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  • Esquisses

    Donc… Éléonore Didier se détache du solo pour créer une pièce de groupe. Dont une étape fût présentée à Micadanses, et qui sera crée jeudi prochain à Artdanthé. Et je m’intrigue toujours, de ce que je vais voir et de ce que j’ai vu déjà en répétition: le plus authentique, aux apparences quasi documentaires- le rituel minuté d’une toilette hospitalière- mais aussi ce qui semble le plus loin du quotidien, vers l’artistique: le mouvement dansé. Deux actions se déroulent, non en parallèle, mais liées. Ces actions sont menées par trois femmes sur scène: devant la danseuse, au second plan l’infirmière et une patiente qu’elle lave, habille. La danseuse danse comme- il me semble-  Éléonore Didier danserait. C'est-à-dire de façon inédite, et de manière à suggérer denses des pensées latentes. La patiente, quant à elle, reste passive, d’une parfaite impassibilité. Ce qui me renvoie, à d'autres d’œuvres d’E.D., la puissance des moments d’immobilité. Deux femmes, et de part et d’autre les mêmes parties de leurs corps sont mises en jeu. Soudain, je crois deviner la place de la danseuse: dans le rêve de la patiente. Celle qu’elle veut, mais ne peut être, dans cette situation. Son double, sa projection. D’un coté un état de pudeur, le corps détaché de lui-même, médicalisé, hors vue et hors jeu. De l’autre le corps à voir, agissant, dansant, sexué. D’un coté un temps fonctionnel utilitaire, de l’autre un temps sensible et ressenti, suspendu de silences, d’interrogations et rêveries, de dedans distendu. Tout vit, est vu, en même temps. De cet écart, la beauté surgit. Lors de la répétition j’ai cru voir tout cela, mais cette pièce en devenir n’existera plus, laissera place à une nouvelle création.

    Lors de la discussion qui suit la présentation, je demande à Éléonore Didier pourquoi elle fait débuter la pièce par un prologue, composé de poses des trois interprètes, dont je ne comprends pas le rapport avec la suite. Elle me répond sans me répondre, je crois, qu’elle ressentait le besoin de commencer par rassembler ces trois femmes. Sur le moment, je ne comprends pas. Maintenant je pense qu’il s’agissait pour elle, consciemment ou non, de matérialiser et permettre le passage de ses soli d’avant à ce trio, d’une seule pensée concentrée à trois corps, trois interprètes mais qui resteront liés.  Le modèle… Pourquoi ce titre? Certes, le rôle de la patiente est assuré par un modèle vivant professionnel, de même que l’infirmière est interprétée par une danseuse et future infirmière. Au moment où j’écris ces lignes, le hasard m’envoie une piste : le mail d’une compagnie qui annonce une performance puplique avec des modèles vivants posant pour des étudiants en arts. Je retiens de ce signe l’ambigüité qui inévitablement toujours persiste entre corps neutre et corps spectaculaire. Quoiqu’il en soit, ce titre reste au singulier pour une pièce de groupe bien que singulière. Le performer Vincent Thomasset, lors de la répétition, reste simple spectateur. Quel sera son rôle en définitive, et par quelles actions, vis-à-vis de ce triangle féminin? Je repense à la troublante passivité du figurant de Solides Lisboa, à la possible irruption du masculin (LaiSSeRVenir) sous la forme d’une… échelle.

    Jeudi, ce sera la création. Matière, scénographie, lumières, rythmes, mots, mouvements… tout se sera trouvé en route et aura depuis changé, hors les intentions. Se poseront alors bien d’autres questions.

    Le Modèle,d'Eléonore Didier, vu en présentation d'étape à Micadanses, sera créé jeudi au théatre de Vanves, dans le cadre d'Artdanthé.

    Guy

  • Une lutte

    Le corps et le monde…. L’énergie de cette danse sourd et déborde, une volonté entière en lutte contre l’adversité. Contre un ennemi- est-il naturel, intime, politique, métaphysique?- qui reste invisible. Le corps à l’œuvre combat sans relâche dans ce vide menaçant et omniprésent, tombe, se relève, les gestes amples et généreux. Il résiste en mettant en oeuvre plus de souplesse que de violence. La remarquable création musicale, en flux, chocs et superpositions, témoigne de la confusion du monde, de changements incessants. A la fois elle oppresse et se laisse traverser de mouvements d’espoirs.

