Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

  • Le réel et le reste

    Damien Chardonnet-Darmaillacq  (on écrira D.C.D.) débriefe sur le plateau de  Bla Bla Bla ou Approche latérale des paradigmes discursifs à caractère persuasifs ou promotionnels (on écrira Bla Bla Bla) son expérience de collaborateur de Ségolène Royal. Forcement un bel effet d’annonce- c’est la saison- qui attire sur Bla Bla Bla l’attention  de l’A.F.P., du Point, du Figaro….  Une telle exposition médiatique est hors normes en matière de danse, performance ou théâtre contemporain dans un festival émergeant. Mais celui qui viendrait ce soir pour les confidences ou le sensationnel repartirait déçu. Ni règlement de compte, ni déballage, tout juste quelques piques, moins dirigées vers la candidate de 2007 que vers le milieu des politiques en général: mesquineries, bassesses et baronneries.

    danse,théatre,performance,segolène royal,indiscpline,garance dor,damine chardonnet darmaillacq

    Il s’agit plutôt ce soir de la chronique d’un désenchantement. Là où les choses commencent à m’intéresser c’est que cette désillusion politique, qui mène D.C.D. jusqu’à la démission de ses fonction n’est pas vraiment dite. Du moins elle n’est pas expliquée. D.C.D. ,sur le ton posé et poli du gendre parfait sorti de sciences- po, dans un français impeccable et littéraire, enchaîne les anecdotes de campagne en France profonde et les réflexions désabusées, mais en ne s’attaquant jamais vraiment  lui-même au pourquoi, ni au cœur du sujet. Stratégie ou pudeur, son réel, son vécu, se décode dans ce que l’on voit à coté. Dans le télescopage des actions des performeurs sur la scène. Avec un homme politique (Yvonnick Muller), plus que convaincant en costume de circonstance et en charge du discours générique. Des argumentaires saturés de vides assurés et d’arguments interchangeables. Tout dans la pose et dans le ton. A en rire et pleurer, et dans le même temps l'émetteur est assez convaincant dans la communication analogique pour qu’on se surprenne avec des pulsions pavloviennes de se précipiter aux urnes.  

      danse,théatre,performance,segolène royal,indiscpline,garance dor,damine chardonnet darmaillacq

    Dans une surenchère du rêve et de la P.N.L. , une démonstratrice de télé achat en robe rouge moulante nous vante dans le même temps un mixer jusqu’à l’orgasme. Une danseuse muette et masquée tente de calculer le dénominateur commun de leurs gestes, un gars travesti s’improvise première dame. Confronté à ces juxtapositions fécondes-même si tout ne me semble pas toujours raccord- j’en oublie vite le seul cas Ségolène. La réflexion s’élargit. Ce documentaire imaginaire est heureusement participatif, la profusion de niveaux nous remue plutôt que de vouloir démontrer. C'est loufoque le plus souvent, plus grave possiblement. Que les discours soient vrais ou non, il devient difficile de les distinguer. Avec les mêmes effets populistes qu'au début Y.M. nous délivre un très beau speech en v.o. d'Obama. Comme dans le vrai, la forme emporte le fond dans la confusion, vers l’impossibilité de l’engagement, même si D.C.D. ne tranche lui-même pas vraiment. Peut-on rester pur dans l’action ? C’est vieux comme l’homme, à vos stylos ! Le thème d’Indisciplines est  cette année « changer le monde ? » Ce soir la réponse est plutôt non, et bien dans l’air du temps. Si la question était : « peut-on représenter le réel autrement », la question serait « oui » évidemment.

    danse,théatre,performance,segolène royal,indiscpline,garance dor,damine chardonnet darmaillacq

     

