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gens d'uterpan

  • Qui crâne?

    Les créations de cette compagnie me posent problème, tant elles me semblent jouer en creux avec les attentes et les réactions du public. Au détriment du fond, de l'affirmation? Ces propositions (provocations?) m'inspirent prolixité, scepticisme, ou emportements polémiques, c'est selon. L'accent étant tant mis sur la relation, risquée et tenue, que le contenu souvent s'évacue, me laisse avec la peur du vide. X-event 0 pousse jusqu'à un point extrême ce déséquilibre. Mais pour le coup ce n'est pas le cas ici, pour un projet on ne peut plus lisible. Le point d'arrivée est d'avance annoncé: la reproduction en corps d'un motif de tête de mort, une vivante vanité (dont on peut considérer les inspirations avec des lunettes rouges). 

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    Pas de surprise possible: au mur une video témoigne de la prise d'une photo identique, la cible. Mais c'est la manière complexe et imprévisible dont les danseurs vont parvenir jusqu'à cette image-cible qui constitue la performance en tant que telle, et tout autant nos efforts de spectateurs pour trouver une lisibilité à leurs actions. Dans ce sens l'expérience est ouverte. Le terrain de représentation est constitué d'une salle entière d'exposition, le public en demi cercle, plus ou moins. D'autres spectateurs au balcon. Les sept danseurs tendent à s'échapper du centre, et déborder les espaces d'observations, nous incitant à nous déplacer à notre tour. Ils bougent de temps en temps de quelques mêtres, vers l'immobilité, de stations en stations. Ils s'allongent alors, dans de telles positions, qu'on pourrait croire qu'ils se relaxent ou s'échauffent plutôt qu'ils ne commencent la performance. Il faut avoir la photo du crane en tête pour comprendre que chacun des sept compose déja l'un des élements de cette construction, mais pour le moment séparés. Le public est silencieux, discret, ne se déplace pas vraiment. Il y règne ici plus de recueillement que dans une église pour un enterrement. Le lieu d'art contemporain est blanc comme la mort, dépouillé. Au mur, ou dans la salle, des œuvres raréfiées. Qui passent au second plan derrière les mouvements vivants. Les danseurs sont vétus d'abord, de sportwears colorés. Puis dans un ordre dispersé ôtent et remettent bas et hauts. Leurs déshabillages et rhabillages mesurés font basculer l'entreprise et ses enjeux du coté de l'économie de l'érotisme. D'autant que le nu est attendu, annoncé par la vidéo. Pour s'agencer en un symbole funêbre, c'est la promesse d'une riche opposition. Je ne sais si elle sera tenue. Et les corps en jeu sont jeunes et beaux, filles et garçons. Des corps non désirants pourtant, froids, non agissants, utilisés, ramenés à l'état de matériaux sans cesse ré-agencés dans la construction du tout. Leurs regards absents. Dans cet espace blanc, des signes. Mais que je peine à déchiffrer, de plein pied avec les danseurs. Un mur sépare partiellement la salle en deux, empêche à partir d'un même poste d'observation de tous à la fois les considérer. Est-ce une occasion perdue pour méditer? Mon attention se fixe de moins en moins sur leurs déplacements, se lasse de cette poursuite, je me hasarde à la mezzanine, à la recherche d'un point de vue d'ensemble, plus vertical. Cela me permet distinguer d'en haut les figures, qui tendent plus ou moins vers un agencement. D'ici c'est plus intéressant, organique en sens, ces formes se font et défont, entropiquement, et sans donner le sentiment d'une intention. Plutôt d'obéir à des lois physiques. Il y a à entendre une rythmique sous- jacente, qui berce ces allers-retours, ces répétitions. Mais je m'en lasse aussi, redescends. Pour alors constater qu'une forme est enfin constituée, l'état stable, rassemblé.

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    Sauf que l'image est d'ici intelligible, voire le déclencheur d'interprétations incongrues: une orgie pétrifiée? Des figures animales rassemblées pour se réchauffer? Un charnier? A l'horizontal il n'y a que des nudités et des détails immanimés. Avec retard, je devine le crane sous les chairs. Pour le saisir, je retourne au balcon. Trop tard, les danseurs se dispersent déja, comme repoussés les uns les autres par des forces magnétiques. Seuls.

