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Au Parc des Nations, Olga Roriz met les cultures en fusion

La journée mondiale de la danse fait escale à Lisbonne, ici, au Teatro Camoes, cube bleu posé au bord du Tage. Dans le Parc des Nations, un quartier surgi de terre pour l'exposition de 1998. Un espace résolument moderne, pourtant d'une bienveillante élégance, où l'humanité parvient à trouver sa respiration. Où règne la même douceur que dans les vieilles rues de Lisbonne, belle endormie. D'ici on voit le pont Vasco de Gamma s'étirer entre deux rives et donner à l'estuaire de faux airs de Miami, comme pour faire rêver de futurs explorateurs vers de nouvelles ambitions. Mais pour le moment s'essaient à danser au soleil devant les portes du cube bleu des groupes d'enfants et d'adolescents, dans un balancement entre sérieux et désinvolture. Ces groupes rejoignent plus tard une autre jeunesse tout aussi souriante pour mettre le public mûr et chic en minorité, lors du voyage que propose Olga Roriz  . Un voyage dans le passe?

Car c'est presque un récital, une revue incandescente des chansons d'amour du XX° siècle, de Marlene Dietrich à Franck Sinatra. L'entreprise est menée avec détermination et ferveur. C'est en écoutant les airs de Chavela Vargas, celui de Je ne t'aime pas de Kurt Weil,  que frappe la convergence thématique avec (Not) a love song d'Alain Buffard. La nostalgie se languit en harmonieux, douloureux, soupirs, abandonnés dans des fauteuils club à roulettes. Le travail vocal est remarquable, à un tel point qu'on serait tenté de classer le projet dans la catégorie des produits made in Broadway et dérivés s'il n'y avait toujours dans le contrepoint gestuel à ces beaux clichés musicaux une tendre insolence. De la profondeur et de la créativité.

Agitée de tremblements, puis débordée par les manifestations de brutalité d'un amant mais qu'elle a dans la peau, souffre d'amour une nouvelle Piafen robe noire. Images crues et d'une remarquable cruauté. D'autres passages évoqueront des joies plus heureusement partagées. Pourtant l'amour s'achève ici presque toujours en déchirements. Même en parodie et dérision, le sentiment s'assume haut, dans une ambiance capiteuse et charnelle. La danse est d'une belle vitalité, drôle, exubérante et spectaculaire. Peu importent les poncifs, femmes fatales et mauvais garçons sont emportés par la même passion. D'où qu'ils viennent: les chansons se succèdent, en anglais, en espagnol, en français, en allemand, en portugais. Les couleurs d'un blues d Europe et d Amérique du sud, entre Tango et Fado, tout de même prédominent.

Mais l'inspiration est mondiale, avant tout. Au delà du plaisir immédiat, on ne sait si l'on doit s en réjouir ou s'en inquiéter. C'est seulement dans cet autre pays que le sien que l'on touche du doigt cette réalité qui nous échappait l'an dernier à la vision de la pièce d'Alain Buffard, (entre autres): la culture se mondialise. Et la danse n'échappe pas à ce mouvement. Abreuvée aux sources des mêmes mythologies modernes. A prédominance nord américaine. Sources de richesse, ou de banalisation? Ici la vision d Olga Roriz s'impose assez forte, pour construire quelque chose de nouveau et personnel à partir de ces matériaux. Son projet touche au coeur, et intelligemment. Les artistes vont voir partout, depuis toujours. Mais comment comprendre cette appropriation au delà même des mythes européens, tout spécialement dans un pays qui semble à jamais imprégné de la nostalgie de ses anciennes conquêtes? Les références culturelles tendent elles à s'afficher partout les mêmes, aussi sûrement que les enseignes des marques dans les centres commerciaux? On est rassuré par les indices de toute la vitalité de la scène Lisboate, qui- peut être a défaut de moyens- fourmille de talents. Si les affiches annoncent la visite prochaine de Pina Baush, on regrette surtout d'avoir manqué de peu ces jours ci La festa de danca, où danse entre autres Eleonore Didier. On sera d'autant plus attentif aux voyageurs d'ici qui nous feront en France cadeau de leur visite, telle Sofia Fitas  à Mains d'Oeuvres, il y a peu.

C'était Paraizo d'Olga Roriz  au Theatre Camoes de Lisbonne

Guy

Playlist : Rocio Jurado, Georges Gershwin, Nino Rota, Patsy Cline, Chavela Vargas, Dean martin, Pascale Comelade, Kurt Weil, Franck Sinatra, Edith Piaf, Ben Wester; Leonard Berstein, Boris Vian, Orquestra Universittaria de Tangos, Carmen Miranda, Marlène Dietrich, Rogers & Hart, Zca Afonso, Alejandro Dolina, Ana Carolina, Nancy Sinatra.

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