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2 fois Nightshade: du strip sans tease

Les vetements tombent, Nightshade continue: quatre spectacles, quatre corps encore. Et oui, bien vu JD: la proposition de Claudia Triozzi, reproduit en plus court, et en modèle réduit, les procédés d'Up to Date. A moins que cette saynète, que vit déjà le Tadorne 41d49fe6a824eab279f0d6abc38d32bb.jpgà Marseille en janvier, ai été un brouillon de la plus longue pièce présentée en mai dernier aux RCIDSSD. Dans un cas ou dans l'autre, la chorégraphe semble utiliser le strip tease de ce soir comme un prétexte. Pour, plutôt que de profiter de la contrainte pour se remettre en question, tordre l'objet de force dans le sens de ses propres recherches... 

Sans y arriver: Cécilia Bengolea ne trouve pas sa place dans le trop plein visuel qu'autour d'elle accumule Claudia Triozzi. Lors d' Up to date l'oeil perdait la danseuse, escamotée, plusieurs minutes presque invisible, dans un labyrinthe de formes et de couleurs. En dix minutes ici, impossible d'installer de tels effets. D'accoutumer le spectateur à l'ambiguité, puis de dérouler une narration. La contradiction ne se résout pas, entre l'obscurcissement qui est ici entrepris, et le dévoilement plus net qu'exigerait le genre. Le contraste n'apparait pas, le corps au départ habillé n'est jamais bien défini en tant qu'enjeu, ses avatars ensuite nous laissent à distance, étrangers. Perdu dans tout ce foisonnement, l'apparition finale et lumineuse d'un cul rond et nu, est juste incongrue.

Pourtant la Halle de la Villette se dégèle peu à peu, et restent toujours trois numéros à dévoiler. Avant Cécilia Bengolea, s'était effeuillée Delphine Clairet. Mais qui a surtout beaucoup parlé, avec les mots de Vera Mantero.f45fcd5554349f0ee61ae250285e4b88.jpg Un commentaire bavard sur le strip tease, recherchant la connivence avec le spectateur, et c'est bien là où se situe le problème. Pour concilier dans le même espace-temps art et commentaire, il faudrait être aussi doué que Thierry Baé, le résultat est ce soir inévitablement aussi creux que la chose présentée par V.M. au Centre Pompidou l'automne dernier. Qu'elles soient entendues au premier, second ou trente-troisième degré, des inepties, enfilées comme des perles, restent des inepties. Pour ne prendre qu'un exemple, la supposée pudibonderie dont auraient été victimes nos ancêtres tient surtout du mythe qui a pour avantage de nous faire croire libérés nous mêmes. Il n'y a qu'à se souvenir de Zelda Fitzgerald plongeant à poil dans la fontaine de Washington Square durant les années 20 pour s'en persuader.

Mais l'escroquerie consiste surtout à laisser exister, par une mise en scène bouffonne, une distance comique par rapport à ce qui est dit. Le spectateur, confronté à cette absence d'engagement, ne sait si ce discours aux implications artistiques et sociales est soutenu ou dénoncé. La seule victime de ce procédé un peu lâche est l'interprète Delphine Clairet, renvoyée à l'archétype de la grosse rigolote, à la tête creuse et aux avantages généreux. Dommage, car tout le beau potentiel de la strip teaseuse burlesque n'est pas exploité. Quand même, sauvée du gâchis, une belle et triste minute de poésie, quand pour sacrifier ses derniers vêtements à la nudité, c'est sur sa peau même que l'interprète doit les laver.

Moralité: arrivé à ce stade, on a rien vu, malgré le nu. On a rien vu de nouveau en tout cas. Ou rien trouvé à comprendre. Peut être, pour arriver à nous surprendre un peu, aurait il fallu plutôt demander aux chorégraphes de se déshabiller, et aux strip teaseuses de leur expliquer comment procéder...

Mais déjà montent sur scène Caroline Lemaire- avec Alain Platel- et Sky van der Hoek-avec Caterina Sagna, qui promettent, quoiqu'il en coûte, de nous montrer enfin toute la vérité... demain.

