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Un Soir Ou Un Autre - Page 25

  • Paysage théatral

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    Sur ambiance de crépuscule, les artistes arrivent avec bagages en résidence au Swamp Club. No man’s land éloigné de tout, de la société. Bien accueillis, et sotto voce, ils semblent résignés à ne s’y étonner de rien, à en oublier ce qu’ils sont venus créer. De mystérieuses menaces rodent pourtant à l’extérieur (le monde réel ?): bruitages anxiogènes, plan d’urgence et tout le monde bien à l’abri dans le tunnel, dehors fumées couleur radioactivité. Tandis, tout le long, qu’un quatuor à corde commémore Schubert et Chostakovitch, tel l’orchestre du Titanic. S’il s’agit d’une métaphore de la situation des artistes, le constat est bien dépressif,  bien qu’égayé de dialogues réalistes et ahuris que l’on devine issus d’improvisations. C’est discrètement drôle, ouaté de brume, et désengagé, impeccablement esthétique en arrière fond, mais lent, lent… On dirait les Chiens de Navarre au ralenti, et surtout lorsque un comédien apparaît en costume de taupe géante. Le monde fume, bonne nuit.

    Swamp Club de Philippe Quesne au T2G- Théâtre de Gennevilliers, jusqu’au 17 novembre.

    Guy

    photo de  Martin Argyroglo avec l'aimable autorisation du T2G

  • La vie et le temps...

    A l'occasion de la présentation des épisodes 1 à 4 au Nouveau théâtre de Montreuil, Rediffusion d'un texte de notre ami François, à propos de Life and Times, mis en ligne le 12 décembre 2010...

    Life and Times Episode 1 proposé par la compagnie new-yorkaise Nature Theater of Oklahoma (NTO) est un spectacle étrange, long d’environ 3 heures, mis en scène sous forme de comédie musicale, tout le texte étant chanté. Il raconte l’histoire autobiographique de Kristin, une des actrices de la troupe, depuis l’âge de ses plus vieux souvenirs jusqu’à l’âge de 8 ans. Le spectacle commence avec une seule actrice, rejointe après un long moment par deux autres filles et enfin par 3 acteurs masculins. Aucun ne joue un personnage précis et chacun chante des morceaux de l’histoire personnelle et autobiographique de Kristin. Comme dans toute bonne comédie musicale, le chant s’accompagne d’une chorégraphie, qui dans ce cas précis, est inspirée de spectacles de masse comme la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques ou un défilé des Spartakiades, les jeux sportifs qu’a connu le metteur en scène Pavol Liska dans son enfance en Slovaquie communiste. Les acteurs sont vêtus d’un uniforme identique, les femmes portent le foulard rouge des pionniers soviétiques.

    Life and Times est un projet gigantesque, conçu en 10 épisodes étalés sur 10 ans. Le 2ème épisode vient d’être monté le mois dernier à Vienne mais c’est le premier épisode qui sera à l’affiche en janvier prochain à Paris. Tous les spectacles du NTO ont pour point de départ une question portant sur la notion de récit et sont construits à partir d’histoires racontées par les membres de la troupe ou des proches, dans une logique de ‘ready-made’.

    Pour Life and Times, les deux metteurs en scène Pavol Liska et Kelly Cooper, fascinés par les enregistrements sonores, ont demandé à Kristin de leur raconter sa vie au téléphone, en la découpant en 10 portions d’une durée totale de 16 heures. Episode 1 est la restitution INTEGRALE de la première partie de cet enregistrement. Intégrale car absolument toutes les paroles prononcées sont restituées y compris les ‘aah…eeuh’,’ you know’ , ‘hummm’ dont est parsemé le récit. Rien n’est modifié, ajouté ou soustrait. La chorégraphie des acteurs se développe selon une programmation aléatoire, chaque acteur devant exécuter des instructions figurant sur un panneau pris au hasard dans une pile par une femme assise devant la scène.

