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bertin poirée

  • A la folie

    Au premier plan de cette performance collective surgit la folie qui traverse le corps de Céline Angèle. J’emploie le mot folie, car résonnent aussi en moi des images vues il y a peu à l’occasion de l‘exposition (1) consacrée au professeur Charcot (1825-1863), père de la neurologie et de la psychiatrie. Images documentaires de ses patient(e)s hystériques, œuvres plastiques contemporaines d’Ernest Pignon Ernest consacrées aux extases des mystiques. J’y vois plus que les similitudes-voulues ou non- dans les gestes et postures: corps qui s’arcboutent, tensions, convulsions, fulgurances, contractures… Ce qui s’offre à voir, ici, et là, c’est l’instant où le masque de la normalité se déchire, lorsqu’apparait l’irrépressible, l’irréprimé, l’invisible, ce qui ébranle toutes les convenances. Cet instant est court, fragile, important, comme un indispensable accident. Un instant que je recherche toujours à voir sur la scène. Et qui me permet ce soir de mesurer ce que doit au butoh le développement de ma propre sensibilité de spectateur.

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    Ombres internes mis en scène par Jean Daniel Fricker, vu à l’espace culturel Bertin Poiré le 6 juin dans le cadre du festival Butoh

    Guy

    (1)Charcot, une vie avec l’image du 14 mai au 9 juillet 2014
    Église Saint-Louis, Pitié-Salpêtrière, 83, bd de l’hôpital, 75013 Paris

  • Corps et mots

    A terre. Elle, et tout Victor Hugo, en cinquante volumes éparpillés. Elle, son corps un tout ramassé, qui s’efforce à se déplier, peut-être souffre, à chercher. Un être à vue. La respiration anime son ventre, et tout alors depuis ce centre: remuent la peau tendue, les membres, les muscles, les chairs. L’âme est invisible et le visage caché, ou perdu. Les os saillent, les cheveux tombent à terre comme des pleurs. Densité et fragilité, complétude, et tout à remplir de pensées. Le corps est là, essentiel, et rien de plus. Lenteur dépouillée. Les livres l'attendent. Elle pourrait tout autant s’éteindre l’instant d’après.

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    Le corps tente de s’arracher au sol, mais elle se plie, se penche et les mains plongent, y ouvrent un livre. La bouche s’ouvre et les mots glissent, des interrogations métaphysiques. Une petite éternité. Les pensées s’envolent légères et planent, graves comme des ombres, en méditations. Le corps sensible dessine de mystérieux idéogrammes. Bientôt effacés. Elle reste une page à écrire: la peau blanche, le sexe sombre. En dehors l’animalité exposée, l’humanité des livres conservée en dedans, qui s’interroge et lutte. Des livres s'ouvrent et des mots à nouveaux. Une littérature grave, sans atours, mise à nue. Ces mots la rêvent, agitée, mais sans culpabilité ni regret. Corps et texte, nature et culture, peau et cuir, nudité et reliure. Ange et bête. Réconciliés? Elle se lève, cet équilibre, lentement conquis, est un vertige renversé, vaincu le pas d’après. L'ange tremble et porte le livre aux cieux. Où serait Dieu? Où est l’homme surtout ? Le temps n’est plus. Elle, attirée contre le mur de pierre, prisonnière ou sacrifiée. Une simple lampe l’éclaire. Brefs absolus. Rien n'est gagné. Je vois une lumière noire et c’est la nuit.

    C’est lumière noire dansé par Céline Angèle et mis en scène par Jean Daniel Fricker, textes de Victor Hugo, encore ce soir au festival Buto de l’espace culturel Bertin Poirée.

