Les spectateurs sont mis en condition, désorientés dès l’entrée, sans place assignée, appelés à une certaine participation… mais juste pour un temps avant de rentrer dans les rangs, là où parfois les acteurs feront irruption. En l’espèce le désordre créatif n’est que relatif. Ainsi de la remise en jeu du texte d’Heinrich von Kleist ? Comment écouter la voix de ce romantique allemand- une langue exaltée- et les charges furieuses de ses amazones revisitées au prisme de luttes féministes plus contemporaines? Du processus que l’on devine collectif accouche de la tension à défaut d'unité, avec des frictions créatrices, du corps et du rythme, de la nervosité. Un entre-deux à l’instar du dilemme post féministe de la reine Penthésilée, déchirée entre sa passion pour Achille- que souligne avec ironie des violons mélo hollywoodiens- et ses engagements (dans cette lecture) politiques. Tant mieux, de quoi se laisser emporter dans cette contradiction sans la résoudre, dans un champ de bataille indéterminé dessiné par une scénographie fébrile. Ça foisonne. Essais et erreurs: des morceaux de papiers collés sur la peau nue de Penthesilée, certain se greffent, d’autres tombent. Les considérations glaçantes sur la guérilla et la violence politique, je n’achète pas. Je préfère faire l’amour que la guerre. Méditer au rôle de la femme dans le monde de demain, des amazones à Mad Max 2015.
Le Projet Penthesilée d’après Heinrich von Kleist mis en scène par Catherine Boscowitz vu le 15 mai au théâtre des quartiers d'Ivry. Jusqu'au 31 mai.
Guy