    La forme chantée et musicale donne l’impression de se retrouver quelques siècles en arrière dans un château médiéval pour y assister à un spectacle de ménestrels chantant à la gloire de quelque héros oublié. Ou même à écouter les exploits épiques de l’Iliade et l’Odyssée. La tradition des récits oraux est une source d’inspiration certaine pour Kelly et Pavol. Chaque spectateur réagit à sa façon face à ce récit ordinaire amplifié jusqu’à en devenir lui aussi épique dans l’esprit de son auteur et des metteurs en scène, comme d’ailleurs face à tout ce qui se passe sur scène car tout est sujet à libre interprétation, aucune signification n’est imposée. Mais on imagine que chacun se retrouve plongé plus ou moins profondément dans sa propre enfance, confronté à des joies ou des douleurs depuis longtemps oubliées. Devant cette scène où défilent le récit de ces souvenirs accompagné de cette chorégraphie abstraite, nous nous retrouvons face à ce qui nous a constitué comme individus, engagés dans une sorte d’autoanalyse. La durée – longue-  du spectacle est manifestement un moyen utilisé par Pavol et Kelly pour nous toucher, pour que nos défenses naturelles face à l’apparemment insignifiant tombent et pour que nos sortions transformés par l’expérience.  

     Life and Times Episode 1, spectacle vu au Kaaitheater de Bruxelles.

    A l’affiche au théâtre des Abbesses à Paris du 11 au 15 janvier 2011.

    François

  • La veuve était en noir, en apparence vermillon, ivoire....

    Le Baiser de la Veuve se joue du 7 novembre au 7 décembre au théâtre 12. Rediffusion du texte mis en ligne le 31 mars 2013 

    Pas de doute. Il s’agit d’un théâtre de texte (et quel texte!) mais d’un théâtre physique tout autant, violemment. Lorsque les répliques submergent les personnages et quand les mots les piègent, ce théâtre devient de larmes et de sang, de sueur, de relents de bière, de bourre-pifs et de gnons. La violence des empoignades prolonge- libère ou exacerbe?- rivalités et tensions. C’est saisissant. Se mesurent sur scène Bobby et Georges, deux hommes frustres qui triment dans une usine de l’Amérique industrielle sur le déclin- une sorte de purgatoire théâtral, un no man’s land dont on doute qu’ils puissent s’évader.

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    Entre eux: la visite d’une femme. Betty, L’amie d’enfance, peut-être une ancienne amante, depuis longtemps mariée et partie, revenue en veuve maintenant. Un étrange triangle amoureux se constitue. Les deux mâles rivalisent déjà confrontés à son attente. Betty arrive enfin, et la danse se complique. Elle, désormais si sophistiquée, mots choisis, jupe serrée et manteau vermillon, semble jouer avec eux, les mener de sa voix, du bout des seins. Ou même de sa fragilité. Chocs de langage. Contrepied. Jeux dangereux. Elle déconcerte, aussi inattendue qu’ils semblaient prévisibles. Leur passé commun est chargé, elle revient demander des comptes. Tout est possible désormais, tous les risques et retournements.… Interprétée avec nuances, Betty me parait si irréelle, bien que si charnelle, que je la croie un fantôme revenu les hanter pour leurs fautes… 

     

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    Après la représentation, l’auteur- Israël Horowitz- se matérialise au café voisin. C’est un privilège de l’interroger à ce propos, il me répond qu’à priori non: Betty est réelle, mais que, bien sûr, chacun peut interpréter la pièce à sa façon. Il incite aussi à prendre du recul par rapport au réalisme de l’œuvre, de par son hyper-réalisme même; ce soir la mise en scène humble et nerveuse, l’interprétation précise et intense des comédiens renforce cette sensation, avec l’ancrage « working class » des dialogues, la caractérisation des personnages, la précision des décors encombrés de paquets de journaux à recycler. C’est un piège pour le spectateur, redoutable. J’y suis pris. Comme la veuve (noire), Israël Horowitz tisse la toile du récit, quitte à user de drôlerie, pour faire accepter le drame et ses règles, peindre une noire humanité. C’est ensuite que j’y réfléchis, longtemps encore après.

