs qui comme moi ne sont ni journalistes ni professionnels de la danse.

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    A une autre échelle, Nina Dipla (Kyma) danse la vie même, ouvre vers un peu d'universel. Une troupe de sept femmes qui dorment, lentement révélées à la lumière du jour, puis c'est la féminité qui s'éveille. Du sac au ressac, les gestes sont transmis d'un corps à l'autre. Au gré des ambiances et des humeurs les corps languissent à l'unisson, puis se précipitent en une course sans fin, en robes colorés et peaux dorées. A cet instant, on serait prêt à jurer que la danse ne peut être jamais qu'une affaire de femmes, dont un spectateur masculin fasciné pourrait interroger longtemps et en vain les mystères. En mouvement sur la scène, cette armée de nymphes, portées par un souffle continu, court entre drames, aguichements, insolences, apaisements, fusions amoureuses, querelles, traques et poursuites. Une impression de masse et rendu brut, non policé, ne refroidit pas le regard, rend justice à la générosité de la piéce, cette l'energie démultipliée par le nombre. Le final monte convulsif, salutairement excessif, pimenté d'une narquoise impudeur.

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    Vue dans la dimension plus réveuse-tout aussi mystèrieuse-du duo, l'exploration de l'imaginaire féminin continue avec Au Loup-Contes de jeunes filles en brume de Julie Trouverie. Ce beau duo ressemble à un solo en miroir, fusionnel, une acide et troublante promenade dans une forêt de symbôles, au son de boucles hypnotiques. Au sol roulent les pommes, revenues de l'enfance et des contes de fées. La protagoniste dédoublée (la femme et l'enfant en elle?) visite à l'aveuglette, pâle et tendue, visage renversé, ou mains sur les yeux, à nous suggérer dans l'ombre des secrets que l'on ne saurait regarder en face. La danse se densifie, l'étreinte en apnée trouble, d'une sensualité sèche, une pomme mordue en bouche à bouche, la tension attise l'étrangeté. Le loup reste invisible, le voyage inachevé (1).

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    Si elle avait pu rester pour se glisser dans la piece suivante- Saad, Saad de Soraya Djebbar, cette femme aurait fait, à défaut de loup, une rencontre intéressante... Il faut se méfier cet homme ordinaire, civilisé, l'allure presque étriquée, assis sur une chaise. Il laisse peu à peu autre chose s'extraire de lui même, par gestes imprévisibles. Progresse par sauts de faune, possédé, retrouve des cornes-il faut croire qu'en tout homme il y a un bouc qui sommeille- poursuit sa spectaculaire désévolution vers une totale animalité, finit nu (libéré?) dans une autre forêt projetée en vidéo sur les murs bruts de pierres du lieu.

    C'était les Spectacles Sauvages du studio du Regard du Cygne.

    Photo de Kima par c.chevalier avec l'aimable autorisation de Nini Dipla, photo d'Au Loup par Anne Decourt avec l'aimable autorisation de julie Trouverie, photo de saad, saad par Nathalie Euvrie avec l'aimable autorisation du Regard du Cygne.

    "Kima" et "Une attraction invisible" seront présentés à la ménagerie de verre , le 29 Avril à 18H00, au bénéfice de la croix rouge du japon.
     
    (1) renseignements pris, l'histoire est à suivre... 
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