    Guy

    photo de Georges Karam avec l'aimable autorisation de la compagnie

  • le corps témoigne

    Des fleurs, et elle à terre. Enfermée d’une robe noire,  émaciée, yeux clos et sourire aux lèvres, reve son être ? Le silence, quelques mouvements: une joie intérieure qui irradie sous la lenteur de son envol. C’est l’état, non l’action que l’on ressent-pourquoi ?-, comme une irrésistible évidence. La robe tombe, le corps noué, et le tissu qui colle comme une seconde peau. A terre, comme dans la boue, son voyage de quelques mètres dans cette cave parisienne résonne comme le récit émerveillé de belles rencontres, d’autres voyages sur d’autres continents, dont elle aurait ramené des peuples invisibles, et leur bonheur d’exister, l’intensité. Par quels gestes ? Le corps témoigne, à la fois vulnérable et fort, se plie et se disloque, se heurte aux limites, meurt et renait. Doigts tordus, de douleur peut-être, le temps que des notes de piano s’égrènent. Pour nous permettre de deviner  à la fois la monstruosité et l’humanité, elle au milieu comme un fil tendu entre les deux. L’extase est dépouillée comme la peau nue, d’une misère absolue,  une offrande  comme seule expression de l’universel. Elle montre l’autre. Au sol, les fleurs. Elle donne.

    C’était La Femme Ailée de Jean Daniel Fricker et Céline Angèle, dansé par Céline Angèle, à l’espace Bertin Poirée

    Guy

  • La soirée de la femme

    La femme porte des siecles en elle, la mémoire dans les gestes, tout le fardeau des archétypes du passée. Le corps de Naomi Muto se tord dans les affres d'un imaginaire moyenâgeux. Silhouette avortée, et doigts crochus, en forme d'araignée toute ramassée, un animal de vieilles dentelles. Avec entre ses jambes torves une boule de cristal: une vieille sorcière de Shakespeare telle que Kurosawa l'aurait réssucitée. Prête pourtant à se métamorphoser en belle, grâces déliées, jambes qui claquent, elle danse comme des vagues nées du vent. Vieille à nouveau, elle reste bouche bée, et nous également.

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    La femme est quotidienne, d'hier seulement: Maki Watanabe en paysanne, telle une vieille enfant à la robe fannée. Innocente, malhabile. En mouvements entravés. Surtout humaine: tout est là et tout est dit, émouvant. Puis elle parle, des mots simples. Cette terrible humanité rend superbe même l'idiotie. Et montre, poignant, ce déchirement entre la trivialité et des rêves étoilés.

    C'était " Persistance de la Mémoire " de et avec Naomi Muto, avec Laurent Paris (guitare) et "Coucou, je danse comme toi" de Maki Watanabé avec le soutien de Gyohei Zaitsu.

    A Bertin Poirée, Dans le cadre du festival Danse Box

    Guy

    photo (sauf rapport direct avec la performance): Maki Watanabe

    A venir à Bertin Poiré: Marguerite Papazoglou et Claude Parle " The breakfast of the sea-dragon " le 11 et 12 mars, Cie Patricia NOVOA
    " Médée " le 18 et 19 mars

  • L'arbre Hélé

    Atsushi Takenuchi dansait et Claude Parle y était:

    Une sorte de spore géante en marche vers on ne sait quel impensable destin ...

    C'est l'image qui naît sous nos yeux au début de la performance d'Atsushi ...

    Avec des sons évanescents, des approximations de naissance, des tentatives de constructions ...

    Puis, calmement, après d'innombrables formes circulaires, ondulatoires, en tous cas cycliques, une forme de tige, de support semble se fixer là, au centre du plateau et s'ancrer dans une élévation tout aussi improbable que l'émergence du début ...

     Et là, petit à  petit, une incroyable métamorphose semble s'opérer ... Un vrai tronc, une vraie forme apparaissent ensemble avec la musique qui peu à peu prend corps et se structure ...

    Un tronc bourgeonnant, ramifiant, d'où une ébauche de branches s'élève puis se détache ...

    Progressivement, en effet, ces branches semblent s'épauler elles mêmes, s'affranchir du support qui les porte pour évoluer par leur force propre...

     C'est alors que, par la musique, on assiste à une sorte de tissage, d'entrelacement de ces branches, comme des lianes qui s'entrelacent à elles même jusqu'à en devenir impénétrables.

    S'entrelaçant à la musique en un ferme canevas qui s'érige en un splendide sous bois d'où semble filtrer d'impossibles soleils appelant l'homme, appelant l'espèce à l'image (人/類 :nin/gen) ...

    Une lutte s'enge alors entre verticalité et territorialité, entre branches et racines, entre l'air et la terre ...

