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  • Territoires vierges

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    (Nou) touche au sexe, là rien d’original, mais touche aussi les sexes, ce qui est plus troublant. Un tabou pas tant titillé que celà, mais on peut, c.q.f.d. . S'ouvre alors un territoire quasi-vierge à explorer en ce qui concerne la danse. Il s’agit ici d’inventer une chorégraphie des zones érogènes. A l’œuvre bouches, seins, fesses, sexes et langues, avec ces outils le langage se cherche, en évitant des procédés excitatoires  trop usés, en se refusant pas la drôlerie. Avec comme vocabulaire la démultiplication des possibilités des corps des danseurs- masculins, féminins et trans-genre- et comme intention de brouiller les rôles traditionnellement assignés. Cette intention était déjà à l’œuvre dans Bonnes nouvelles du même chorégraphe. Dans cette entreprise, la performance tend à glisser vers l’énumération de ses audaces. Le sexe peut aveugler, ou la lumière s’y engouffrer mais pour disparaître, comme littéralement montré en début de spectacle. Mais merci pour cette prise de risque. Ce qui est en tout cas démontré, s’il en était encore besoin, c’est que le théâtre de Vanves sait ne rien s’interdire, c’est tant mieux. Merci José pour tant de passion, d’intelligence et de détermination depuis 17 Artdanthés, et bon anniversaire!

    (nou) teaser from CIE À CONTRE POIL DU SENS on Vimeo.

    (Nou) de Matthieu Hocquemiller vu le 27 janvier au Théâtre de Vanves avec le festival Artdanthé.

    Guy

    lire aussi: bonnes nouvelles et J'arrive plus à mourir

    photo de Alexis Lautier avec l'aimable autorisation du théâtre de Vanves.

  • Lectures oubliées

    Sans surprise, il y a au début plus de mondanités que de Modiano. La Maire de Paris et le Directeur de Théâtre viennent se montrer à la lumière du prix Nobel, s’échanger des discours comme autant de congratulations. Seul Modiano tout à l'heure aura la grande modestie de nous remercier d’être venu. Les considérations d’Olivier Poivre d’Arvor quant à la maladresse sociale de l’écrivain sonnent malvenues, ce dernier pris en otage devant nous se débat par gestes embarrassés. Quelle manie des chroniqueurs de toujours vouloir réduire et ironiser! Patrick Modiano bien sûr y survit, ainsi qu’à l’attentat perpétué par Catherine Deneuve qui bafouille et débite à grande vitesse les pages de Dora Bruder comme si elle était payée au nombre de caractères. Samy Frey heureusement nous rend le texte, non sans d’abord se l’être approprié. Ces lectures sont toujours pour moi une épreuve, il n’y a rien de visuel à quoi se raccrocher.  Ici c’est même un bras de fer, le lecteur m’impose la lenteur, jusqu’à venir à bout de mon impatience. Il me donne l’illusion que lui-même à l’instar de l’écrivain cherche mots et pensées. Il permet à mon imagination de s’engouffrer dans ses silences, et met en évidence le point de vue d’où Modiano écrit: de loin, plus tard, d’ailleurs. Il nous plonge dans l’indéfini des souvenirs. Et montre la distance irréductible entre les sensations et la substance. Depuis 20 ans j’avais un peu oublié Modiano, je me rends compte à l'écouter pourquoi: il s’agit de flou, d'une mémoire impossible. Le texte tourne autour des évènements et des personnages sans vraiment jamais les atteindre, comme autour des lieux de Paris, où « les temps deviennent transparents les uns aux autres ». Depuis toujours je vis à Paris, Modiano me rassure en me montrant que je peux encore m’y perdre. Mais m’inquiète en évoquant un temps où en raison de ses origines il fallait renoncer à son identité. Le plaisir ce soir consiste aussi à rencontrer l’écrivain. Qui, candide, remercie Samy Frey de l’avoir aidé à comprendre son propre texte. Mais il semble s’y perdre encore, être saisi de doutes. Cet homme qui lance les phrases comme des bateaux qui disparaissent sans retour dans les vagues de ses hésitations, est magnifique dans sa sincérité et son inaptitude à la communication dans le sens de publicité. Seul face à cette foule qui dans un silence respectueux l’écoute dériver, il n’a rien à démontrer, mais n’a pas peur de chercher devant nous. Il nous permet à nous mêmes de douter.

