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Equus: mais qui a donc déshabillé Harry?

Au moment des saluts une petite dizaine de teenager trés rousses, échappées à la surveillance de leurs parents avec cinquante £ en poche, bondissent sur leurs petits pieds pour applaudir et crier des bravos à leur jeune héros, vu ce soir de plus prêt que jamais revé. La femme de notre vie fait preuve de plus de retenue...

medium_acdgequusaffiche.jpgSi on avait eu le choix, qu'aurait on pu voir d'autre ce soir, de l'autre coté de l'Eurostar, sur la scène londonienne? Sur la face visible, celle du West End, s'affichent en trés grand et clignotant: The Lion King, Stomp, The Little Shop of Horrors, Evita, Boeing-Boeing, Chicago, Porgy and Bess, Cabaret, Marry Poppins, Les Misérables, The Phantom of the Opera- quand même The Tempestde Shakespeare (avec Patrick Stewart, ressucité de X-men 3)-, The Glass Menagerie aussi, et Equus, par Peter Shaffer avec Daniel Radcliffe... Soit, à plus ou moins 70%, les mêmes "musicals" que ceux donnés en ce moment sur Broadway. Est ce à dire qu'il n'y aurait à voir (hors des perles si discretes que l'on a pas eu le temps de les trouver) que des blockbuster efficaces? 

Pas si simple, car cet Equusressemble beaucoup à du théâtre contemporain. On pourrait imaginer de voir ça au Theâtre de la Ville ou à l'Odéon. Avec des codes familiers: de l'argument morbide- la confrontation entre un psy en crise et un ado qui vient de crever les yeux à 6 chevaux- aux choix scéniques trés noir et blanc-elliptiques, en finissant par le nu tragique. Du contemporain bien grisonnant quand même: Shaffer a écrit sa pièce il y a plus de 30 ans, et c'est John Napier, scénographe à la création en 1973 qui s'y colle à nouveau. Et coté visuel rien à redire, tout est beau à voir et surtout les masques des chevaux du titre, qui interprétés par des danseurs, s'animent magnifiquement. 

Mais pour le reste, c'est un peu raide et statique. Lesté par un texte psychologisant lourd, du Tenesse Williams au ralenti: adolescence-perte de sens-Dieu-souffrance-psy angoissés- impuissance-et chevaux indomptables, mais on entend déja certains insinuer que quelques subtilités du texte anglais nous auraient échappées. Le jeune Daniel Radcliffe, jouant apre et révolté, se tire quand même la tête haute de quelques situations à risques. Mais évidemment, d'autres auraient fait aussi bien. Le remplaçant de Daniel Griffiths, titulaire du rôle principal, et ce soir làmedium_equus_bw1.2.jpg indisposé, se contente lui de lire le texte plus ou moins bien.

Mais parlons du scandale, quand même. Pas que l'on(?) fasse jouer, à l'interprète de qui-vous-savez-au-cinema agé de 17 ans, une scène de nu, qui plus est une scène d'amour avec sa partenaire. C'était d'ailleurs spécifié dans les didascalies, et puis après tout il tenait à faire du théâtre.

Non l'horrible vérité, c'est qu'il fume un clope sur scène.

C'était Equus de Peter Shaffer, mis en scène par Thea Sharrock, mis en décors et costumes par John Napier, avec Daniel Radcliffe et sans Daniel Griffiths, au John Gielgud Theatre(London, UK)

Guy

Plus haut: affiche et photo de presse présenté sur le site Equus 

Commentaires

  • Il se trouve que par un curieux hasard j'ai également assisté à cette représentation d'Equus, et je voudrais justement me faufiler dans les interstices des subtilités d'une langue qui me reste malgré tout étrangère pour parler des différences subtiles entre votre pièce et la mienne.
    Un peu comme vous, à l'énoncé de l'argument, je me suis tassée sur mon siège, craignant les grosses caisses et les cuivres des dérives répressives de la société et de l'exposé complaisant du puissant foyer de névroses du cercle familial tellement vus et rebattus. Mais c'était sans compter la foncière liberté intelletuelle anglosaxone.
    Loin de toute lourdeur didactique, on assiste, fasciné à l'élaboration envers et contre toutes interactions, à la conception du monde par un cerveau fêlé. Du discours du monde et de ses structures, il ne semble percevoir que les arrêtes ou des fragments qu'il intègre avec une fabuleuse puissance créatrice à sa propre poétique. Isolé dans un monde illisible, comme le furent sans doute les premiers hommes, il recrée pour lui seul tout un mythe fondateur pour s'y inscrire. Et le coeur de la pièce est là, au centre des ténèbres primitives de l'homme. Cet adolescent retrouve les vieux mythes païens et leur puissance. A genou devant où communiant avec un homme cheval, dérangeant centaure au visage de christ. Au point de contact impossible avec le réel, il dénouera ses impuissances, à l'image de nos ancètres, par un acte barbare terrifiant. Sa puissance vitale originelle renvoie le monde contingent qui s'exprime ici par le psy, la justice, le parents et l'autre, à leurs propres impuissances d'hommes civilisés pâlis, affadis, domestiqués, qui voient vaciller leurs point d'ancrage sur le monde.
    Le monologue de la mère, du père et du psy sont impeccables et inédits. Et je vous trouve bien injuste pour Daniel Radcliffe. Etes-vous si sûr que n'importe qui d'autre aurait pu jouer avec cette violence retenue, parfois lâchée, cette énergie, cette intériorité, cette puissance qui laisse courir à fleur de peau une vulnérabilité enfantine désarmante.
    La mise en scène est bluffante. Et quel bonheur qu'une histoire donnée à voir sans qu'on vous fasse la morale.
    si j'ai rêvé ma pièce dans les 25% d'anglais qui m'a échappé, tant mieux, c'est qu'Orson Welles avait raison et qu'on apprécie bien une pièce que dans une langue étrangère.
    i.

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