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françois chaignaud

  • Self & others: Cecilia, Alain, François, Matthieu, Hanna et les autres...

    C'est foutraque et déroutant. Chacun des quatre danseurs à son tour a son moment, et tous à la fin rassemblés pour un défilé fait de bric et de broc (qui n'est pas sans évoquer dans le détournement celui de parades & changes). Oui: la succession de ces numéros agace jusqu'à la fascination. Mais cette dispersion est sans doute consubstantielle au projet, d'autoportraits. Ceux ci d'autant plus détournés que floutés derrière le voile qui sépare salle et scène. Ces personnages sont surtout ce qu'ils font. Se définissent par ce avec quoi ils jouent: des matériaux déglingués et disparates: musicaux, gestuels, textuel, scéniques... Les résultats ne sont pas tristes. Et les portraits surprenant, irrévérencieux, provocateurs forcement, allusifs, comme pour travestir d'inavouables aveux.

    C'est donc gonflé, toujours au bord d'être gonflant. Mais l'esthétique fait le liant, une touche Buffard dans le tout et dans les petits riens. A savoir, à travers ces errances dans un décor de lendemain de fête: des postures de dandy décadent, un pessimisme drôle et pudique, jusque même dans l'exhibitionnisme. Tous semblent en sursis. Mais tenus par une cohérence souterraine, un mouvement qui nous fait aimer ici ce qu'on rejetait chez Laâbissi. François Chaignaud ouvre les festivités en faune écossais, préside une veillée aux bougies comme un Barry Lydon du pauvre, prodigue des fellations et d'autres outrages à des poupées barbie. Il fait son effet, entonnant une chanson libertine d'une voix de tête et tête en bas. Toutes bornes dépassées, on sait où on se situe. Cecilia Bengolea s'engouffre dans la brèche, et s'enfourne des petits chevaux dans le décolleté et dans des culottes gigognes, crie "vanité", entame un dialogue- qui semble furieusement extrait d'un film français des années 70- avec Hanna Hedman. Qui blanchit sa peau noire de pâte à pain en lisant Marx, tandis que Cecilia se noircit. Mathieu Doze se fait désirer en statue et rentre tard dans le jeu, hiératique. Tout ce qu’on tente de décrire ne constituant qu'un échantillon des actions vues ce contexte, dans une ambiance à la fois bordélique et empreinte de préciosité. Avec nombre de références, et des saillies surréalistes pince sans rire, on est plus prêt de Bunuel que de Dali. Ou de Copi. Les excentriques finissent par se rassembler, en un drôle d'équipage, pour un boléro de gargouillis qui mène droit au fou rire, un défilé en rideaux de douche ou cuvette de chiottes, et un hommage final à Michael Jackson. Paradoxe: ce sont dans ces efforts collectifs, assez éloignés du thème du départ, que l'on goûte au plus jubilatoire du projet.

    C'était Self & Others, d'Alain Buffard, avec Cecilia Bengolea, Mattthieu Doze, Francois Chaignaud, Hanna Hedman. Dans le cadre du festival innacoutumés, à la ménagerie de verre.

    Guy

    Lire aussi Libération, Spectateur turbulent, paris-art, Le beau vice. Et plus tard, le Tadorne.

    Pas de photos pour le moment, peut être un peu plus tard.

     

  • Cecilia Bengolea et François Chaignaud : montrer.

    Peut on essayer d’oublier tout ce qu’avant on a lu à propos de Pâquerette, toutes attentes tues, curiosité remise à neuf?

     

    pâquerette par Alain monot.jpg

     

    Cecilia Bengolea et François Chaignaud doivent être satisfaits du buzz, et de la salle pleine à craquer. Avertis des risques aussi. Déjà présents sur la scène à notre arrivée, ils désamorcent. Familiers, chuchotent entre eux sourire aux lèvres, lancent un clin d’œil aux copines du premier rang. Parés de robes chatoyantes, elle yeux de biche, lui blond angélique, les genres sexuels convergent.
     

    Quand les deux danseurs glissent enfin dans le jeu, c’est par délicates suggestions: yeux vagues, râles étouffés, expressions de doigts de pied. Ces manifestations finissent vite par déraper, en sifflements de cocotte minute, interactions nerveuses et tremblements pâmés. Déjà on ne peut plus feindre d’ignorer ce que l’on sait: on sait qu’ils savent qu’on sait ce qui les tend. L’obscène- à la lettre- est hors de vue. La performance se concentre dans cette connivence. Avec des sensations sans sensationnalisme: le public est bon enfant, quelques rires réprimés. C’est joyeux et libérateur. Le spectacle pourrait tout autant se refermer sur cette première partie, homogène et bien maîtrisée, symptômes en pleine lumière et causes occultées.

     

    Puis les robes tombent, et les enjeux se déplacent.

    On savait: maintenant on voit. Constat immédiat : ils sont mignons, pas scandaleux. On consacre un instant à apprécier l’audace de la démarche: aucune raison que la danse s'interdise de telles explorations. L’instant suivant on admet que montrer c’est dédramatiser. Voire desérotiser. Par cette simple démonstration le projet se justifie. La suite, c’est de la danse. Sous contrainte: les deux danseurs s’efforcent de conserver inchangée leur relation avec les objets, quitte à ce que l’équilibrisme fasse passer au second plan l'expression du plaisir. C’est une danse honnête, à tous points de vues, d’une poésie fraîche. Qui n'ouvre pas sur de grandes révélations, chacun jugera selon ses attentes. Ils sont beaux et fragiles, généreux et drôles, des statues nues dans un jardin d’hiver, avec quelque chose en plus.

    Mais après Pâquerette, que peuvent ils bien faire ? Sans doute tout autre chose…

     

    C'était Pâquerette, de et avec Cecilia Bengolea et François Chaignaud, dans le cadre du festival innacoutumés à la Ménagerie de Verre.

     

    A lire: le Tadorne, et bientôt Images de danse.

    Et un point de vue moraliste, dans Le Monde.

     

    Guy

     

    photo par Alain Monot, avec l'aimable autorisation de la Ménagerie de Verre.

     

    Paquerette fleurit au Dansoir mercredi 4 fevrier, et à Ardanthé le vendredi 20 fevrier