    S L I D E - trailer from cieMETAtarses on Vimeo.

    Cette agitation fébrile, cette énergie à vif, m’interpelle, me dérange aussi dans ce qu’elle a d’excessif. J’hésite à tant m’impliquer. J’aimerai cette dance plus concentrée en moins de gestes, plus mesurée, mais peut-être alors se trahirait-elle? Elle persiste dans sa lutte entêtée, de plus en plus vertigineuse, le corps se sature de cendre et titube, souffre à terre, mais progresse, vers la liberté?

    C’était Slide, chorégraphie et interprétation de Sandra Abouav, musique de Vincent Cespedes, vu à la Loge.

  • Que ser?

    Notre ami François a vu la création de Que Ser? /Qu'être? de Sofia Fitas au Colombier de Bagnolet, dans le cadre de Jamai(s) vus!: Son récit:

    Au commencement, un corps vu de dos, sobrement vêtu de sombre, sans tête, vertical et immobile dans un halo de lumière comme peut l’être un cadavre pendu au bout d’une corde.

    Que ser ? Qu’être ?débute par cette curieuse introduction qui semble évoquer une fin possible d’une existence humaine.

    Mais rapidement le propos de Sofia Fitas nous éloigne de toute tentative de représentation. Ce corps qui restera sans visage pendant tout le solo devient une abstraction exprimée par une paire de mains sur laquelle se concentre l’éclairage. L’absence du visage intrigue. Pourquoi se cacher ainsi ? Quelques jours après avoir vu ce spectacle, j’en arrive à me demander si Sofia n’a pas souhaité renvoyer avec malice  les plus philosophes de ses spectateurs vers les écrits de Levinas et la place centrale du visage dans son travail. D’ailleurs, le visage de l’Autre chez Levinas pouvait tout aussi bien être le dos de l’Autre. Ou les mains ?

    Le dos. Que l’on oublie pour ne plus voir que les mains comme si elles apparaissaient seuls témoignages du vivant, et l’objet d’un gros plan en clair-obscur. Et pourtant Sofia se tient les pieds immobiles au fond de la scène à bonne distance des spectateurs. Pas de confrontation proche.  Sofia ne quittera pas ce petit espace lointain pendant toute la durée de sa pièce. Ses mouvements n’ont pas pour vocation à emmener le corps prendre possession de l’espace disponible. Non, seulement occuper l’espace en tenant fermement la position initiale.

    Les mains évoluent lentement dans le dos de ce corps sombre, remontent peu à peu vers  cette nuque invisible. Elles se joignent comme dans une prière pour déjà se détacher l’une de l’autre, se crisper puis se détendre, se mêlent de nouveau comme des plantes ou des animaux sous-marins mêleraient leurs tentacules ou leurs filaments sous le flux d’un courant invisible. Toute l’attention est captée par ces mains, comme elle peut l’être par celles, si tourmentées, d'Egon Schiele dans ses autoportraits ou celles, si longues et fines, des personnages des tableaux d’Otto Dix. Dans le lointain, les sons d’une ville, de la circulation, des bruits de la vie. Les mains finissent par disparaître happées par ce corps sombre sans tête et sans visage.

    Commence alors la deuxième phase, en complète opposition avec la première. Le visage de Sofia reste invisible, son corps reste enfermé dans son confinement virtuel du fond de la scène. Mais après la lenteur du premier temps, les mouvements presque exclusivement concentrés sur ses mains, voici la vitesse des gestes, l’énergie, la convulsion de tout un corps. L’environnement sonore accompagne de manière parfaite cette métamorphose, les sons se font plus intenses, évoquent un univers industriel, un train, un avion. On imagine Sofia traversée par un courant électrique ou plongée dans un accélérateur de particules, devenir pure énergie elle-même. 

    Que ser, Qu’être ? Voilà une magnifique proposition d’un voyage en deux étapes dans un univers singulier et poétique qui m’a totalement entraîné dans son charme.