    C’est à une autre Reconstitution que nous invite Garance Dor. A celle d’une performance passée, à Artdanthé. Bien évidemment la carte n’est pas le territoire, et la reconstitution n’est pas la représentation. Elle n'est pas non plus le réel vraiment, j’y réfléchirais en relisant le texte de Roland Barthes (et à propos de France Gall) distribué pour l’occasion. Quoiqu’il en soit la reconstitution se déroule insaisissable avec un sens aigu de l’ellipse, sans temps mort malgré le parti pris de ne pas asséner de temps fort, et un humour léger, léger, dans le bon sens du terme. Nous sommes invités, si cela est par principe possible, à reproduire nous aussi la performance qui a du avoir lieu l’an dernier (mais alors avec de faux volontaires). Nous écoutons la version abrégée de l’abécédaire vécu de la vie des artistes, mise en perspective de leur condition, avec la conviction soudaine que tout est vrai. Tout cela pour ne pas dire vraiment le sujet de la performance à l'origine, nous sommes gentiment décontenancés, mais est ce important ? Prolongement de cette logique particulière: des vrais ( ?) volontaires sont invités à accomplir des actions impossibles qui en deviennent poétiques, c’est la tentative qui nous émeut. A la fin on éteint le lapin et on boit un verre, assez heureux.

    C'était  Bla Bla Bla ou Approche latérale des paradigmDamien Chardonnet-Darmaillacq  

     

    es discursifs à caractère persuasifs ou promotionnels de

    et Reconstitution de Garance Dor

    vu au festival Indiscplines, proposé par Sabrina Weldman  et présenté auDansoir jusqu'au 11 février. 

    Guy 

    photos par Elise Colette avec l'aimable autorisation de D.C.D.

    photo de Samantha Gil avec l'aimable autorisation de Garance Dor

     

  • Reves, abandon

    Elles titubent sous l'ivresse, en abandon ou en proie à la folie, au bord de basculer derrière la frontière. Les verres renversés, du Bataille sans le texte. Elles sombrent très loin du réel, dans les limbes, possédées, peut-être perdues dans les rêves cruels de quelqu'un d'autre. Magnifiées en images archétypales, des éclats de souvenirs défilent. Blondeur hollywoodienne et irréelle, panoplies fantasmagoriques: cuir serré et rock 'n roll ou noir endeuillé qui contraste avec le rouge sang, ou blancheur immaculée. 

    photo DIRTY1.jpg

    Les bruits inquiètent. Les mouvements éperdus suggèrent des images troublées, d'un érotisme mortifère. Au rythme d'une attente engourdie ou de gestes saccadés, de poses offertes. Fatalité. Tombées au champ du désir elles gisent. Dans les décombres du réel, des poupées démantibulées, leurs regards brulés. L'homme revient, manipule ces formes inanimées, se perd à son tour dans ce vertige, se travestit. La clé inavouée se trouve peut être dans une volonté de perte absolue de contrôle.

    Me revient ensuite un autre rêve d'il y a quelques mois, tout aussi morbide, plus blanc et plus cru. Vue à l’œuvre une volonté de mort dans une danse à rebours, au son d'orages électriques. Une guitare au vernis fatigué installe des boucles saturées, des feed-back et effets, de graves litanies. La femme, elle mortelle, forcement héroïque, ponctue le sol de coups de talon, se tend en arrière dans l’excès, tombe à terre, poitrine soulevée et succombe. Cramée. Victime peut-être, tout aussi volontaire. Elle devient objet, abdiquée, trainée sans ménagement, soulevée, tremblée, tourne sans fin. Livré plus qu'aux regards. Abandonnée au désir? L’homme a un masque de bête. Elle aussi. Soulevée dans les airs, elle plane comme un ange mort, il y a des éclairs, une volonté de non vie, un terrible abandon dans la violence là aussi.