C'était Cécilia Bengolea ♥♥♥  chorégraphiée par Claudia Triozzi. et Delphine Clairet ♥♥ sur un texte et une chorégraphie de Vera Mantero, dans le cadre de Nightshade, à la grande Halle de la Villette, jusqu'au 13 octobre.

Guy

Commentaires

  • Et que penser de Claudia Triozzi si, comme moi, on n'a pas vu "Up to date"? Utiliser le strip tease comme un pretexte, mais lequel? Je me sens tout d'un coup idiot et manipulé d'avoir aimé...
    Je deviens rouge...Que vient faire Thierry Bae dans cet histoire? Précisement, il utilise le commentaire contre l'art et c'est bien là son problème. Commentaire sévère sur Delphine Clairet, comme s'il n'y avait aucune poésie tout au long de son strip-tease. Ce n'est pas seulement "la grosse"qui se dévoile mais la marginale. Désolé, mais ce fut pour ma part une belle résonance.
    En un mot, j'ai comme l'impression d'avoiropérer un lacher-prise ce fameux soir d'hiver à Marseille. Je me suis finalement pas mal mis à nu...

  • Et moi je suis resté un peu coincé pour le moment...mais promis demain, avec la belle Caroline Lemaire, j'essaie de me lacher!
    C'est vrai que je me suis un peu énervé en repensant aux procédés de Vera Mantero. J'ai l'impression de me trouver plus confonté à une entreprise de manipulation qu'à un spectacle (je sais: la frontière est ténue). Loin de moi l'intention d'être sévère avec la belle Delphine, j'avais plutôt le sentiment que c'est Vera Mantero qui enfermait la strip teaseuse dans le personnage de la "grosse idiote". Mais si Delphine Clairet se lève pour déclarer qu'elle assume tout ce qu'elle dit, je me tais à jamais...
    Quant à Thierry Baé, le rapport un peu vague est qu'il réussissait à produire un commentaire/spectacle à mon sens plus subtil et faisant sens...Mais je sais que tu es d'un avis contraire, et je dois avouer être un peu en mal d'arguments....

  • Guy, merci pour cette réponse, à la hauteur, comme d'habitude. Caroline Lemaire va relier le tout, j'en suis sûr. Il faut quand même ajouter un élément non négligeable: depuis l'ouverture de mon blog, jamais un article n'aura été aussi lu et commenté. Ces strips teases touchent manifestement. N'y vois aucune allusion!

  • bonjour,
    je suis la grosse mise à nue dans le spectacle Belladonne et je suis un peu triste de lire ces lignes.
    pour eclaircir un peu ce que vous trouvez creux, sachez que moi meme et Vera avons co-ecrit ce texte et que oui je le revendique. je ne suis en aucun cas la "victime" de Vera mais ce texte et cette interpretation sont simplement une suite logique de mon travail en tant que stipteaseuse et performeuse burlesque(dans le sens grotesque du terme) et au sein de ma troupe The Kisses cause Trouble.
    pour ceux qui me connaisse, cette interpretation est toutà fait logique et me ressemble enormement.Nous souhaitions, sortir la strip teaseuse du silence et creer une piece drole, desolée que le fait que je sois grosse, est fait que vous doutiez du procédé. simplement nous n'avons pas pris cette direction parce que je suis grosse mais parce que je suis drole et cynique. desolée d'avoir semer le doute dans vos esprits parce que je suis egalement grosse....Mais je pose la question suivante mais pourquoi la grosse doit toujours etre la victime de quelque chose .... pourquoi ne pas la voir en tant que "guerriere" qui assume ses propos et sa position ......

  • Bonjour Delphine

    Loin de moi l’intention de vous attrister, et je n’ai aucun problème avec le fait que vous soyez grosse, s’il y avait quelque doute à ce sujet. J’ai même plutôt apprécié l’aspect visuel du spectacle, et toutes ses inventions.
    C’est le texte que je ne partageais pas, désolé. J’avais l’impression que ce texte vous cachait.
    Mais vous revendiquez en être le co-auteur, ce qui répond aux questions posées lors de mon échange avec Pascal Bely.
    Les choses sont dites, tant mieux. Quant à moi, comme promis alors, je me tais!

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