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mime

  • Plus ou moins l'infini: la ligne claire

    Flagrante rupture avec l'attitude narcissique, emphatique, sacrificielle, frontale, impudique, à laquelle nous habituent les danseurs. Les artistes circassiens ici s'effacent modestement au profit du geste, pour que celui ci soit simple, efficace, évident, absolu. Droit, net comme les lignes, qui tracent la direction de la pièce. Le corps n'est qu'un moyen du spectacle, en concours avec accessoires et lumières, et non plus son sujet central. Ce n'est pas un hasard si la pièce débute et s'achève en l'absence d'artistes sur scène, sur la mise en mouvements de simples tubes de métal, combinés en figures géométriques qu'animent les lumières. Troublante personnalisation de l'abstrait, tant le mouvement suffit à imposer l'idée de la vie. Les artistes prennent leur place quand même, d'abord une main, puis une tête qu'un corps sans tête poursuit. Les visages restent absents presque, pas des personnages vraiment, juste de fragiles silhouettes. Au service de l'image. Au même plan dramatique que perches, bâtons et ballons. On pense à la puissance expressive, de "La Linéa" ou celle de certains des dessins les plus épurés de Moebius. Attitudes raides, costumes strict comme ceux des musiciens de Krafwerkt, humour et stylisation géométrique.

    Poursuite des lignes de la nostalgie vers le futurisme : malgré le modernisme et les clins d'oeil aux cultures populaires de l'ère moderne -Star Wars, Atari, Space Invaders jusqu'à Matrix-, malgré les mises en situation de personnages confrontés à leurs propres images, réduites à l'essentiel numérique, pour des parties de jeux sur écran, malgré ces mises en abîmes qui- ne serait ce le traitement burlesque- pourraient évoquer le trouble d'une violence banalisée/virtualisée, le cauchemar de rapports humains anesthésiés en 2D, on pense à l'esprit du cinéma muet. En voyant ces acrobates qui progressent à contre courant sur les lignes mouvantes, qui accrochés à leur perche resistent au vertical contre la gravité, sans témoigner de la moindre indignation, sans effort apparent, sans trahir d'émotion. On pense, inévitablement à Buster Keaton, l'immortelle incarnation de la dignité humaine confronté à l'adversité. Le Buster Keaton de Steamboat Junior, fétu de paille au coeur du cyclone, mais frayant son chemin obstiné, chute après chute, contre les élements. Une calme et résolue révolte, d'un absolu géométrique, corps contre lignes, grain de sable, le propre du genre humain.

    C'était Plus ou moins l'infini , conçu et scénographie par Aurelien Bory-Compagnie 111, mis en scène par Phil Soltanoff, au theatre de la Ville.Sur invitation de BNP Paribas, ce qui démontre que le spectacle vivant sait parfois chercher l'argent là ou il est.

    Guy

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  • Yumi Fujitani: Kao V2.2

    "Ce n'était même pas du buto", protestait à la sortie une dame, d'ailleurs d'un certain âge. "Sur l'affiche vous avez écrit BUTO, mais ça n'était pas du tout du buto". Quand même une révélation: il existe donc un public de buto, un vrai public d'habitués, un public assez intransigeant pour s'indigner si on ne lui donne pas son content de peinture blanche, de reptation, de danse lente, douloureuse et près du sol, d'équilibre sur le coccyx et le bas des reins, de corps japonais, et d'animisme trés stylisé.

    Mais Yumi Fujitani d'évidence se soucie peu de défendre quelque territoire que ce soit. Elle a bien raison. Et tente plutôt d'en explorer de nouveaux. Le territoire visité ce soir est brillamment destructuré par un rideau d'image video et des nappes medium_buto-avril07-web-1_1_.jpgde musique. Champs de ruines colorées. Y errent trois hagardes, desocialisées, infantiles, capuches sur les yeux et bouches bées. Une image de l'enfer, se risque ma voisine, néophyte mais qui va à l'essentiel. Il est en tout cas ici question de perte d'identité, de folie, de mort et de renaissance. Perte des repères sociaux. Vulnérabilité d'êtres qui se découvrent et se reconstruisent, sans protection, à vue. Des préoccupations au coeur des danses buto, mais ici développées avec d'autres moyens aussi: mime, théâtre de geste. Avec plus de sophistication et d'humour à froid dans l'usage des symboles, et l'évocation de la sexualité. Avec puissance et étrangeté. Avec un même sens de la profondeur et de l'étirement du temps, ce à quoi en danse on est habitué, mais qui sur un mode neo théâtral déconcerte. Et sur trois interprètes, deux sont plutôt comédiennes, seule la troisième-Celine Angèle- danseuse mais qui ici ne danse qu'en creux, très épisodiquement, intense mais contenue. Tout cela aurait il surpris autant, dansé? En fond de scène un tas de chiffon: Yumi Fujitani à y regarder de plus prêt. Qui s'animera peu à peu mais toujours en retrait de l'action. Pour s'extirper très lentement des chiffons. Pas assez lentement pour rassurer la gardienne de l'orthodoxie dont on parlait au tout début? Nos 3 invités en tous cas, semblaient plutôt heureux d'être étonnés.

    En tout cas, c'était Kao (Visage)- Kagami (Miroir) m.e.s par Yumi Fujitani et Mido Omura, d'aprés Kao-Chaos crée par Yumi Fujitani, et vu l'an dernier, avec Elise Henault, Céline Angèle, Sibylle Jounot et Yumi Fujitani, video de Wilfried Wending et musique d'Andrée Serre-Milan. au Proscenium.

    Kao  continue jusqu'à samedi, et revient dés lundi la semaine prochaine encore recré, avec cette fois Gyohei Zaitzu, Maki Watanabe, Bino Sauitzvy, et Claude Parleà l'accordéon.

    Guy

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    P.S. du 21 avril: on se sent moins seul, JD est venu interroger Kao des yeux. A lire sur Images de Danse toutes affaires cessantes.