Et si le meilleur de Bertolt Brecht (1898-1956), c'était Kurt Weil? Même si Baal (1919) montré ici est une oeuvre de jeunesse, avant l'Opéra de Quatre Sous.Mais ici déjà, ou rajoutés après, beaucoup de chansons tristes, des complaintes de cabaret que Kurt Weilaurait pu composer, style spreech-gesang décadent, des histoires de filles perdues mais pieuses et de marins.
Mais qui est Baal? Cela serait trop long, trop fastidieux à expliquer. Disons seulement que sur scène il y avait une douzaine d'acteurs, et deux musiciens, un dispositif scénique impressionnant: à gauche de la scène, enchevêtrés, un bistrot et son comptoir, une chambre, un grand mur tagé- pas celui de Berlin-, une cabine téléphonique, un piano, une batterie, une baignoire, un lit, un banc public, un salle à manger, à droite un grand espace vide où errer, bref beaucoup de moyens et de budget pour du théâtre social. Mais un théâtre- de quelle couleur, celui là ?- qui a le bon goût ce soir de ne pas trop se prendre au sérieux, le jeune Bertolt n'était pas encore devenu tout à fait Brecht en 1919, et le metteur en scène - Sylvain CREUZEVAULT- a refusé de prendre en compte les versions postérieures de la pièce.
Il reste aujourd'hui de l'essai un peu incohérent- juxtaposition de scènes- juste ce qu'il fautd'outrance, de provocation-tant pis pour le premier rang-, de grincements, de sauvagerie, de confusion, de grotesque et de débraillé. On rit beaucoup, potentiellement, enfin pour peu qu'on puisse en juger au vu d'une première partie seulement (non pas qu'on se soit vraiment ennuyé, mais trois heures et demi c'était beaucoup trop long, biologiquement, et il y a a nouveau demain Moeno).
A voir encore beaucoup de soirs au Theatre de l'Odeon - Ateliers Berthier. Pas la vraie salle dans le quartier de l'Odéon mais l'atelier réformé, boulevard Berthier. C'est à dire la salle où le théâtre de l'Odéon s'était réfugié les années quand l'Odéon- le vrai- était en travaux. Et qu'ils n'ont pas voulu ou osé fermer quand l'Odéon a rouvert à nouveau. On en parle, c'est Baal au Festival d'Automneet c'est plein à craquer, évidemment.
Guy
Commentaires
Dommage d'avoir manqué la seconde partie !
En effet, la première partie est intéressante pendant la première demie heure... après malheuresement, les jeux d'acteurs se répètent, et la pièce en perd son côté attractif : amusant et surprenant.
Au contraire, la seconde partie intègre pas mal de nouveautés et dépasse la première.
Décor : à gauche le chaos bourgeois - à droite le néant.
Pour ce qui est de la pièce elle-même, le texte est magnifique, une double aspiration vers un ciel violaçé ou noir, et vers le néant (mais sans religion, contrairement au baroque). L'homme se détache de toutes contraintes sociales, bafouant mêmes les règles les plus élémentaires. Un déchaînement de passions incontrolé qui pourrait nous faire voir à travers Baal le jeune Bertolt.
Cette pièce accompagnera Brecht tout au long de sa vie, et dans le personnage de Baal, ne faut-il pas voir la vie d'un artiste, ou plus précisément de l'artiste qu'est Bertolt à 19 ans, tuant le temps entre les cafés et les bordels ?
Le jeu des acteurs bien que parfois répétitif est très bon, ces derniers s'intègrent parfaitement dans la peau des personnage, et ont un formidable talent d'improvisation. Il faut aussi remarquer la beauté des chants, ou du moins des musiciens.
Bref une pièce provoquante, faite pour provoquer et qui a tout de même réussie à faire fuir quelques spectateurs en pleine représentation.