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  • Harmonies

    Vernissage? Je n'aime pas ce mot sage qui fige et limite, tant ici la peinture vit et déborde, libre. Les toiles de Bernard Bousquet vibrent de couleurs et de générosité. En très grand format, avec des ondes qui se prolongent tout autour. Les performeurs font se matérialiser cette énergie, sans rien en retenir. Jean François Pauvros peint l'espace sonore de teintes élémentaires sans temporalité qui contrastent avant de se mélanger, il soulage soudain la tension d'une toute simple mélodie. Éléonore Didier est à la fois corps et support, raccord, juste toile moins nue que bariolée, en retenue, sans plus besoin d'agir mais plutôt d'être ici en belle harmonie. Simplement tout rend heureux.
     

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    Performance de Bernard Bousquet (peintures), Jean François Pauvros (Guitare) Eléonore Didier (danse) au Générateur de Gentillly le 27 juin. L'exposition de Bernard Bousquet est visible jusqu'au 9 juillet
     
    Guy
     
    Plus de photos ici, qui rendent mieux justice aux couleurs : Album flickr du Générateur
     
     
  • L'amant de Lol V. Stein

    Dire Duras est un risque tant cette langue en impose. "Rapture", inspirée du "Ravissement de LOL V. Stein" parvient à échapper à la langue de Duras, à cette monumentalité. Elle y échappe, mais vers quelque chose de tout autant interrogatif et désespéré. Au fond, une forme de fidelité. Ce qui dit sur scène est repris littéralement du texte de l'auteur ne résonne plus vraiment comme tel, appartient maintenant à la pièce. Et la pièce s'échappe également en s'ouvrant à une toute autre histoire d'oubli, l'histoire d'un père malade, douloureuse différemment. Reste l'indétermination. Sur la scène nue, il n' a pas de lieux, juste les idées des lieux, exprimés par des surtitres, par la frontière d'un rideau, de même que T-Beach n'est que le signe de Trouville sur mer. Dans cette épure, tout l'autour est indéterminé. Ainsi dans l'intensité des regards et l'engagement des corps, on en revient à l'essentiel, l'obsession de situations que les personnages sont condamnés à revivre dans le flou de leurs souvenirs. Est ce là une définition de la folie? J'en suis affecté.

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    Un autre soir: l'amant. Dans un lieu particulier: ce café, associatif, à Pantin, dans le soir qui tombe, ni volets ni rideaux, sans séparation entre le dehors et le dedans. Un monologue. Le choix fait cette fois est celui de la fidélité au texte du roman, mais qu'il faut faire exister. que nous l'acceptions. L'actrice se tait, sourit, crée le silence. Elle est belle. Entre de longues pauses, le texte va la rechercher. Quand il est prêt. Ce texte au passé, mais fort et vrai. Alors l'actrice se met parmi nous en mouvement et nous l'apporte. En face de moi une jeune femme témoigne d'une exceptionnelle attention, immergée, sa concentration est contagieuse. Pourtant, quand le personnage raconte qu'elle faisait l'amour tout en recevant tous les bruits, les odeurs, les ombres et lueurs de la ville à travers les persiennes, nous mêmes spectateurs attentifs et justement perméables percevons les allés et venues au dehors du café, tout ce réel, et parfois l'actrice elle-même s'interrompt pour les observer. S'en imprégner? Certains préfèrent alors fermer les yeux. Mais les souvenirs n'arrêtent pas la marche du temps.
     

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    Rapture, d'après Marguerite Duras, mis en scène par Noëmi Ksicova, vu à Mains d'Oeuvres le 13 juin
    L'amant d'après Marguerite Duras interprété par Yuika Hokama mis en scène par Yves Noël Genod, vu à Pas si loin le 16 juin
     
    Guy
     
    1ere photo de Jérome Pierson avec l'aimable autorisation de Mains d'Oeuvres
    2eme photo GD
     
  • Déconstruction

    C'est donc minimaliste, obsessionnel, assumé comme tel. Je comprends vite qu'il ne me sera offert dans la pièce d'Ayelen Parolin que des variations, l'exploration de niveaux d'intensité. Les deux danseurs travaillent à l'unisson, en aller-retour des bras et oscillation du buste, bassins rivés. Dans l'économie du mètre carré au sol. Je peux me laisser enivrer par ces répétitions, ces dérapages trés contrôlés, portés par les martellements rythmiques, les accords, les clusters de la pianistes, ses effets percussifs. Cette apreté ne me déplait pas. Je peux me placer à ce niveau très sensoriel, tenter d'y rester perché, et en même temps ressentir de l'empathie vis à vis de la dépense physique des danseurs, bien mise en visibilité.
    Mais je réfléchis... Et je lis la feuille de salle, constate les efforts du rédacteur pour mettre en rapport la pièce avec "la condition humaine, soumise aux impératifs d'efficacité et de rentabilité". Et je prends alors conscience d'être moi même un peu fatigué de chercher encore et toujours du sens à toutes ces pièces minimalistes et répétitives, qui se ressemblent un peu, et dont les plaisirs s'évanouissent vite. Je retombe.
     
