Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Où suis je?

Leïla Gaudin, plus ou moins debout sur une table, en position incertaine. Nous sommes assis, autour elle, dans le restaurant de Mains d’œuvres. La bière est offerte. Leïla Gaudin n’est pas la première, loin de là, à tenter l’évasion hors de la scène, l’intrusion dans un espace quotidien. Mais sa situation ce soir semble particulièrement indéterminée, en suspend. On la voit. D’où la comprendre? La précédente pièce- Cette heure du matin - mettait en scène des incidents du quotidien, mais dans un cadre scénique conventionnel. Dont elle s’extrait ici. Sur sa table, elle bredouille, titube. En effet, il y a un sujet. Le portrait cru d’une ivrogne, qu’on imagine sans abri, qui vagabonde sans but ni foyer. S’agit-il de nous inviter à voir ceux que dans la vraie vie l’on préfère ignorer, tant ils nous dérangent, dans leur déchéance?

Errance©PaulineMaitre.JPG

Mais elle part autre part. S’adresse soudain à nous à un autre niveau, sur le ton froid du commentaire, souligne que par sa position de performeuse et contrairement à tout un chacun, elle peut nous montrer ses fesses sans que l’on s’en offusque. Ou nous incite à ressentir la mystérieuse présence dont le regard peut investir des objets inanimés. Rétablissant ainsi la distance d’elle à nous, et tentant abolir ce même distance l’instant d’après, de retour dans son personnage, errant dans nos rangs jusqu’à atterrir tête en avant dans la poubelle, titubant incertaine et ainsi la pièce. Grande rousse hagarde, la beauté sur le fil, ivre d’apparence, pauvrement habillée. Plus que nature. Une assistante s’empresse de délimiter par deux lignes de rubans adhésifs au sol le chemin qu’elle empruntera entre nos tables. Repères en pratique inutiles, mais si symboliques, ils dessinent un espace imaginaire et interdit. Des deux cotés. Ces limites nous protègent du contact, de l’odeur, de la saleté…  Les barrières sont rétablies, la distance survit à tout, la performeuse en fait la démonstration incertaine. Où cette pièce va-t-elle? Est-elle perdue d’avance à refuser, ou dépasser, son sujet? Quelque chose ne vient pas et s’empêche, c’est cela qui est troublant, donne envie de persister. Je ne sais pas si l’exercice est vain, ou s'il est passionnant. Peut-être faudrait qu’il dure bien plus longtemps, des heures durant, à nous lasser vraiment, ou jusqu'à ouvrir sur autre chose, trés loin…

C'était Errance 1 de Leïla Gaudin, vu à Mains d'Oeuvres.

Guy

Lire aussi Jean Marie Goureau

Photo par Pauline Maitre, avec l'aimable autorisation de Mains d'Oeuvres

Commentaires

  • Bonsoir Guy,

    je viens de lire votre "A propos" et il m'a séduit.

    En clair, je découvre un blog où le plaisir d'écrire se partage avec le plaisir du spectacle, du théâtre notamment. Et ces spectacles qui ne m'évoquent rien, moi qui suis de province et ne profite souvent que des miettes parisiennes, me sont de plaisantes lectures. Bref, je découvre une mine que je vais lire avec gourmandise. De futurs soirées sympathiques m'attendent.

    Si le cœur vous en dit, passez en province, des blogs y existent aussi. ;-)

  • Bonjour Richard

    Merci pour vos encouragements, et surtout pour me permettre de découvrir Il Téatro.
    Il s'en passe des choses en haute Normandie! Je mets illico un lien vers votre site.
    A bientôt
    Guy

Les commentaires sont fermés.