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    Sous les flots des mots qui se cherchent, des vraies gaffes et fausses embrassades, des mots qui trompent, des fragiles convenances et connivences, des souvenirs complaisants cachant les vérités qui dérangent, s’imposent la violence et la cruauté des rapports de force, entre hommes et femme, faibles et forts. Jusqu’aux coups qui départagent, jusqu’à la contrainte physique. Pas de pitié. Israël Horowitz ne recule pas devant l’évocation du pire. La tendresse est blessée, étouffée, et la vengeance pese lourd sur la balance. Ultime question: la possibilité du pardon. On attendra en vain ce soir la réponse. Ce théatre ne donne pas de leçon.

      

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    Au café, Israël Horowitz me demande d’où je viens. C’est peut être une question de politesse, ou peut- être plus que cela. Dans le baiser de la veuve, l’origine importe. Georges et Bobby sont restés prisonniers de leur lieu d’enfance, de leur morne médiocrité, sans espoir ni rêves. Ils sont condamnés à soulever à longueur de journée des kilos de journaux, aussi lourds que les souvenirs qu’ils ressassent. Avant que ces papiers-et les mots écrits dessus- ne soient broyés dans une machine, et recyclés à l’infini. Ainsi se répètent leurs vies. Betty est celle qui est partie, devenue une autre: une femme chic, un écrivain, et qui ce soir revient. Ou rend elle juste visite? Dans les dialogues, les surnoms d’école collent toujours à la peau des personnages présents ou évoqués: Betty la souris, Georges la Crevette, Bobby le Bélier, le Suédois, la Girafe…, jetés à la figure pour  humilier ceux ci à tour de rôle, les contrôler, les figer dans leur état passé, leur interdire de changer. Betty est-elle vraiment une autre à présent? Et peut-elle résister aux efforts de ceux qui veulent la reduire à son passé?

    N’oublions jamais, ouvrons les yeux, toujours changeons.

    C’était Le Baiser de la Veuve d’Israël Horovitz, mis en scène par Tony Le Guern, à l’Aktéon Théâtre, du lundi au mercredi jusqu’au 24 avril.

     Guy

     Photos de Laurent Caron avec l'aimable autorisation de la compagnie.

  • Juliette et Juliette

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    Bulles à mâcher, bulles à claquer, pyjama rose et poses en douceurs, pas si loin l’enfance, mais bientôt le temps de se rencontrer. Elles s’évaluent nues, surprises et chairs à claquer, explorations en miroirs. Masculines, féminines, du portique tombent des choses molles, couleurs passées, des dessous où s’y glisser, s’y déguiser. Elles s’élèvent, flottent comme des bulles de savon, Juliette au balcon et Roméo réinventée, oiseaux moqueurs, cochons pendus et beautés détendues. Billie Holiday chante en prélude à une belle nuit d’automne, je digresse, et je régresse, je me régale lorsque Katalin Patkaï affine encore son ironie, son ton. Douce piquante, elle enchante.

     katalin patkai,danse,le générateur

    Etape de création de Roméo et Juliette (titre provisoire) de Katalin Patkaï et Ugo Dehaes avec Katalin Patkai et Justine Bernachon,vu au Générateur de Gentilly dans le 19 octobre dans le cadre du festival Frasq.

    Guy

    Photos (droits réservés) avec l'aimable autorisation de la compagnie.

  • Aveuglé

    A travers l’effraction de l’oubli, je la voyais émerger des origines, ce nu(e) muet la découvre futuriste, forme frêle projetée dans un avenir glacé. Avec la même intensité, la même etrangeté. Sa nudité m’aveugle, et les lumières qui explosent en flashs, déchirent l’obscur, bien plus vite que nos pensées et font fuir les épileptiques. Lentement des torsions l’étirent encore, impudique, le corps scanné d’un laser vert. Pour l’identifier, la cataloguer, la réduire ? Impossible bien sûr, l’insaisissable s’enfuit vers l’asymptote de la nudité.

     danse,camille mutel,etoile du nord

    Nu(e) muet de Camille Mutel, vu le 18 octobre au théatre de l’étoile du nord.