    François

  • La caravane passe

    Dommage que je ne puisse pas découvrir les Chiens de Navarre avec cette pièce-Nous avons les machines- ,j’ai déjà vécu le choc d’ une Raclette, et de l’Autruche … Arrivé vierge, je ressortirais sans doute enthousiaste. De ce théâtre drôle et iconoclaste, débridé et créatif, qui dynamite ses propres limites. Mais voila, ayant vu les deux autres pièces, j’ai le sentiment de retrouver ce soir un peu trop vite mes repères. Voire de regretter des redites. Sans déflorer ce que l’on voit dans la pièce, j’y vois beaucoup de similitudes- d’approche et de structures- par rapport aux deux précédentes: à comment par l’accueil hors codes du public par les performeurs, une mise hors situation. Puis, à nouveau, la représentation satirique d’un débat joué autour d’une table mais tranché net par des happenings absurdes. La répétition de cette scène, déclinée dans d’autres conditions. L’épuisement progressif de l’énergie du jeu. Une conclusion costumée et portes ouvertes sur le dehors, là où le théâtre s’arrête, ou rejoint la vie. S’expriment toujours ici de la férocité, de l’obscénité et du grotesque, des débordements. Une dynamique qui nous permet de jeter un regard décalé, surpris, acide, non seulement sur des faits sociaux, mais sur la manière même dont le théâtre contemporain en rend compte. Mais ce soir tout cela me semble un ton en dessous, assagi, et un peu prévisible dans les rôles adoptés par les acteurs respectifs. Dans la répétition de la méthode, l’audace se dilue, plutôt s’use. Je ne suis pas déstabilisé. Sans vouloir ouvrir de compétition, je vois ce soir moins de prise de risque et de distance par rapport aux conventions de la scène, qu’en une heure de Laetitia Dosch….

    Pourquoi alors en rendre compte, alors que j’éprouve en général de moins en moins d‘intérêt à écrire sur ce qui m’a laissé tiède ? Parce que je lis tant de réactions si sérieusement enthousiastes, d’exégèses très développées  de cette pièce, où la moindre plaisanterie ou effet visuel donne lieu à des lignes d’interprétation, que je m’en étonne!

    Tout de même… presque résigné ne  passer qu’un bon moment, je dois attendre les dernières vingt minutes pour  voir ce que j’attendais vraiment: justement quelque chose que je n’attendais pas du tout. Un moment où les personnages trop familiers se taisent et disparaissent, et les codes visuels se télescopent dans l’ambigüité: poncifs réjouissants du cinéma gore populaire… et du théâtre visuel. On ne sait s’il s’agit d’une charge ou d’un hommage aux tendances les plus physiques et sanguinolentes du théatre contemporain, c’est cette indétermination qui rend ce moment fort et subversif. Rendez-moi les chiens, j’en ai besoin !  

    C’était Nous avons les machines des chiens de navarre , mis en scène par Jean Christophe Meurisse vu au théâtre de Vanves dans le cadre d’Artdanthé.

    Guy

    Lire aussi les réactions de Mari Mai Corbel , Mélanie Chéreau

    Et à propos de la Raclette,  et de l’autruche

  • la mort et l'extase

    La version de 50 minutes de La Mort et L'extase est crée ce soir et demain à Micadanses en cloture du festival Faits d'hiver. A cette occasion, voici la rediffusion du texte mis en ligne le 15/5 aprés la création de la première version.

    L'obscurité règne d'abord dans cette salle enfouie profonde, entre attente et chaleur. Enfin émerge un être que l'on voit nu et que l'on ressent desespéré. Il évolue lentement à terre, accablé, suivi d'un autre, de cinq, de dix, bientôt multipliés à vingt, trente, quarante, aux formes d'hommes et de femmes qui s'insinuent par tous cotés, envahissent et saturent la scène en un tableau halluciné...

