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La Reine morte

Ines de Castro doit mourir.

Coupable d'être secrètement mariée à Pedro, fils du vieux Roi Ferrante et héritier de la couronne du Portugal. Pedro promis, pour le bien de l'État, et pour son propre malheur, à l'Infante d'Espagne.

medium_180px-Inecastro.jpgInes de Castro doit mourir, et c'est le Roi Ferrante qui seul doit en décider. Lui même au seuil du tombeau, desséché de pouvoir et de vieillesse, fatigué de l'espoir, et même de la méchanceté.

La puissance irraisonnée de la passion (Pasiphae), le dégoût du monde et du vulgaire (Le Maitre de Santiago), l'impossiblité des rapports père-fils (Fils de personne)... les thèmes que l'on a déjà vu abordés dans ce cycle Montherlant s'entremèlent à nouveau ici. Liées par cette terrible noirceur, qui fuse en aphorismes cinglants et venimeux: "En prison pour médiocrité!".

Pourtant, autant que le pessimisme, l'amour, l'innocence trouvent aussi à s'exprimer, par la voix d'Ines, et cette voix est douce et belle. La pièce s'allège ainsi peu à peu jusqu'à son épure, en un dialogue crépusculaire et intime entre Ines et Ferrante. Ce dernier au bord de se laisser aller à ressentir, presque vivre, une dernière fois.

S'agissant de la mise en scène de Jean Luc Jeener, on hésite même à en parler. Tant elle est invisible, parfaite d'humilité, et ne cède à aucun effet gratuit. Souligner visuellement les pulsions charnelles qu'éprouve l'Infante pour Ines ne relève que de la lucidité. Tout se concentre sur la force de l'interprétation, dans ce lieu-le T.N.O. -qui organise une proximité extrême avec les acteurs.

En premier lieu avec Philippe Desboeuf, qui incarne Ferrante. Extraordinaire.

♥♥♥♥♥♥ 

Guy

P.S. Pour en savoir plus sur l'Ines historique, lire ici .

Ce qui nous fait revenir un instant au "Maitre de Santiago":on a vu cet été dans une vitrine de musée à Key West (Floride) une médaille de l'ordre de Santagio. Présumée portée par Bartolomé Garcia de Nodal, chevalier de l'ordre, parti sur ordre de Philippe IV aux Amériques. Disparu en 1622 au large de Cuba avec le "Nuestra Senora de Atocha" et sa cargaison d'or. Repéché plus de trois siècles plus tard.

Le chevalier aurait du écouter Don Alvaro. Bien fait!  

 

Commentaires

  • Une pièce magnifique, une mise en scéne simple, dépouillée qui ne fait que mettre en valeur la puissance des textes et le jeu des acteurs. Le roi Ferrante est particulièrement sublime, digne des rois shakespeariens, possédant le panache et la grandeur, la faiblesse. Il y a des moments où l'on vibre, des moments où l'on tremble, et d'autres on l'on s'endort. On peut s'amuser du cynisme du roi, cynisme qui ne sert qu'a masquer l'amour que porte le roi à son fils, amour contrarié, inavoué. On y voit aussi un roi las de la vie, de la condition humaine, du pouvoir. En décidant l'execution d'Ines de Castro, le roi détruit en lui les dernières traçes d'humanité, et, se faisant, se condamne lui-même à la mort.

  • Et si le méchant était gentil ? Et si la gentille était coupable ?
    Après avoir résisté pendant toute la pièce à ses conseillers qui veulent la mort d\'Inès, après l\'avoir secourue et l\'avoir laissée croire à son bonheur ; au moment où plus rien ne lui importe, au moment où il va mourir, le Roi décide la perte de tous : la mort pour Ines, la mort pour son conseiller ; la perte pour son fils, la perte pour son bras droit (précepteur du prince). Le dernier élan de sadisme d\'un tyran qui s\'amuse. Une mort en apothéose pour le roi . A la façon d\'un Le Roi se meurt, le monde doit disparaitre avec lui. Le Roi est mort, vive le Roi !
    Ines est pure, elle défend avec son mari, le fils du roi, un amour innocent. Loin de toutes les machinations politiques, ce couple ne veut, ne peut, faire de mal à personne. Faiblesse psychologique et non factuelle qui leur sera fatale.

    Alors, quelles sont les lois qui régissent ce monde ?
    Le tyran triomphe, l\'innocence est ridiculisée. Seule l\'Infante semble se positionner en dehors de ce tourbillon infernal. Tourbillon que tous pensent contrôler, mais un seul tient les brides de ce cortège funéraire : le Roi.

    Une tension tragique et presque frustrante du début à la fin de la pièce, Ines doit mourir, Ines va mourir. Mais où, comment, quand, par qui ? Puis le doute s\'installe, le Roi semble flancher... semble seulement, car c\'est lorsqu\'on croit enfin Ines sauvée, que la pièce bascule...

    Dans un théâtre nu, un décor inexistant, une chaise, le talent des comédiens, et du Roi!, vous plonge dans cet univers ennivrant, et vous tiennent en haleine de la première à la dernière scène...

    Vous voici invités dans la chambre du Roi, à son chevet pour suivre ses dernières heures...

  • wow!

  • POURQUOI CE TITRE " LA REINE MORTE" ??

  • La piece est inspirée de faits historiques: La reine morte du titre est Inés de Castro, assassinée sur l'ordre du roi Alphonse IV.... et devenue reine du Portugal à titre posthume (!) sous le regne de son fils Ferdinand 1er.
    Lire: http://fr.wikipedia.org/wiki/In%C3%A9s_de_Castro

    Mais une autre reine morte est évoquée dans la piece: la femme defunte du vieux roi, qui semble avoir emporté dans sa tombe sa part d'humanité...

  • vous avez raison d'évoquer la femme défunte du vieux roi. Je crois que c'est très important. Montherlant avec un talent fou sème à doses homéopathiques des indices sur ce qui a pu se passer dans la vie de ce roi et le traumatisme qu'a pu lui laisser cette mort dont il a à la fois trop bien guéri et resté marqué au plus profond de lui.
    relisez la pièce: ce n'est qu'en deux ou trois endroits très courts, et encore de manière seulement indirecte, que passe l'ombre de cette mort, et c'est peut-être d'elle que tout vient. Mais on ne le saura jamais. Suprème génie de Montherlant

  • Bon, il va falloir que je relise encore Les pièces de Montherlant...

  • Merci, merci, merci!

  • En voilà un pseudo original!

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