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    L'image funêbre s'est décomposé. Il ne subsiste que le fantôme de la forme, dans le vide autour de la danseuse du milieu. Gisante. La dissolution ne se produit pas d'un coup, progressivement, les élements survivent un peu, les corps peu à peu rhabillés, de retour vers le quotidien, l'activité. Pour se disperser parmi les spectateurs. C'est un retournement inattendu du symbole. La sensation me faisant toujours un peu défaut, pas déprimé pour autant, ni convaincu de la vacuité de l'existence, je cherche le sens. La morale de cette vanité. Je ne sais si cet art est mort ou vivant.

     C'était piece en sept morceaux, des gens d'Uterpan, au centre d'art contemporain de Bretigny 

    Guy

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    C''était X-event 0 de Annie Vigier/ Franck Apertet- Les Gens d'Uterpan, à Micadanse, avec le festival Faits d'Hiver

    Guy

    photos: merci à Jérome Delatour

  • Les Gens d'Uterpan: nudité manifeste

    Sans le mouvement la nudité n’est rien. Dénuée de valeur, de signification. Mais dansée, la nudité peut devenir beaucoup plus intéressante. Elle prend sens. En faire la démonstration était sûrement superflu: merci aux Gens d’Uterpande s’y être attaqué.

    Arrivent sur scène dix jeunes gens des deux sexes.

    Nus. Ce qui en soi vaut quelques instants d’intense intérêt. Ces corps se portent élégants, et presque discrets. Plus sexy que sexuels. Avec des proportions prudentes, qui restent dans les normes d'une beauté rassurante. Beaux, sans aucun excès qui ne puisse provoquer ni étonner vraiment. L'attitude des danseurs, dégagée, indifférente, contribue à cette impression.

    Une marche commence, sur la stricte ligne diagonale de la scène, autour de laquelle se sont répartis, empressés et debouts, les spectateurs, expulsés des gradins. Parvenu au bout de la ligne, le groupe fait volte face pour effectuer le parcours inverse. Et arrivés à l’autre extrémité de la diagonale, ils se retournent à nouveau. Et ainsi de suite. Ils défilent ensemble, d’un pas rapide, sur cet axe invisible, dans les deux sens. Jusque là c’est neutre, plat, évidemment sans intérêt. La nudité, déshabillée de toute mise en scène, fait long feu. Desérotisée. Pétard mouillé? On craint d'assister à une vaine performance de plus, aux vagues intentions. Coté assistance: intérêt indéniable, mais peut-être un amusement déja blasé. Chair trop vite donnée en pâture? Offerte pour rien?

    Mais peu à peu, pas après pas, le phénomène devient autre. Le groupe ne change rien à la vitesse de sa marche, ce sont des mouvements à l’intérieur du groupe qui émergent: ondulations, déhanchements, flexions, tournoiements. D’abord marginalement. Mais à un moment indéterminé, la danse s'est installée pour de bon. Dans cette déambulation d’ensemble qui se poursuit, vive et sans pause. Toujours la même trajectoire collective, mais désormais sous-composée des brèves figures des dix danseurs et danseuses nus, multitude de mouvements qui bientôt se parlent entre eux. La musique est basique, une seule phrase courte, qui se répète, dont seul l’arrangement change.

    Des spectateurs s’enhardissent pour investir, debout encore, serrés, les derniers espaces libres sur le coté mur de la scène. Encerclement. Les gestes des danseurs prennent plus de dimension, d’ampleur, de signification, jusqu’à ce que le point de sensualité soit franchi franchement. Jamais celui de la vulgarité cependant, malgré toutes les postures qui pourraient la faire naître. Est-ce une question de graduation? Ou de naturel? On observe et on retrouve des réminiscences du X-event 1, vu il y a déjà un an ou deux, qui attaquait la même thématique par la face spectacle. Pièce plus explicite sexuellement de par les gestes pratiqués, et en contrepartie plus habillée, plus proche par sa construction et sa scénographie d’une pièce de danse. De même ici les gestes s'adressent à l'autre, les regards chavirent, les hanches se balancent, les corps se détendent et se cambrent plus nettement, on se frôle, puis on se touche brièvement, on se regarde langoureusement. Tout cela sans jamais arrêter de marcher ensemble. Les danseurs miment le désir, l’extase n’est pas loin.

