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buto - Page 5

  • TBO dance, ensemble?

    On lit l'annonce: "Cries from Shadows of Darkness: une rencontre multiéthnique entre artistes sud africain, japonais, italien et français." Accroche efficace- un styliste italien a vendu des millions de pulls de toutes les couleurs avec un concept voisin- mais l'idée suffit-elle pour produire sur scène quelque chose de fort et nouveau? Cela nous aguiche assez pourtant pour nous déplacer jusqu'à Bertin Poirée, convaincu que la danse se nourrit de métissage, et le buto plus encore que toutes les autres danses. Mais prévenus que faire de ce concept l'objet même de la performance ne suffit pas à en garantir la réussite artistique.

    Et l'annonce de revendiquer "une pollinisation croisée de divers langages culturels". Mise en application: on jette littéralement en l'air des fleurs en papier, puis l'une danse un buto sans surprise, l'autre s'affirme plutôt contemporaine, la troisième tente une intéressante synthèse des deux, et Teddy W.T. Ramasikeest surprenant, athlétique, urbain et délié. Mais le tout est il supérieur à la somme des parties? Si on en est, après 20 lignes, à se poser encore cette question, c'est que ce soir la réponse nous semble être non. Plutôt du syncrétisme sans révélation. Avec le regret de voir trop de talents individuels tourner en rond, en une vaine procession. Sans donner l'impression de vraiment se rencontrer, plutôt de se faire de l'ombre. Dès lors, dans les mouvements d'ensemble, ce sont surtout les différences de style dans l'exécution qui sautent aux yeux. Qu'on ne peut alors s'empêcher d'attribuer à un manque de rigueur plutôt qu'à une intention délibérée.

    Le texte de présentation part trés loin dans le cosmique, mais pour nous laisser loin derrière. Le spectacle ne nous fait pas quitter terre, malgré les efforts world music des deux musiciens- Mateo de Bellis et Hirohi Sakurai aux vents traditionnels et percussions.

    C'était Cries from Shadows of Darkness,  de la Cie TBO Dance Ensemble, avec Tebby W.T. Ramasike, Céline Angèle, Yuko Ota, Ambra Pittoni à Bertin Poirée dans le cadre du festival Dance Box. On peut en voir une captation video ici
     

    Guy

    Et il y avait aussi, plus cohérent, Box de Muriel Bourdeau,un solo habillement dédoublé, en direct et sur vidéo. Contemporain avec des influences buto. Autour de l'empêchement, de l'enfermement, de la difficulté de quitter le sol.


    Box
    envoyé par madbom
  • Clip V.2

    Bertin Poirée, retournons y et regardons y huit autres, degustation de pièces en dix minutes chacune:  

    medium_une_fleur_sans_nom.jpgKiyoko Kashiwagi & anime dance theater nous jouent Romeo the thief and Juliet the guard, ce n'est pas du Shakespeare, c'est beaucoup mieux: on vole la joconde dans un ballet à la Tex Avery ninja, mais l'amour finit par triompher, c'est hilarant.

    Difficille pour la compagnie Bon Bon/ Hanako et Yuka, avec Là ou je suis, de déja exister juste aprés ça, trop délicat, trop modeste?

    Laurence Pages nous propose un travail troublant sur le souffle; A un fil, d'une voix commande la danse, mais peut-être au risque de dérégler le corps lui même, d'une manière aussi inquiétante que Louise Bédard il y a peu à suivre en intégrale à mains d'oeuvre dans pas longtemps.

    On était un peu passé à coté de Gyohei Zaitsu l'an dernier, mais on est saisi ce soir par la force de ce que le danseur de cette Vie En Rose dégage, sur un mode trés lent et intense, en quelques gestes blancs, sous la neutralité d'un maquillage buto et l'humanité d'un costume grotesque: quelque chose de quasi miraculeux.

    Soyons honnête, sur huit performances, il y a en toujours l'une où l'attention se dissipe un peu. cela tombe ce soir sur Marlène Myrtil (Assentiment 1 chaine correspondance....) ce qui est surement injuste: à defaut d'avoir vraiment suivi, on peut témoigner que c'est trés riche, fort et maitrisé.

    D'un mardi l'autre, l' Aprés tout... de Motoko Yoda, dont l'exposé n'a pourtant surement pas varié d'un iota, nous semble plus construit, aussi intéressant, plus affirmé.

    En lieu et place d'une annoncée absente, Gyohei Zaitsu nous fait un retour surprise, bonne surprise, et même meilleure que celà: ce qu'il fait sous le même masque blanc n'a rien de commun avec ce qu'il nous a montré tout à l'heure, plus baroque, et imprévisible completement. Plus on voit ce garçon, plus il surprend.

