Évoquer l'autisme et d'autres troubles mentaux, c'est le projet du solo de Sophie Blet. Le savoir change tout de mon regard, me guide dans ce que je perçois de cette danse, des apparents désordres qui s'y manifestent. L'être ici semble multiple, ses mouvements singuliers. Mais, au rebours des premières apparences, je peux y lire une cohérence. Le corps s'exprime fulgurant, en expressions de nécessités, autant de tentatives à vif de communiquer une souffrance réprimée. Intentions tenues: le langage articulé ici avec pudeur, en équilibre délicat entre l'étrangeté et la justesse, évite les pièges de la sensiblerie. Esquisse le dessin de l'hypersensibilité, renforcée par la musique et vidéo: sur des surfaces blanches et froissées, comme tourmentées, sont projetées des sensations de fournaise. Ces murs de papiers seront fait pour être déchirés et franchis.
Cette expérience particulière me renvoie à la constante difficulté de percevoir ce que, non verbalement, la danse exprime, et ce qu'elle seule exprime. Rester en état d'écoute, pour recevoir, faiblement ou de plein fouet, ces signaux, les traduire, les reconstituer, se les approprier. Ou hélas s'agacer des redites dans le vocabulaire, échouer dans les malentendus, même dans une froide incompréhension. Comment jamais la danse réussit elle à communiquer avec nous?
A-tique de Sophie Blet vu en fin de résidence le 23 juin à Micadanses
Guy
photo de Pauline Pénelon avec l'aimable autorisation de la compagnie