    L'extase vient. Ou se fait représenter. Sans qu'il n'y ait eu, physiquement, de rencontres. Plaisirs complices mais solitaires? Solidaires? Ou une rencontre a t elle été suggérée sans être représentée? Climax évident quoiqu'il en soit, mais sans ostentation. Suspens. Le groupe se referme sur lui-même, en cercle. Se protégeant. Complicité, respirations, murmures. Les danseurs, toujours nus, vont se perdre ensemble quelques minutes dans le couloir devant la salle. Puis ils reviennent sur scène et recommencent. Sur la même diagonale. D’abord lentement et tout droit. Mais, encore tièdes, déjà plusieurs degrés à dessus du premier point initial. Et on devine qu'inévitablement ils vont monter en puissance. Condamnés- pour notre trouble ou notre distraction?- à la répétition, à un éternel cycle de montée de l’excitation, puis de plaisir? Le public de plus en plus est assis, déborde un peu sur la frontière du tapis blanc, plus proche de la trajectoire du groupe. Arrivés à l’extrémité de leur course, les danseurs empiètent sur la place des spectateurs assis là, mais qui restent comme invisibles pour eux, dansent nus autour, au dessus d’eux. Interpénétration des espaces intimes de jeu et d’observation. Coté des observateurs, légers réflexes de recul et de protection.

    La musique se répète, entêtante. Toujours le même thème. Tous les spectateurs sont assis sur les bords de la scène maintenant. Publics très mélangés, jeunes, vieux, hommes, femmes, groupes, couples, solitaires. Certains chuchotent entre eux, comme pour bien maîtriser la situation, en regardant les danseurs. Qui entament leur quatrième ou cinquième cycle. Chaque cycle quelques degrés au dessus du précédent, au moins que cela soit notre perception qui change. Il fait chaud. Deux spectatrices- pourtant à l’air très sage- se retrouvent mystérieusement en sous-vêtements. José Alfarroba et l’équipe d’Arthanthé, eux tous décemment habillés, distribuent des coussins. Les danseurs marchent ensemble, toujours enfermés dans l’exécution du même scénario. La répétition de messages corporels de séduction qu’ils s’adressent les uns aux autres dans d’infinies combinaisons. Filles vers les garçons, ou filles et filles, ou garçons entre eux. Tous à égalité. Jamais aucune manifestation d'agressivité sexuelle. Quelques secondes à peine à chaque fois tendues vers un partenaire, avant que le mouvement lascif sans jamais s’interrompre, ne se reporte vers le suivant. Un spectateur aux cheveux longs, qui semble bien parti, danse dans son coin comme à Woodstock, yeux fermés, avec de grands gestes. Les mêmes gestes que les artistes, mais en beaucoup moins bien.

    On distribue du punch. Dés la première gorgée, la température semble monter un peu. Mouvement perpétuel. Les danseurs ont atteint la phase de paroxysme d’un nouveau cycle, et il semble que cette fois les bras se balancent plus haut, que les fesses partent en arrière, et les hanches en avant d’une manière encore plus franche. Sans qu’ils ne s'ouvrent à l'impudicité, bizarrement. Ils semblent s'abandonner par instant au jeu de cette transe, jusqu'à presque tomber, comme par micro pertes de conscience. Entre eux toujours des expressions gourmandes, désirante. Érotisme utopique, révé. Quelques discussions à mi-voix dans l’assistance. Des spectateurs partent au bar et reviennent. D'autres ne reviendront pas. On regarde, et bien qu’aucun indice ne nous ait été donné permettant de situer cette danse dans un contexte ou un autre, on pense à un défilé dionysiaque. Une bacchanale, une saturnale. Un sabbat de sorciers peut-être? Non c'est une fausse piste: ici nulle culpabilité apparente, ni jouissance de la transgression. Une expression du plaisir, simplement.