    C’était Dirty d’Isabelle Catalan-compagnie Azar, vu au Panopée dans le cadre du festival Artdanthé et Requiem de Magali Milian & Romuald Luydllin- La Zampa vu en avant première en novembre 2010 à la Ferme du Buisson

    photo par Olivier Séror avec l'aimable autorisation d'Isabelle Catalan

  • Des regrets: un réseau translucide

    L'effet d'annonce rivalise ce soir avec celui atteint par l'image des musiciens en armes de "Ne pas toucher aux oeuvres". Il s'agit pour le coup de la première performance chorégraphique qui soit énergiquement auto-suffisante: "le corps et le mouvement sont des producteurs d’énergie qui agissent dans la faisabilité du spectacle : ainsi, lumière et son sont produits par l’énergie des danseurs, qui n’est plus une dépense mais une production concrète". C'est à peu près tout ce qui est dit du projet, assez pour beaucoup promettre autour d'un vrai thême. Je me souviens sans en atendre l'équivalent, dans un autre genre, de l'intègre performance des décroissants australiens d'Acrobat. J'attends tout logiquement que la forme ce soir rejoigne le fond, non pas par un discours ou une démonstration, mais avec des correspondances, des évocations. J'ai soif comme d'une circularité. Je me place donc à l'affût du sens, en cohérence. Las, il y a bien, fonctionnellement, un velo actionné à tour de rôle pour alimenter le réseau, mais le reste s'aventure ailleurs. Je ne sais où. Suivre les mouvements pour y retrouver le sujet annoncé me masque la danse. Mal engagé, je manque l'occasion de m'y intéresser juste pour ce qu'elle est. Je dépense en vain mon attention, egaré par les déambulations des interprêtes à travers un labyrinthe de macarons, il me semble que l'energie s'y disperse, irrémédiablement...Je ne lirai plus les programmes!

    C'était un réseau translucide de Prue Lang, présenté à Micadanses, dans le cadre du festival Faits d'Hiver.

    Guy

  • Quand j'entends le mot culture,...

    Colt python 357 Magnum, carabine a bascule à air comprimé Gamo, Glock 17, Beretta 75 auto KWV, Kalashnikov AK 47, Smith and Wesson 45, alarme portable Prévenson, Taser TW11, bombes lacrymogènes, pistolets jouets à amorce et à bouchon, Sophie la girafe (?), rubboards, plaques tonnerres, sifflets de police, appeaux d'oiseaux, corne de brumes... ce sont quelques-uns parmi la trentaine d'instruments non conventionnels et plutôt menaçants maniés par les musiciens de la création chorégraphique de Geisha Fontaine et Pierre Cottreau, Ne pas toucher aux oeuvres.

    NPTAO_1.jpg

    Pour autant, personne ne peut être vraiment surpris: programmes et dossiers de presse annoncent la couleur. La stratégie d'annonce et de promotion de l'oeuvre met en avant des visuels intrigants et explicites sur ce point: les musiciens mettront en joue autant qu'en jeu les danseurs. Le teasing est efficace, le sujet annoncé fort, et du coup les attentes de beaucoup de spectateurs d'ors et déja aiguisées vers une politisation de l'exposé, vers de potentielles allégories de la situation précaire des artistes dans un environnement hostile...

    Qu'est il fait de ces attentes? La seule que je me suis moi-même autorisée à s'exprimer n'est pas déçue: la pièce-même si l'idée de départ est un peu déflorée par le teasing- dépasse en originalité d'approche et créativité la grande majorité de ce qu'on peut voir sur scène. C'était déja le cas avec Une Piece Mécanique,et les deux propositions ont aussi ceci en commun de remettre en question l'acte de danser: les interprêtes y sont chaque fois placés dans des situations incertaines. Hier contraints de retrouver leur place au milieu des robots en mouvement, ce soir confrontés à des musiciens armés. La danse chaque fois non seulement y survit, mais s'adapte et s'y développe de manière innattendue, par des correspondances inédites avec les composantes du contexte.

    NPTAO_4.jpg

    En commençant par déjouer les attentes trop évidentes. Si les quatre musiciens prennent place d'abord, occupent le terrain martialement, ce sont ensuite les cinq danseurs-parmi lesquels je reconnait Sophie Demeyer- qui commandent de leur gestes les premieres mesures de la musique. Le rapport conventionnel musique/danse ainsi inversé, aussi le rapport persecuteurs/victimes auxquel on aurait pu s'attendre. Tout évoluera de manière ambigue et surprenante, de ces interactions visuelles et sonores entre les deux camps en présence. Oppositions vestimentaires également, entre les musiciens habillés stricts et les danseurs en jean et T-shirt, inversion ponctuelles des rôles par mise en mouvement des musiciens ou appropriation de percussions par les danseurs. On devine, suggérées avec humour à froid, des stratégies complexes, sacrifices offerts et provocations, actions et réactions, regards lourds de sens, rapports de force, toujours incertains et souvent renversés, de suggestion, violence seduction, manipulation...