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    L'audace, l'ampleur et la crudité de cette entrée en matière suffisent à élever la pièce à un rare, même périlleux, niveau d'intensité. Nous sommes entrainé à un voyage aux enfers, une errance spectaculaire d'âmes en peine, damnées, sans but ni espoir, aux trajectoires perdues et circulaires. Les références à l'art pictural moyenâgeux apparaissent évidentes, d'ailleurs annoncées. On oublie Cranach pour penser à Jérome Bosch. Puis notre regard prend un point de vue plus contemporain, percevant la scène selon notre appréhension des rapports entre religion et culpabilité, entre mort et érotisme, alors qu'une dizaine de parmi les interprêtes se redressent peu à peu pour jouer les figures de la souffrance et de l'extase. Danseurs et danseuses se montrent traversés de décharges de plaisir et de douleur, leurs émotions manifestées par grimaces et torsions, travaillés par des entêtements ostensibles de peines et de jouissances, se flagellent et s'abandonnent contre les murs en poses offertes, tableaux que les miroirs découverts au fond de la scène tentent de prolonger à l'infini. La ronde des âmes nues, têtes baissées, continue ininterrompue, les danseurs prisonniers de leurs cycles, condamnés à répéter les mêmes séquences terribles à l'inifini. Au dessus de ces enfers s'éleve la musique de Vivaldi, magnifique, interprétée d'une voix de castrat issue d'un corps inerte porté par des corps nus. 

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    Avant que la voix ne se taise: la pièce ne dure que 25 minutes. Il faut ici exprimer un regret: le temps est compté. Au milieu de cette masse de corps circulants, on peine vite à organiser son regard et à suivre le propos des solistes. Le dispositif, si formidable au départ, gêne ensuite la perception de la progression de la pièce. On reste avec le sentiment que le sujet si riche est survolé, sans le temps de la dépasser...sans doute inévitablement, s'agissant d'une courte proposition et de la part d'une toute jeune chorégraphe. On souhaite que cette pièce, déja si furieuse et audacieuse, mais à l'étroit dans ce format, trouve bien des développements ultérieurs.

    C'était La Mort et l'Extase de Tatania Julien, présenté à Micadanses dans le cadre de la Soirée CNSMDP.

    Guy 

    Photo de Laurent Pailler avec l'aimable autorisation de Tatiana Julien, d'autres photos ici.

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  • Le temps retrouvé

    Qui émerge dans le paysage lunaire? Avec des habits de toréador ou de cérémonie. Au milieu des rochers blancs qui effleurent, des ruines. Ils dessinent une carte étrange. Le temps se dilue, et la musique va en cercles. Le corps peut-il y échapper? Par gestes tantôt géométriques et affectés, tantôt primaires et viscéraux, qui ramènent aux ballets russes qui ramènent à l’animalité, qui ramène à avant.

     

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    Elle fait l’amour aux rochers, à l’univers entier. Un rituel se répète, comme la mémoire inintelligible, mais incarnée, d'évenements ancestraux, oubliés. Reste ces traces. Elle songe, adossée, à… ? Remplit les intervalles, ceux du temps, entre les rochers blancs, lentement, rapidement, à l’intérieur, toujours prisonnière. L’Ennui plane. J’apprends la patience, voit le temps se perdre en courses accélérée dans l’espace clos. Pourtant le rythme de la musique n’a lui pas varié d’un iota. Les lumières m’engourdissent. J’accepte la fatalité, j’ai perdu le temps et elle évoque Proust. Pas une note de piano plus appuyée que la précédente, il faut imaginer les pulsations entre, et voir monotones les répétitions, déclinaisons, recompositions d’une danse à maturité, le glissement du civilisé à l’animalité.

     

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    Le corps fait son superbe avant de s’avachir, le visage grimace et s’enlaidit au ralenti. Il faut croire alors en la magie. Comme cela devrait durer jusqu’au vertige et l'abandon complet, la fin me prend par surprise, c’est une interruption.

    C’était Androcéphale de Jesus Sevari, dansé sur Vexations d’Erik Satie et sur des sculptures et lumières de Yann Le Bras. Vu à Micadanses, dans le cadre du festival faits d’hiver.

    Guy

    photos par Laurent Paillier /photosdedanse.com avec l'aimable autorisation de Jesus Sevari.

     En photos, par Laurent Paillier

    en radio, avec pièces détachées

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  • Inattendue

    "QUE SER?"/ "QU'ÊTRE?" de Sofia Fitas est créé ce samedi soir au Théatre le Colombier dans le cadre du Festival "jamai(s) Vu!)