    Encore du punch. A un moment ou un autre, les deux filles contre le mur ont décidé de se passer de soutiens-gorge. Elles discutent, l’air de rien, avec leurs voisins. Mais ne dansent pas. Sont très réelles. Gardent leurs lunettes. Tout le monde les a remarquées, mais fait semblant- juste un sourire ou deux-, les regards évitent pudiquement leurs poitrines pour se reporter sans embarras aucun sur les seins des danseuses sur scène. Qui continuent à marcher sur l’invariable diagonale et tournoient toujours plus intensément. Leurs corps, après bientôt deux heures d’effort, ont pris la rougeur et le rendu émouvant que généralement l’amour laisse. Oubliée la froide neutralité du début. Les yeux sont mouillés. Les détails se font précis par instant, au grain de peau près, mais c’est toujours le mouvement général qui finalement s’impose à la perception. Mais aussi verges et bourses qui se balancent. Et gros plan, l’instant d’un généreux renversement, sur une vulve, presque un blason de l'innocence. Répétition. Surchauffe. Aux limites supérieures du crescendo. Pas difficile de comprendre que la montée de la fatigue- jusqu’à l’épuisement ?- participe de la stratégie du spectacle. De part et d'autre. Trois heures de performance, selon le programme. Vont-ils répéter les mêmes cycles jusqu’à la fin? Mais peut il y avoir une fin? On aimerait qu’ils s’arrêtent parfois à mi-course avant de reprendre. Ou juste ralentissent, un instant. On réalise que tous les regards, tous les gestes des performeurs se sont échangés à l’intérieur du groupe, jamais vers l’assistance, toujours tenue à l'extérieur, ignorée, même quand les danseurs viennent à sa rencontre, au centimètre près. Est-ce dans les intentions des chorégraphes d’inviter l’assistance à prendre congé, mais comme clandestinement- sur une situation inachevée? Un jeu d’usure? L’assistance s’est en fait clairsemée de moitié, ceux qui restent sont plutôt affalés. Fulgurante beauté d’un corps en torsion, appréhendé dans son ensemble, avant qu’il ne se redresse. Raidissement, détente.

    Légère ivresse. On regarde un peu les deux filles toujours en petite culotte, qui elles-mêmes regardent les danseuses et danseurs nus: laquelle des deux nudités banalise l'autre? En tous cas les danseurs ne se regardent qu'entre eux. Mais on croit reconnaître dans le public une danseuse de buto, qui commente, technique et amusée, les figures avec de grands gestes de la main. On devine qu'elle perçoit des choses que l'on ne pourrait voir nous même. Mais qui nous regarde? Restons habillé! Nouvelle tournée de punch- d'une nouvelle couleur?- et amuse-gueules. Olives vertes. On est fatigué, les corps se brouillent un peu. Mystère de l'être et de l'essence, dont la mise à nu ne dévoile rien, mystères au delà de la peau. Détails. Mouvements. On essaye de compter les danseurs et les danseuses. Pas moyen. Ils bougent tout le temps. On essaie en triant par sexe. Cela fonctionne mieux. Répétition. Chaleur. On est bien. Juste incrédule par moments. Les Gens d’Uterpan marchent toujours, semblent chacun fragiles et invulnérables ensemble, épuisés mais infatigables. Ailleurs, complètement. Comme vraiment possédés.

    Un spectateur se lève pour se camper au centre de la scène, et se laisse traverser par cette nuée de nudités l’air béat et la tête légèrement inclinée en arrière. Comme dans un bain de vapeurs sensuelles. Avant qu'on ne le ramène gentiment se rasseoir. Cette danse fait elle perdre la raison? Les danseurs autour de lui n’ont même pas ralenti. Intangibles. Des anges de rêves et de chairs. Toujours assises, un poil crispées, les deux spectatrices enlèvent le bas… Il est temps de rentrer.

    C’était X-Event 2.1 , des Gens d'Uterpan(Annie Vigier-Franck Apertet) au Vanves Théâtre, toujours avec Artdanthé.

    Guy