Cécile Volange travaille à la chaine, Madame Merteuil dirige l'usine. "Je suis une force de travail", dit l'ouvrière... Dans une pièce "politique", les personnages se reduisent-ils que des concepts distanciés? Par leur voix le texte pose lourds les enjeux, texte cadencé comme le bruit lancinant de la chaine de montage de Volange, texte martelé en redites. Mais les mots imposés d'ailleurs se perdent, restent les corps dépossédés, leurs contradictions et leurs troubles, ici incarnés avec un bel engagement. Ce qui m'intéresse ici, ce n'est pas tant l'économique dénoncé- rendements et délocalisation- que l'exposition des rapports inévitables et invisibles entre travail et intime. Avec rigueur et cruauté, la pièce porte les "rôles" professionnels jusqu'aux points d'exacerbation du pouvoir et du désir. Les références aux liaisons dangereuses prennent alors tout leur sens. La scénographie froide campe l'espace personnel et familial de Volange comme un champ de gravas et ruines. Comme les autres personnages réduits par cette aliénation à leurs mécanismes, elle offre sa dévotion comme ses gestes et son corps à l'usine.
Erwin Motors, Devotion de Magalie Mougel mis en scène par Maxime Contrepois, vu à la Loge le 26 avril 2016
Guy