Le suicide est un acte essentiellement paradoxal. Dans 4.48 Psychose, Sarah Kane dit cela on ne peut mieux: "I have become so depressed by the fact of my mortality that I have decided to commit suicide."Elle mettra effectivement fin à ses jours en 1999 dans un hôpital. A l'âge de 28 ans. Les raisons du geste telles qu'exprimées par le personnage dans la piece ne pourront être jamais les bonnes- plutôt ce ne seront sans doute pas les vraies. Mais pourtant tout est là, avoué à vif, ressenti: en ce qu'il dit et ce qu'il ne dit pas, 4.48 est donc un classique immédiat et posthume. Qu'il est possible de massacrer à force de distance. Ou de porter à un niveau rare de beauté et de desespérance à force de crudité. Ici, et même avec gravité, la mise en scène fait jaillir au jour tout ce qu'il y a d'insolent, de vif, de drôle, d'amoureux dans le texte. C'est un choix intéressant, au coeur même des contradictions de cet appel à l'aide ou cet adieu vindicatif au médecin, au père, à l'amant, à Dieu. L'interprétation se fait à deux voix avec de précieux moments de silence où les corps se mettent en danger. Se livrent à quelque chose entre une danse de mort et une danse de séduction, une concession aux pulsions du sexe et de la vie. On en douterait de l'issue.
C'était 4.48 Psychose de Sarah Kane, mis en scène par Benjamin Tanguy, avec Jennifer Dapilly et Clémence Labatut, au Théatre des deux Rèves. Lundi et mardi encore.
Commentaires
Ce remerciement est oh combien troublant puisque nous avons réussi à toucher à l'endroit où nous voulions toucher.
Je ferai part à mes comédiennes de ces quelques mots reçus avec émotion.
Sincèrement merci.
Benjamin
Encore merci de mettre en scene Sarah Kane...et différement! (Et merci aussi au théatre de l'Etoile du Nord d'avoir laissé en vue quelques flyers de votre 4.48...)