    C'est d'un fruit recueilli dans sa consistance poudreuse que viendra le salut ...

    Il essaime, il envahit l'espace dispersé aux souffles des vents, il finit par retomber et envahir sa source même, divin pollen s'autofécondant, métamorphosant l'arbre en une sculpture hors de l'espace et du temps pour atteindre à l'essence même de l'arbre desséché, pétrifié au bord de l'abîme tel un guetteur ultime, une vigie intragalactique qui nous empêcherait de sombrer dans la folie qui sans cesse nous menace ...

    texte de Claude Parle à propos de Atsushi Takenuchi - HA-NE NO KI (L’arbre ailé) à Bertin Poiré

  • On vote à Bertin Poirée

    Tous les ans en mars, on vote à Bertin Poirée. On dépose son bulletin dans l'urne aprés avoir pris son temps pour à regret cocher trois cases pour sept performances. Le taux de participation est de 100 %. La plupart des candidats nous sont jusqu'alors inconnus, ne nous font aucune promesse, plutôt offent déja tout, généreusement. Les applaudissements permettent de dégager des premières tendances, avec plus de fiabilité que des enquêtes d'opinion.

    Chacun a dix minutes pour convaincre. On ne tombe pas amoureux à tous les coups, mais dans l'exécution de cet exercice rigoureux personne ne démérite vraiment. Ni Marisa, nymphe rousse et lactée qui tourne aux sons d'une harpe plutôt new age, ni Sobue Yko qui pourtant n'est pas Moeno. Suprennent plus Volantin, qui juste commence à évoquer un voyage halluciné, nage en slip, se rhabille, mais surement manque de temps. Aussi Miki, qui sans temps mort laisse glisser un duo homme et balle raffraichissant de légerté.

    Tranchant, troublant, refléchi, d'actualité brûlante: le solo de Laurence Pages, qui danse les luttes. Et nous dresse l'inventaire des postures protestataires et politiques. Working class hero en T-shirt et baskett, corps tendu et éprouvé, en déchirements et tension, évoque l'imaginaire social à jusqu'à se se souvenir du Metropolis de Fritz Lang. Aussi grave et troublant, le Collectif des yeux. C'est un duo qui claque en noir, sec et méchant. Deux sombres personnages inspirés de Bekett qui progressent en symétrie vindicative, se rencontrent pour des affrontements cinglants. Belle surprise: c'est bien le discret Takashi Ueno, revenu de Fresque, qui clôt la soirée. On s'attend à des sauts de chat, de la virtuosité, et l'on voit l'inverse: scénarisée, une pièce très personnelle. Qui prend le risque du masque, le risque d'une danse panique, se tourne moins vers l'Asie que vers l'Afrique, instille l'inquiétude de l'indifférentiée...

    C'était la soirée d'ouverture de Danse Box- Version Clip, à l'espace culturel Bertin Poirée, avec Miki, Le Collectif des yeux, Volantan, Takashi Ueno, Marisa, Sobue Yoko et Laurence Pages.

    Guy

  • Un Conte de Fée à Bertin Poirée

    Il était une fois, dans un tout petit royaume nippon mais pas si lointain que cela, une belle princesse butô. Mais qui était condamnée par quelque méchante fée à passer courbée et fourbue la serpillière sur le sol poussiéreux d'une cave. Devant une assemblée de spectateurs silencieux, mystérieusement pétrifiés comme par magie eux aussi.

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    Peut être même, victime d'un sort, la princesse avait-elle oublié jusqu'à qui elle était. Méconnaissable, en effet, cheveux en bataille, à faire peur, le visage noirci d'une folle, douce cependant. S'effondrant à terre sans raison, membres mus par de mystérieuses pensées, se mourant de solitude ou de la douleur d'un amour perdu. Comme égarée dans une noire forêt, elle étreignait contre son sein une lourde bûche, à l'écorce rugueuse. Ses souvenirs de bonheur pourtant l'agitaient, elle dansait en rêvant de valse et de bal dans une grande salle illuminée, jusqu'à ce que résonnent les douze coups.

