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Les corps de Sofia Fitas

Elle nous renverse. D'abord nous aveugle. De métamorphoses. Nous déshabitue. Puis dirige le regard à la loupe. Le focalise, le brouille, le morcelle. Casse tout des constructions habituelles. Joue des oppositions: belle robe, mais matière plastique. De face, le visage à disparu. Parti à la renverse. 1459501198.jpgescamoté. Ceci n'est plus une danseuse. Cou et menton forment un autre. Un être, reptile? Mutant? Primitif? Qui se cherche. D'abord en lenteur. Repères bouleversés. Après se présentent les muscles du dos. Forment d'autres figures. Des créatures, sous la peau. Il y a foule. Qui produit contrastes, contractions. Torsions. Grouillements et conflits. En nudités émiettées. Micro-organismes. En perpétuelle évolutions? Les membres font combat. Font sécessions. Comme chez Maria Donata D'Urso... Le mouvement en plus? Plus innovant. Plus exigeant. Plus ambitieux. Car elle bouge. Ouvre des possibles. Elle court, sans courir. Sur de nouvelles trajectoire. Toujours l'entier se dérobe. Ne livre une humanité éparpillée. Ou complexe? Un corps au pluriel. Dirigé par un esprit détaché? Par un système extérieur. Elle est, mais par morceaux. Elle se refuse humaine. Au depit de l'émotion? Mais l'inimaginable vu ouvre l'imaginaire. Le chemin est aride, rigoureux, escarpé. Peut en décourager plus d'un. Elle ne se montre pas, toujours. Jusqu'au bout, sans identité. Nulle apparition de visage, nul coup de théâtre, nulle révélation. C'est risqué, et beau. Enfin elle s'efface, se coule dans le noir. Nous laisse en stupéfaction.

A la sortie: une discussion...ou un exposé? Une volonté et une vraie profondeur. Une réflexion sur le corps qui échappe au lieux communs. De l'exigence, de la générosité, du sérieux. Pour une fois, le mot recherche n'est pas utilisé en vain. On repart avec Gilles Deleuze au programme. A suivre.

C'était Experimento 1, ♥♥♥♥♥ solo de Sofia Fitas, à Mains d'Oeuvres. Et ce soir, samedi, encore.

Guy

Commentaires

  • Voilà ce que j'écrivais sur Sophia Sitas en octobre dernier lors de son passage à Marseille:

    "C’est donc Sofia Sitas, chorégraphe portugaise, qui déploie la passerelle vers de nouveaux territoires avec “Expérimento 1”. De la scène surgit un corps penché en arrière, drapé de noir jusqu’au buste, telle une statue vacillante. Nous ne percevons pas son visage et son identité sexuelle est floue. Son corps est une surface de divagation où mon regard se perd entre le désir de lui donner forme et rêveries de le voir se transformer. Dans sa puissante verticalité, il cherche sa métamorphose. Le processus est sublime: aux extrémités, les doigts se prolongent comme des rhizomes de bambou et ses omoplates créent des espaces de connexion où je vois émerger de nouvelles formes corporelles. La statue de pierre devient plus liquide à mesure que la musique de Rui Miguel Leitao se fait chaos. Le corps se libère alors de son enveloppe noire pour se mouvoir dans un espace horizontal. Désarticulé du vertical, il perd de sa puissance et ses mouvements cherchent un contenant que Sofia Sitas n’a pas encore trouvé. C’est une expérience prometteuse, car son territoire est en émergence. Les rendez-vous sont donc pris."

    Nous avons ressenti la même sidération. A suivre...

  • La vidéo est ici:
    http://www.dailymotion.com/video/x3veia_experimento-1_creation

  • Je ne me souvenais pas que tu avais écris sur ce spectacle...il a beaucoup de convergences entre nos impressions!

  • C'est toujours passionnant de croiser les regards surtout quand nous naviguons en eaux troubles, au coeur de ces oeuvres encore émergentes!
    Que nos blogs permettent à Sofia Fitas de percer chez nous et ailleurs!!

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