    Guy 

    Photo (droits réservés) avec l'aimable autorisation de la compagnie Li Luo

  • Une visite

    C’est une maison parmi tant d’autres, dans les rues désertes de Pantin la nuit. Une femme, prête pour la fête, nous invite à y rentrer. Nous sommes quinze, ou un peu plus, à explorer sans trop oser, comme des invités polis, de pièces en pièces, et rencontrer  les étranges habitantes, comme celle qui dans la cuisine en petite tenue goute sa soupe, ou celle qui danse sur le balcon. Dans le jardin, celle-ci en robe blanche de débutante, éclairée de guirlandes, lente, jette sur moi son dévolu, me dévore des yeux, s’approche, me tend le bras, je joue le jeu, nous partons. Dans le salon, doucement, ensemble nous dansons, je suis rentré dans ce rêve éveillé, sans savoir où je vais. Sous la fête, sous la musique, une impression de tragique. Que se passe-t-il dans la salle de bain ? Alors qu'au 1er étage, celle-là me donne à lire à haute voix quelques lignes de Peter Hanke. Pourquoi ? Mais tout autant pourquoi refuserais-je ? Je lis avec application, sans le temps de comprendre. Qu'entendent les autres? Ceci est une vraie maison, et elles y semblent chez elles, depuis longtemps, c’est faux évidemment, la fête continue sur un autre plan, nous sortons.

    Prêt(e) à d'Elsa Foucaud, Deborah Weber, Béatrice Aubazac, Julie Métatairie, quelque part à Pantin dans le cadre de la soirée Hors Lits région parisienne du 23 octobre.

     Guy

  • Sujet imposé

    Le sujet de cette création, dont je vois ce soir la première partie, est la naissance. Rien ne m'aurait permis de le deviner. A la voir, cette danse constituerait un travail avant le travail, une préparation, une mise en condition... Je lis le sujet et je l'oublie, n'ose pas me raconter une autre histoire. Reste, et c'est déjà beaucoup,  de l'ivresse et de la fascination, devant des mouvements résolus et répétés, d'un corps bien campé au sol. Il y a de la force dans l'acceptation d'autre chose, cela je le ressens.

    Noli me tangere from Les Décisifs / Clara Cornil on Vimeo.

     

    Noli Me tangere de Clara Cornil, vu le 18 octobre au théatre de l'étoile du nord .

    Guy

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  • Actions à la carte

    Mirea Arnella propose au public de tirer des cartes, chacune de ces cartes détermine une performance qu’elle exécutera. Les spectateurs sont responsables, ce jeu est-il anodin? La performeuse s’offre dans un rapport de séduction, souple et fine, voix douce, coiffée/vêtue d’un noir entre domination et soumission. Les performances dressent ensemble le catalogue allusif de pratiques pornographiques: consommation de boulettes de viande jetées au sol, bouche déformée par des billes de bois,  tuyau d’eau dans la gorge et liquide jaillissant sur le visage, fleur plantée dans le fondement…  Le public peut se sentir piégé dans ce rapport avec l'artiste, en apparence de soumission de celle-ci, plutôt de manipulation de sa part car né de l’invitation initiale à tirer les cartes. Pourtant alors que la performeuse s’est laissé tomber en arrière à plusieurs reprises face au public, une femme se lève et spontanément se précipite pour empêcher une nouvelle chute. Libéré de la boucle, un rapport nouveau s’est instauré.

    Ohh Fortuna !!! de Mirea Arnella au générateur de Gentilly dans le cadre du festival de la performance  Frasq. 

    Guy

  • Quel temps faut il?

    Ici, de temps en temps, une question à un artiste du spectacle vivant à propos de la création artistique, pour une réponse libre , de quelques mots ou plusieurs feuillets.

     

    A Isabelle Esposito, metteur en scène et actrice.

     

    Question du soir : "Quel temps faut-il ?"

     

    Réponse du lendemain: "La vie"