     
    Et, au même programme, Jan Martens. Quel télescopage! Sans crier gare, Jan Martens renverse par terre tout l'édifice spectaculaire. Le performer commence à s'installer désinvolte avant la fin de l'entracte, lumières allumées, consulte son son mur facebook et fait ses selfies, le tout projeté sur grand écran. Puis benoitement, il rédige au clavier ses 13 objectifs pour sa performance de la soirée: être provocateur, classique, minimalisme.... Nous avons beau être en période électorale, lui tiendra toutes ses promesses.  En usant d'un humour un peu potache mais réjouissant, d'une approche chorégraphique fraiche, d'une honnêteté radicale: il s'affaire seul à la danse, au son et aux lumières, c'est strictement entre lui et nous. L'exercice est radical et salutaire, les mécanismes de la scène mis à nu. Ce n'est surement pas l'effet recherché (et dans d'autres pièces Jan Martens a autant qu'Ayelen Parolin sacrifié au minimalisme et à l'épuisement du geste) mais il m'est ensuite difficile de repenser à la performance précédente avec sérieux.
     

    ODE TO THE ATTEMPT © PhileDeprez1.jpg

     
    Hérétiques d'Ayelen Parolin et Ode to the attempt de Jan Martens vu au théâtre de la Ville le 7 juin 2017
     
    Guy
     
    photo de Ode to the attempt par Phile Deprez avec l'aimable autorisation de la compagnie
     
  • Jamais vu?

     
    Ils sont jeunes, très jeunes, tous jeunes, autant les spectateurs que les performeurs, organisateurs, qui circulent tous rôles alternés sur les trois étages de la soirée. Avec le droit d'essayer, de sauter sans filet, de se planter, de grandir, et tout à coup de poser là des moments parfaits. Est-ce là de l'alchimie? Il ne s'agit pas de génération spontanée, et tant mieux. La Ville en feu désacralise en beauté Stravinsky, démonté depuis ses soubassements très sexués jusqu'à un chant à la hauteur.  Il ne suffit pas, il n'est pas nécessaire, d'être insolent. Juste par exemple se souvenir de l'enfance, commencer par faire rouler une petite voiture: Cover, dansé en duo sensible, est présenté comme un projet basé sur la reproduction de spectacles passés, et il me semble pourtant assister à quelque chose de neuf et enthousiasmant... Autre exercice d'appropriation: les chanteurs de FARF is another se livrent, avec toute la distance de la voix off, à un exercice de reprises qui transcende la vacuité. J'ai même droit à l'intimité d'un selfie-karaoké (pour découvrir, que France Gall, c'est très horizontal), et il ne s'agit pas de prise de risque. Parce que ce n'est pas grave. Parce qu'ici c'est ailleurs. Un espace plus habitable qu'habité, mais vierge pour accueillir en un projet ouvert l'imaginaire de ces propositions. Ni intimidant, ni usé. Bien sur, les "lieux" que l'on connait, ouvrent leurs portes eux aussi, ils ont leurs générosités et prennent leurs risques. Mais est-ce jamais assez? Et ici il y a le sentiment que tout s'autorise, se détend. Que c'est possible.
     
     
     
    Chimique(s) #2 conçu par  Moïra Dalant et Marine Colard, vu le 2 juin, avec:
    - FARF IS ANOTHER de et avec Valentine Basse et Gregor Daronian Kirchner
    - COVER de et avec Elsa Michaud et Gabriel Gauthier
    - Le Sacre du Printemps du collectif La Ville en Feu - avec Garance Silve, Alex Bouchni, Louise Buléon Kayser, Giula Dussollier, Simon Peretti, Maxime Bizet, Thomas Bleton, Justine Dibling, Marius Barthaux, Agathe De Wispelaere, Myriam Jarmache, Juliet Doucet et Jean Hostache
    - Fake Nature de Ana Monteiro - avec Ana Monteiro et Moïra Dalant
    - Le Tir Sacré séquence duo - avec Sylvain Ollivier et Marine Colard
    - Installation ROOM#2 du Collectif Les abattoirs, par Anaïs Morisset, Marine Colard et Moïra Dalant
     
    Guy