    Si ce plaisir interprétatif est intellectuel, j'en goute un autre plus esthétique et sensuel, celui liée à la pure musique. Celle-ci est bien sur essentiellement percussive, se joue des contraintes du choix des instruments, garde puissance et expressivité, sur un registre qui s'étend du claquement discret aux détonations plus franches. Toutes les cartouches ne sont pas grillées dés le début, des surprises réservées jusqu'à la fin dans l'utilisation des objets. Les musiciens devant leurs partitions, veillent avec leurs armes à l'exécution de l'oeuvre musicale autant que celle des danseurs. Ou est ce un effet dramatique de mise en scène, cette précision représentée avec beaucoup d'ostensation pour nous faire imaginer par opposition la fiction d'une danse plus libre, laissée à l'initiative de de corps qui ruseraient et s'affirmeraient par rapport à ce cadre rigide? En revanche mon intérêt se laisse distraire aux moments où la musique laisse du répit et la danse livrée à elle-même, moments me paraissant vagues et répétitifs, d'enlevage de vêtements. et ré-habillages. Un troisième niveau m'échappe, mais sans doute sans dommages: de savantes références, musicales et chorégraphiques. Pour moi la jubilation l'emporte pourtant, même si je commets l'erreur de discuter immédiatement à la sortie avec d'autres spectateurs plus réservés, et déçus dans leur attentes, qui auraient préféré une oeuvre plus affirmée dans sa signification. Je dois leur concéder que malgré les armes manipulées ce soir il y a plus de bruit que de danger. Nous avons été prudemment avertis de nous boucher les oreilles si nécéssaire, et aucun spectateur n'a été bléssé durant le spectacle.

    C'était Ne pas toucher aux oeuvres.Geisha Fontaine et Pierre Cottreau, création musicale de Francesco Filidei, à l' Auditorium Saint Germain, en ouverture du festival Faits d'hiver.

    Guy

    Lire aussi: Danzine

    photo (Pierre Cottreau) avant l'aimable autorisation de la compagnie)

  • La douleur et la mémoire

    Ce sang ne sèche jamais vraiment, le sang des victimes des occupants nazi et de leurs complices. Les noms des otages et résistants sont arrachés ce soir à l’oubli en une furieuse litanie, d’une voix rageuse, sans merci. Les feuilles de papier tombent à terre au fur et à mesure de la lecture, mais les images persistent, des crimes et des supplices, intolérables, obsédants. Pas de place ici pour la distance, encore moins pour l’élégance. A prendre comme un bloc, l’engagement total de Nadège Prugnard, qui se heurte à l’indicible, yeux endeuillés de noir, qui crie et pleure ce texte et cette révolte sans reprendre son souffle. Les mots s’abiment et souffrent comme les corps humiliés sous les coups, évoquent les larmes, la sueur, la merde, la terre, la peur, haissent et demandent justice, et aiment comme l’amour éperdu, sans retour, des amants arrachés l'un à l'autre par l’Histoire. L’expérience du spectateur n’est ce soir pas plaisante, la performance salutairement excessive, à rendre bien d’autres propositions dérisoires. Faudrait-il oublier tout cela comme de l’histoire ancienne, noyée dans l’inflation des génocides? Ou se souvenir encore ces crimes, toujours imprescriptibles, refuser la banalisation, déjà à l’œuvre quand un ancien fonctionnaire chargé des question juives siégeait au gouvernement de la France dans les années 70, quand l’un des organisateurs de la rafle du vel’d’hiv’ avait dans les années 80 ses entrées à l’Elysée, alors, qu’il n’y a pas si longtemps, le leader d’un parti politique français jugeait que l’occupation allemande n’avait pas été particulièrement inhumaine.