    Elle s'effaça dans l'ombre lorsqu'un prince apparu. C'était certes un prince mais on eut dit un enfant. Ou un fou; il en portait les habits. Un fou qui croyait chevaucher une monture. Ses pas imprévisibles et irraisonnés changeaient autour de lui la réalité, ou plutôt il croyait voir un monde qui n'était pas. Ce prince, donc, méprenait la bûche pour une femme, puis se l'appropriait en un prolongement démesuré de lui-même. 

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    Ses gestes étaient d'une grâce crue. C'était bien un prince improvisé, drôle et effrayant, et jamais un roi, tant mieux. Un prince fou qui ne ressemblait à rien sauf à l'innocence, lisse, glabre, cruelle, blanche. Il aperçut une pantoufle, en huma le parfum. Ivre, il fit essayer la pantoufle à toutes les belles dames dans la cave, à la recherche de sa bien aimée. Jusqu'à retrouver la princesse, au terme d'une longue quête. C'était très beau, à pleurer. Ils furent heureux, et ils dansèrent longtemps.

    C'était Ciel de Cendre et Emerveillement et Ciel de Cendre, de Gyohei Zaitsu, avec Gyohei Zaitsu et Maki Watanabe, au butô festival, à l'Espace Culturel Bertin Poirée.

    En Juin dernier.

    Guy

    photos sans rapport direct avec la performance, mais avec l'aimable autorisation de Gyohei Zaitsu 

  • Jocelyne Danchick: un monde sous contrôle

    On trouve plein de cadeaux cette année dans la Dance Box  de Bertin Poiré: une performance de Yumi Fujitani (qu'on a ratée), deux courts mais beaux soli (qu'on a vu), le premier de l'italienne Eleonora Zenero d'une puissance et d'une économie post buto, le second de Saiko Kino, toute en longueurs et en judicieuses obscurités...et hier soir une proposition à la fois corsetée et libérée de Jocelyne Danchick.

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    On avait eu plus qu'un avant-goût du concept radical et orthopédique de Breath Cycle avec un solo ici même l'an dernier. Le choc esthétique initial est donc un peu amorti. Mais sans perdre de sa force. Évidemment déja d'un point de vue érotique: la vue d'un sein jaillissant de la prison d'un corset rigide interpelle plus qu'une franche nudité. Il y a heureusement plus à voir ici qu'une offensive fétichiste. Il est troublant de montrer le corps en montrant ce qui le contraint... ou ce qui le soutient. Les mouvements cassés, asymétriques, sophistiqués ou instinctifs, cultivent tout au long cette intéressante ambiguïté. Au son lancinant du cri du cuir. Et au fil de Vivaldi, Haendel, Chostakovitch, pour une mise en perspective historique, de la poupée baroque aux corps industriels, et l'incursion d'inquiétantes araignées charnelles. Tous ces personnages tentent-ils d'être libres dans leur liens, et d'être sujets autant que d'être objets? On entend Freud aussi, pour nous en dire la difficulté. Manier tout cet attirail peut être pesant, J.Danchick introduit aux bons moments une distance ironique bienvenue.

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    Tout de même des regrets: de Breath Cycle 1 à Breath cycle 2 le passage du singulier (dans tous les sens du terme!) au pluriel se grippe par moments. Les soli ne détonnent pas mais les ensembles semblent manquer de précision, ce qui est un comble s'agissant d'une évocation du corps-machine. Question de rodage (il vrai que c'est la première), d'huile dans les rouages? Là n'est pas le plus important. Les danseuses et le danseur se libèrent de leurs carcans à la fin: on est soulagé pour eux...Voire: les corps d'aujourd'hui sont tout autant contrôlés qu'avant, mais de manière plus subtile, par des appareillages moins visibles. Ce n'est pas le moindre mérite de Breath Cycle de nous le rappeler.

