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  • Tragedy Médée

    Ce "Médée Matériau" de Sophie Rousseau réussit son pari exactement là où "Europe, Tragedy" avait échoué. En s'essayant à la relecture d'un mythe, riche et complexe, en tentant de l'explorer en plusieurs entrées.

    Mais alors qu'"Europe Tragedy" perdait le public en route, avec une suite en mozaique, laborieuse et heurtée, d'une incohérente horizontalité, dans ce Médée Matériau nous est proposé un récit traité à différents niveaux, déclinés en simultané: parlés, joués, mimés, ou commentés de manière ironique et distanciée. En temps réel, et tout en profondeur de champ. En s'aidant d'une scénographie à surprises.

    Mise en pratique dés l'indispensable prologue: un narrateur nous démêle opportunément l'intrigue de la toison d'or et les origines du drame de Médée. Mais-surprise- façon stand-up avec de gros effets comiques: roulements d'yeux et accents appuyés. Dans le même temps et le même espace, deux actrices jouent l'évocation sanglante et frontale de l'infanticide. ce qui ne donne pas matière à rire, loin de là. Le ton est donné, décalé, tout en contre-pied, dans la force, la densité et l'ambiguité.

    Plus tard, la partition se fait encore plus riche et subtile. Médée déclame sa vengeance en une tirade tragique: raconte que sa rivale revêtira sa propre robe nuptiale, pour s'embraser. Contre-chants multiples: c'est Jason qui grimé enfile la dite robe, et derrière lui la fille du roi de miner à nu en échos les mêmes gestes, comme dans un parfait ensemble de ballet, tandis qu'en quatrième plan la nourrice maquillée en clown remet à distance ce tableau par un commentaire muet et parodique.

    Des quatre acteurs, jamais aucun ne reste passif, et en retrait. Chacun joue sa partie et qui semble s'imposer dés lors- comme l'on a rarement vu sur scène- et sans jamais gêner l'ensemble- ce qui nous semble plus rare encore.

    La phrase d'Henrich Müller est une matière lourde et pâteuse, que les interprètes doivent bien mâcher avant de nous la proposer. On en était un peu dégoûté, cette troupe là nous permet d'y retrouver goût et consistance.

    C'était hier soir, toujours au festival Trans, au Théâtre du Chaudron, et cela est repris jusqu'à dimanche prochain.

    Guy