    C'était Suzanne takes you down de et par Nadège Prugnard, au Lavoir Moderne Parisien.

    Guy

  • Bon appétit!

    texte initialement mis en ligne le 7 octobre 2010: Une Raclette est servie à nouveau au Théatre de Vanves du 11 au 13 janvier.

    Bien sur qu'on peut rire de tout (et, avant tout, de soi-même), c'est pourtant trop rare devant une piéce contemporaine. Mais surprise: ici cela fonctionne, d'autant que la forme n'est pas dupe d'elle-même et relativise ses propres prétentions dés le prologue (cela devient alors surement du théatre méta-contemporain).

    Visuel Une raclette.jpg

    On craint durant un laps de temps un entre-soi trop étroit, trop catégoriel, lorsque dans la salle comble commence l'appel des spectateurs pour vérifier si on peut commencer la piéce: Mélanie Chéreau (présente), Thibaud Croisy (présent), etc... C'est juste une concession clin d'oeil et factice à la participation du public (et peut-être seulement pour le soir de la première: tout fait si improvisé...), et le grand sujet est bientôt mis sur la table: la bétise. Alors c'est grand, c'est beau, et c'est universel (Ont-ils relu, de Flaubert, le dictionnaire des idées reçues?). Avant tout trés drôle, bien ammené (dommage, j'aurais sinon titré "Indigeste!"). Tellement universel, ce traité de la vacuité, qu'on se voit soi-même sur scène en tics, à enfiler des perles, tel en gros plan le beauf qui en nous sommeille, attablé comme à un repas entre voisins ou plus ou moins pôtes, bien digéré dans cette Raclette. Nous dinons avec eux, par délégation. Une amie était à la sortie décue de ne pas trouver cela assez "politique": voire... La férocité semble se nourrir de la tradition du café théatre, et la dépasse allégrement par échappées soudaines tous azimuth que se permettent  ces sales gosses jusque-boutistes. Ca fuse et ça pétille et tombe souvent juste, entre un beau babil intelligible, et blancs idiots, et rires sociaux. Surtout tout est possible, le rêve libéré, finalement dépassées les intentions brocardées au début. Malgré ou grâce aux ratés, plans de partouze un peu forcés, et sorties de route, la piece est portée par l'inattendu (spoiler:qui aurait prévu d'assister au viol de la maitresse de maison par une carotte géante? fin du spoiler) et une suite d'autres moments aussi surprenants et poétiques, mais n'allons pas tout deflorer... Et il y a ces moments, pas forcement les plus exubérants, où soudain la réalité bascule et se fige dans le silence ou dans l'absurde, comme la matérialisation objective de ces instants où tout en assistant à l'evenement social on sombre trés profond et sans retour dans ses pensées. Samedi nous recevons des amis pour diner: est ce encore possible?

    C'était Une Raclette des Chiens de Navarre mis en scène par mise en scène par Jean Christophe Meurisse au théatre de Vanves pour l'ouverture de la saison théatre d'Artdanthé. 

    Encore ce vendredi et ce samedi.