    Rediffusion du texte mis en ligne le 11/05/2011.

    Du jamais vu, si l‘on se met en condition d'accepter de le voir, de tenter. Une masse large, indistincte, cassée, ramifiée. L'œil peine à composer, ce qui avait pu être du papier brun froissé, bien d’autres possibles maintenant, qui s'agite en craquements, de tous cotés pour brouiller les frontières. La matière est folle, un concentré d'étrangeté, il s’en échappe une forme sans visage avec des gestes d'insecte traqué, puis ravalée par le papier, qui entre et sort de cette gangue, entre métamorphoses et errances, germinations et gesticulations de branches tordues. En devenirs circulaires, en transition, en reptations asymétriques, en improbables échanges d'énergie et de fluxs. La possible expression de la difficulté d’être. C’est l'autre absolu, exprimé par juste un corps, un peu de lumière, quelques sons. Experimento 2 a trouvé sa forme introuvable, l’inexplicable à maturité.

     

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    La seconde pièce est ténue, à rechercher plus loin encore. C’est une femme minimaliste, vue de dos, immobile, habillée de noir, mais tête escamotée. L’humanité à nouveau dérobée. Je devine les rumeurs de la ville, quand mon regard finit par abdiquer il devient prisonnier, fasciné par l’image de ces mains croisées, de leur placement qui change insensiblement, par micromouvements. Plus tard, la silhouette traversée par les sons en tous sens ne ressemble à rien d'autre sous les cheveux noirs et affolés. Avec discrétion, opiniâtreté, sans retour ni pareil, Sofia Fitas crée.

    C'était Experimento 2 et Qu'être? de Sofia Fitas, en présentation aux professionnels le 6 mai au Centre National de la Danse à Pantin.

    Guy

    voir les photo de répétition, en juillet 2009, sur images de danse.

    photo par Sebastien Jabobs avec l'aimable autorisation de Sofia Fitas

  • Tentative de virginisation du récit

    Cette performance, je l’ai déjà racontée ici, et trop précisément (mais comment résister ?), alors qu’une grande part du plaisir d’y assister vient de la surprise ressentie, et de l’inattendu. Je m’adresse donc à ceux qui ne m’ont pas lu, ou qui ont oublié. Ceux qui résisteront à la curiosité de rechercher le premier récit. Juste pour dire qu’ils auront rendez vous dans un lieu inconnu, quelque part dans Paris, sans savoir ce qu’ils iront voir. Ils seront un petit nombre à assister à cette performance dans un lieu qui n’est pas conçu pour cela. D’une certaine manière, dans ce lieu, le temps deviendra circulaire. C'est-à-dire qu’à la fin, à bien observer,  il pourra ne s’être rien passé. Les détails auront alors de l’importance. Les spectateurs seront sans doute fascinés. Ils seront amenés à se demander si les lieux, même vides, peuvent être marqués par la mémoire des evenements. Ou s’il ne s’agit que d’une illusion induite par le récit. La présence de l’interprète sera forte, proche, charnelle. Et immatérielle, tant cette interprète paraitra ne pas voir les spectateurs à sa portée, semblera sur le point de les traverser, au même titre que la pièce. Comme si on l’observait évoluer dans un autre lieu, dans un autre temps. Et il sera étrange de voir l'interprete et les spectateurs d'en face, dans le même plan. Un récit sera entendu, on ne sera pas obligé de croire en sa véracité. Les liens avec ce qui sera donné à voir se feront lentement, peut-être aprés coup. Dans l'instant, le dépouillement laissera de la place à l’émotion. Des gestes banals deviendront improbables, pour certaines raisons. D’autres resteront inexpliqués. L’invisible prendra autant d’importance que le sensible. La fin sera devinée, il n’y aura pas d’applaudissements.


    Je pensais vierge mais en fait non, de Thibaud Croisy , avec Sophie Demeyer, performance hors les murs du Théâtre de Vanves dans le cadre du festival Artdanthé, les mardis et vendredi jusqu’au 17 fevrier.

    Guy