    Lectures de Dora Bruder, Dans le café de la jeunesse perdue, Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier (éditions Gallimard) de Patrick Modiano par Samy Frey et Catherine Deneuve en présence de l’auteur au Théâtre de la Ville. Le 20 janvier, diffusion sur Radio France fin février.

    Guy

  • Nuit noire

    L’histoire s’écrit. L’histoire se danse aussi. Ici à chaud: il y a moins de trois mois que le Président Blaise Compaoré a été renversé par la rue, au pays des hommes intègres. L’amie que je retrouve ce soir au Tarmac connait bien le Burkina Fasso, et partage son émotion devant le spectacle. La pièce de Serge Aimé Coulibaly était depuis longtemps en gestation, mais sa délivrance a eu lieu juste après la révolution. Elle m’y plonge. Depuis les prémisses, avec ce danseur bâillonné qui éructe au micro, ensuite au cœur des événements. Par touches. Comme autant de rencontres au coin des rues,  lors d’une nuit électrique, des rencontres cocasses ou inquiétantes, des scènes d’amour, de liesse ou de violence.  Je reçois une belle singularité dans cette danse- européenne ou africaine, moderne ou contemporaine… je ne pourrais pas la caractériser- qui me montre des corps saisis par l’urgence, en effusion. Le rappeur et musicien Smockey, co-auteur et acteur du spectacle, est aussi un acteur de ces évènements.  Il catalyse et nomme ce que la danse pourrait pourtant juste laisser imaginer. Ses derniers mots-il suffit de 1 000 euros pour changer le monde, le prix d’un fusil d’assaut- résonnent cruellement. L’impression de confusion et de foisonnement domine, mais cette même confusion qu’on peut ressentir au cœur de la foule-et pour moi dans un pays étranger, sans recul face à ce qu’il se passe, à ce qu’il restera. L’amie mieux renseignée que moi me parle ensuite des espoirs et des incertitudes politiques de demain, de cette révolution, qui aura besoin de temps pour trouver sa forme.

    NuitBlancheàOuaga316HD©PierreVanEechaute.jpg

     

     

     

    Guy

    Nuit blanche à Ouagadougou de Serge Aimé Coulibaly au Tarmac avec le festival faits d’hiver.

     Photo de Pierre Van Eechaute avec l'aimable autorisation du Tarmac

  • En couleurs

    Le lendemain soir de ce mercredi noir, l’affect  s’engourdit, sidéré, les pensées ruminées. Difficile de faire page blanche et de s’ouvrir à d’autres imaginaires. Mais la danseuse est en noir elle aussi, debout. Elle s’agite de bas en haut, et grimace, prise d’irrépressibles convulsions, comme possédée. Le diable au corps. Mon état s’incarne en ses mouvements, elle m’aide à me purger des humeurs morbides et pensées en impasse. C’est un passage. Devant elle, alignés au sol, des vêtements de toutes les couleurs, qui m’évoquent de mystérieux folklores. Un par un elle les ramasse, danse, s’en pare. Elle se charge de signes et traditions. Le corps disparait jusqu’au visage voilé sous les étoffes mais tourne à n’en plus finir, toujours vivante. Elle semble la prêtresse de nouvelles mythologies, un ange multicolore, à elle seule le monde entier. Pour réconcilier en son corps toutes les civilisations, pacifiées la barbarie loin derrière. Quand elle cesse et repose, glisse et renait hors des tissus, au terme de cette cérémonie, il n’y a plus qu’une humanité. Le noir laisse la place à l’apaisement. La pièce s’intitule « Blanc », vient du Brésil, née d’interrogations sur la rencontre des cultures blanches, noires, indiennes. Aujourd’hui après le deuil, c’est une cure de couleurs.

     

    Blanc Teaser from vania vaneau on Vimeo.

     

    Blanc de Vania Vaneau, vu le 8 janvier au festival Open Space à l’Etoile du Nord

    Guy

  • 7 janvier 2015

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