    Guy

    lire aussi Neige au théatre

    photo (©Balthazar Maisch) avec l'aimable autorisation de la compagnie

  • Effeuillées

    On voudrait croire encore pouvoir assister ici à quelque chose d'interdit et de dangereux, voire louche, même sulfureux... quand le rouge règne dès l'entrée alors que des créatures se balancent langoureusement dans les alcoves. Mais ce mystère là vite s'évapore, avec le public c'est plutôt la complicité que la provocation qui s'installe, le strip tease définitivement bien apprivoisé, qui d'ailleurs maintenant s'enseigne à l'Ecole Supérieure de Burlesque, même à Micadances, sûrement demain dans toutes les assoc' culturelles entre un cours de tricot et un cours de tango. Tandis que les filles palmées de Tournée font salle comble au T.C.I., que Celine Milliat rechauffe toujours les salles, les trois danseuses de ce Pourpre 26-C, elles aussi, mènent joliement leur affaire. Renoncent à toute surenchère avec la pornographie étalée dans notre quotidien au dehors, charment plutôt qu'effaroucher, choissisent plus que jamais de moins en montrer, persistent à faire du rève avec de la chair, du désir avec du tissu. Obligées de jouer la connivence, la matière étant connue elles surprennent par la manière. A trois interprêtes il ne s'agit pas ce soir d'une succession de numéros mais d'une course de relais, la tension montant chaque fois d'un cran. Ces femmes se parent en mille-feuilles, comme emballées sous des papiers cadeaux, dessous leurs corps mieux que parfaits: tout simplement vrais. Chaque couche qui s'envole en dévoile une nouvelle, en un jeu de détournement à renouveler perpétuellement. Le leurre fonctionne plus que jamais, la réalité du sexe cachée vers son imaginaire. Les tambours font vibrer, le blues donne la chair de poule, les lacets indélassables agacent de tant de complications, les mouvements s'attardent dans les courbes sans jamais déraper, puis font tourner imprévisiblement les caches tétons. Il faudrait des contorsions du cerveau tout aussi spectaculaires pour voir ici des manifestations de féminisme, on en revient, comme de tout temps, au pouvoir derrière la séduction, qui s'alimente d'archétypes en exotismes. Ces voluptées paraissent sans doute bien inoffensives, mais, gestes aprés gestes, les trois danseuses recréent un peu de l'enchantement du corps.

    C'était Pourpre 26-2,  avec Belladonna LaPoison, Cherry Candy, Joy Va Voï, mis en scène par Christine Armanger à la Loge , et encore jusqu'au 6 janvier.

    Guy

  • Levons notre verre!

    Voyons-les entretenir leurs corps, tout d'abord, dans un même mouvement, suer ensemble sur le stepper. Ce n'est pas le lieu mais ils jouent le jeu, positifs, enthousiastes. Et ce spectacle ne ressemble pas un spectacle, la drolerie s'introduit déja par cet espace. Puis regardons les, une fois attablés, lever plus ensemble que jamais leur verre à l'amitié entre les peuples, à la paix, à la fraternité, à la construction de l'Europe. Parler et parler encore, considérer avec incrédulité les errances du passé, et les horreurs de la guerre. Jouer collectif. Entre deux évidences, rassurantes, entonnons avec eux l'Hymne à la Joie, confiants en l'avenir, rassemblés sur la route de l'humanité en direction du progrés, prêts, tous amis, à celebrer l'union entre les hommes de bonne volonté, et l'art et les artistes. Et tout en souriant, danser, reprendre un verre, ignorer les différences et dépasser les préjugés. Leurs mots nous décapent sans pitié, bons clients et bon public, et citoyens vraiment citoyens, politiquement corrects et absolument ridicules à communier en bonne conscience dans le confort intellectuel et dans le grand n'importe quoi, l'idéo- magma.

    autruche.jpg

    Mais le rire, en grincant, ne s'est pas épuisé: la célébration bégaye et se répete du tout début, amnésique, altérée et plus absurde encore, avec le sentiment de moins en moins réfutable d'avoir perdu quelque chose en route depuis bien des années dans l'évidence de nos convictions, la conviction que l'important se passait ailleurs que sur les banderoles agitées devant nos yeux. Ces acteurs nous le rappellent, oublions un moment et etonnons devant les errances des champignons géants, une chanson absurde ou une colère irraisonnée, regardons les partir à poil dans la neige, dehors, et rions en plutot!

    Bonne et heureuse année à tous, paix et prosperité!

    D'aprés Une Autruche peut -elle mourir d'une crise cardiaque en entedant le bruit d'une tondeuse à gazon de Jean Christophe Meurisse et les Chiens de Navarre, vu à la Ménagerie de Verre.

    Les Chiens de Navarre rejouent Une Raclette, du 11 au 13 janvier au théatre de Vanves

    Guy

    photo par Balthazar Maisch avec l'aimable autorisation de la compagnie