Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

grimm

  • Blanche Neige: Le cas Barker

    Est elle jumelle de la reine Gertrude, cette (méchante?) reine de Blanche Neige?

    blanche N 79.jpg

     

    Un même goût pour les belles chaussures, une même quarantaine prête à s'exhiber, les mêmes manifestations d'un appétit sexuel, que ni roi ni bûcheron ni princes étrangers- père et fils- ne semblent pouvoir rassasier, la même fertilité inopinée... Mais cette reine de Grimm règne d'une séduction très glacée. Le pouvoir de la frigidité? Habillée robe bleu turquoise, démarche sophistiquée-qui évoque celle l'extra terrestre choucroutée du film de Tim Burton. On la verrait plutôt comme une obsédée du contrôle absolu, contrôle d'elle-même en objet figé et parfait, contrôle par cris supposés feints des mâles alentour. Où est-elle elle-même dépassée, victime? On ne sait, mais le résultat pétrifie: la fixité de son regard est l'aimant autour duquel se polarise la pièce. Les miroirs s'en brisent d'effroi.

    Soumise son attraction, ténanisée jusqu'au rire nerveux: Blanche Neige. En robe rouge primaire, avec autant de mal à exister qu'Hamlet. Et bien du mal à rivaliser en féminité, s'offre nue mais en vain au bûcheron. Une seule option: la fugue. Faire les 400 coups avec sept étrangers dans la forêt. La surenchère mimétique a ses limites: le jeune ventre se refuse à s'arrondir. Quant aux hommes, ils paraissent dérisoires confrontés aux forces et rivalités féminines. Le roi aussi éperdu comme Claudius ne sait réagir que par pleurs et supplices. Les apparences du pouvoir sont à ce prix. Tous succombaient autour de Gertrude, ici pour que Blanche Neige puisse grandir, il faut que la reine accepte de mourir. Plus ou moins métaphoriquement...vieillir tout au moins? Ou danser chaussures chauffées à blanc aux pieds, punie par où elle a péchée? Il faut souffrir pour être belle...

    blanche N 58.jpg

     

    Les personnages de Barker, débarqués des mythes, s'efforcent à haute voix de se définir, étonnés d'y parvenir par bribes. Tout le reste, tout ce qu'on vient ou ce que l'on pourrait écrire n'est que suppositions. Le théâtre de Barker ne se soucie ni de morale ni d'explicite. Il pose sans supposer, nous laisse juste ressentir que le monde est aussi cruel et bouleversé de luttes souterraines que tel il le dessine. Il faut toute l'élégance de la mise en scène de Maragnani pour garder un peu à distance cette cruauté, par lignes claires et contrastes colorés, avec un jeu acidulé, aussi grinçant que le crissement des talons sur le gravier. Un peu froid, pince-sans-rire et admirablement contrôlé.

    C'était Le Cas Blanche Neige (comment le savoir vient aux filles) d'Howard Barker, mis en scène par Frédéric Maragnani au Théatre de l'Odéon-salle Berthier.

    Guy 

    photos par Frédéric Démesure avec l'aimable autorisation du théatre de l'Odéon

    A voir aussi: les photos d'Agathe Poupeney

  • La jeune Fille, le diable et le moulin: le théatre résilient de Py

    Olivier Py fait du théatre pour les enfants comme on devrait le faire systématiquement: avec autant de respect que s'agissant de théatre destiné aux adultes. Ce qui implique, pour commencer, de ne rien cacher aux jeunes spectateurs de la cruauté du monde. Donc ne rien édulcorer de la violence des contes de Grimm: ici le meunier, abusé par le diable, coupe de sa hache les mains de sa fille.

    7.jpg

    Sans ne jamais laisser tout à fait oublier qu'il s'agit d'une représentation: la belle scènographie se montre comme telle, avec des miroirs, des décors tournants, des trétaux, et des centaines d'ampoules. Dans la voix des acteurs le recit est autant conté que joué. Chanté souvent, avec les couleurs de complainte des cuivres et de l'accordeon. Le diable entonne" Que la guerre est jolie", les enfants, qui ne sont pas idiots, ne sont pas dupes non plus. L'art: "c'est de dire d'un mot la mort avec la joie". Un ange gardien veille sur la fille du meunier, surtout l'espoir la porte. Pour qu'à la fin chaque chose revienne à sa place- au théatre même les mains peuvent repousser- pour montrer aux enfants que la violence qui est montrée et dite, peut être surmontée.

    21[1].jpg

    C'était La jeune Fille, le diable et le moulin d'aprés les frères Grimm, adapté et mis en scène par Olivier Py, musique de Stéphane Leach, décor, costume et maquilllages de Pierre André Weitz. Avec Celine Chéénne, Samuel Churin, Sylvie Magand, Thomas Matalou, Antoine Philippot, Benjamin Ritter.

    A l'Odeon (Ateliers Berthier), jusqu'au 18 janvier, en alternance avec 2 autres contes. A partir de 7 ans.

    Guy

    Photos d'Alain Fonteray avec l'aimable autorisation du théatre de l'Odéon