Au sol rôdent des félines toutes griffes dehors, qui jouent à faire peur sous les éclairs de néons. Il y a sept filles, deux garçons, donc ces derniers objets de sourdes convoitises. Et des duos amoureux, des disputes, des courses, des jeux de quatre coins, des réconciliations. Mais l'essentiel se joue en soli, dans les échappées verticales. Chacun à son tour a droit à son moment d'ascension.
L'acrobatie est alors la danse faite impossible. Sans emphase ni dramatisation, tout en fluidité et révêrie, cette succession d'évasions réussit à ne presque jamais lasser. Ambiances: les rêves se balancent aux échos d'un soprano, deux flutistes charment des femmes-cordes: une évocation elliptique d'Indes exotiques. Legers, legers comme l'imaginaire, les bras tendus font lignes avec le fil, l'équilibre prend des apparences désinvoltes de facilité. La verticalité est libérée. Enivrée par les accords d'une guitare poisseuse, une vamp en guépière et manteau fait se dresser droit un mat chinois. Au son de carrillons de minuit des désirs inexprimés flottent entre deux airs, entravés de cordes, et se laissent retomber, comme par abandons. Vu par ceux qui, lampe au poing, veillent d'en bas: des fantômes. Au sol une femme en robe de dentelle regarde et danse avec une feinte maladresse. C'est un vilain petit canard qui fait le lien entre nous et eux.
Qui font leurs preuves, comme pour une épreuve d'initation, se rassemblent enfin pour le grand saut. Et assemblent une machinale infernale pour être projetés à travers le portail, vers le rêve ou la vie.
C'était La Part du Loup, mis en piste et chorégraphié par Fatou Traoré avec les étudiants de la 19e promotion de l’Ecole nationale supérieure des arts du cirque (Ensac), à l'espace chapiteaux du parc de la Villette. Avec Paris Quartier d'été.
Jusqu'au 16 Aout.
photo par Nicolas Guichard avec l'aimable autorisation de Paris quartier d'été