    C'était la création du Monde Entre Parenthèses, ♥♥♥ second volet de Breath Cycle, de Jocelyne Danchick avec Melanie Brockmann, Onenn Danveau, Claudia Gradinger, Charles Essombe, Malena Murua. Ce soir encore, Dans le cadre du festival Dance Box, qui s'achève le 29 mars, à l'Espace Culturel Bertin Poiré

    Guy

    P.S. : photos de Danielle Voirin, avec l'aimable autorisation de Jocelyne Danchick

  • Juju Alishina: une vie de chien

    Beaucoup s'épuisent et se dispersent à vouloir pluridisciplinariser à tout prix. C'est déjà en soi remarquable que Juju Alishina, en utilisant des techniques de buto, de théâtre, de danse, nous propose quelque chose qui se tient. Pour plus d'une heure durant, avec un début, un milieu, une fin. L'argument est consciencieusement expliqué sur la feuille de salle: une fable politique, mais sans morale univoque, situé dans un espace-temps utopique et indéterminé. Où l'on voit un groupe engagé politiquement se réfugier dans la clandestinité. Ce récit reste obscur, ce qui n'est pas plus mal. Les personnages réservent leur souffle pour des tirades idéologiques d'un délicieux démodé (que cet effet fascinant soit volontaire ou non, il importe peu). Les rapports qui lient les personnages s'exposent eux plutôt à force de danse et de mine, ce qui les transporte depuis la raideur de l'utopie vers les plans de la corporalité et de la sexualité, tant mieux. Sur un mode talentueusement expressif et ambigu, surtout quand le chien est concerné.

    Car Juju Alishina joue le chien. Joue plutôt le rôle d'une femme esclave éduquée par le groupe comme une chienne. Ce qui pose un problème de représentation. Quant la danseuse se retourne sur le dos les quatre pattes en l'air, fait-elle du buto? Ou imite-t-elle un chien? Ou fait elle les deux ? On ne sait pas, sauf qu'on tend à rester dans le registre de l'imitation, ce qui, dans toute la pluridisciplinarité mise en oeuvre ici, est tout de même le moins intéressant. En concours avec la musique seventies, d'un mauvais goût effrayant. Surtout il manque ici au final un peu de nervosité, d'enjeu, pour dépasser le niveau d'un brillant exercice de style. Heureusement, comme dans Dogville, tout le monde meurt à la fin.

    C'était Dog rules de Juju Alishina_compagnie Nuba,  à l'espace culturel Bertin Poirée.

    Guy

  • Soif et Pluie, à l'espace Bertin Poirée

    C'est un secret bien gardé: il y a en ce moment un festival de danse à Bertin Poirée. Proposant tout autant de la danse contemporaine que du buto. Les animateurs du lieu sont d'une gentillesse et d'une politesse toute nippone, d'une discrétion exemplaire. On parlera quand même de ce qu'on a vu, brièvement pour ne pas les gêner, peut être ont ils peur que cela se sache qu'ils organisent un festival. Cette digne politique porte ses fruits: juste une poignée de spectateurs s'installent sur chaises et tapis pour voir si  "Il va pleuvoir" avec la compagnie Noon... On va être honnête: pas de regrêts sur le moment, mais pas grand chose non plus à en dire après. Il est sûrement question du quotidien dans ce duo de bonne tenue, qui utilise des moyens variés, du hip hop au sage soulevé, jusqu'à quelques tics bien contemporains un peu vains: accomplir des actions superflues avec une chaise, essayer de faire bouger le mur, etc... On applaudit et on oublie, faute d'une narration forte à laquelle s'ancrer.

    Nettement plus de publics la semaine d'aprés- tous les secrets finissent tot ou tard par s'ébruiter- dont un admirateur de Moeno Wakamatsu: on est donc au moins deux admirateurs, c'est un début. Plus d'intensité sur scène ce soir aussi, avec "Soif", solo de Miyoko Shida.  La partie est vite gagnée: peut être parceque dans le regard de la dame on lit une vraie inquiétude. Traduit dans le mouvement, un tournoiement entraîné par Bach pour ne plus s'arrêter, en une tension sans ostentation, la danseuse perchée sur pointes et cambrée, dans le flou d'une belle robe orange. Intermède avec une chaise, cette fois intelligemment exploitée. Et survient un exploit notable: notre fleur assoiffée se plante quelques instants dans un pot. Sans pour autant être ridicule, même un seul instant.

    C'était "Il va pleuvoir"♥♥ de la Cie Noon et "Soif" ♥♥♥♥ de Miyoko Shida à l'Espace culturel Bertin Poirée.

    Guy