    Conclusion par la cie Jocelyne Danchick avec Breath cycle: une femme vétue d'un antique corset orthopédique, d'emblée une image forte, mais trop sans doute, à un tel point que l'on a du mal à dépasser l'impression initiale pour s'intéresser à la danse, suspendu entre la violence de ce concept visuel et la perception du mouvement.

    Tout le monde aura compris que ce soir à Bertin Poirée il n'y avait pas que du buto, ce qui n'avait pas d'importance.

    C'était le deuxieme épisode de Version clip dans le cadre du festival Dance Box 07 dans un centre Bertin Poirée si plein qu'on ne pouvait plus y glisser même la plus fine des danseuses. La trilogie s'acheve mardi prochain.

    Guy

    Faut il noter le spectacle vivant?... s'interroge-t-on sur Scènes 2.0... En tous cas ce soir à Bertin Poirée on était invité à voter pour ses deux compagnies préférées. 

    Et qui donc avait été élue l'an dernier? Maki Watanabe, evidemment!

    P.S.: Gyohei Zaitsu a aimablement répondu à notre demande en nous envoyant cette photo plus haut. Pas de la Vie en Rose hélas, avis aux photographes: il faut immortaliser Gyohei avec son noeud rose bobon dans les cheveux! Au Proscenium les 3 et 4 avril, peut être? 

  • Version clip: 10 minutes et puis s'en vont

    Que peut-on montrer en dix minutes? Peu et beaucoup à la fois, en abandonnant en tous cas les spectateurs à de délicieuses frustrations, et à la promesse de futures rencontres.

    Restent en attendant les souvenirs de paysages juste entrevus, d'étonnements ambigus et d'impressions en suspend. D’abord avec Flora Sans- Ephe & Ina- 2 filles tous sourires qui nous apportent une boite mystérieuse pour un jeu dansé construit autour des 5 sens, et c’est proposé avec une gentillesse quasi-enfantine et si désarmante qu'on est obligé d’accepter. Motoko Yoda- Après touts’aventure dans des territoires plus butô, et aux sous-entendus plus adultes, pour une démonstration parfois peut-être encore incertaine, mais déjà riche de tensions, qui ouvre vers des profondeurs surprenantes. On devine Yuko Kametani prête à tout oser: d’abord l’immobilité, puis des larmes, et ensuite interrompre une danse à peine entamée pour couper la bande son... et surprendre son monde. Gonflé ! Enfin Miguel Ganiko- mémoires d’un pétale de jasmin, danseur fort de plus d’expériences, s'avance bandeau sur les yeux, pour un solo inquiet et douloureux, sobre, quasi féminin.

    On a manqué entres autres Céline Angèle et Jocelyne Danchick, excellente raison pour les retrouver avec d’autres danseurs encore aux épisodes suivants de Version Clip, mardi prochain et puis celui d’aprés

    C'était Version Clip à Bertin Poirée, dans le cadre du festival dance Box 07

    Guy

    P.S. Ce n'est sans doute pas encore le printemps, mais c’est déjà le dégel, et enfin la saison du buto: le Festival Dance box tout ce mois de mars à Bertin Poirée. Et Yumi Fujitani s’installe tout avril au Proscenium, pour différentes performances,-en solo ou très bien entourée-avec entre autres deux nouvelles version de Kao

     

     

  • 3 jours avant Atsushi Takenouchi

    medium_0123_Vie_Mort_2_1_.jpgCe n'est pas une photo extraite de La Nuit des Morts Vivants, ni d'un clip de Michael Jackson, c'est une annonce qu'on a reçue pour les prochains spectacles collectifs d'Atsushi Takenouchi à Bertin Poiré

    Mardi avec le groupe "Ground", mercredi avec le groupe "Wind" (et le feu alors?). Comme le vent buto souffle où et quand il veut, et surtout s'annonce au tout dernier moment, on est pas sur de pouvoir aller les voir se réincarner ,malgré toute l'envie qu'on en a.

    Donc exceptionnellement on en parle sans avoir rien vu. On y ira peut-être suivre les défilés improvisés, ces deux mêmes jours à 18H à partir du Centre Georges Pompidou.

    Guy

  • Mamiko Mitsunada, Sosana Marcelino, Camille Mutel: premiers gestes assurés au Kiron

    C'est Philippe Verrièle qui avait signé la programmation de cette soirée au Kiron Espace, une raison suffisante pour medium_thumb_Mamiko_Mitsunaga.jpgcourir découvrir ces "premiers gestes".

    On a pourtant abandonné en chemin Mamiko Mitsunada, belle danseuse aux cheveux roux, et cela presque dés le début de son Rêve. Un solo riche et autant mimé que dansé, accompagné d'une bande son champêtre, puis contemporaine. Mais ses intentions sont perdues entre sa conscience et au moins la notre, quelque part dans le vaste cosmos. Qui dira pourquoi certaines rencontres ne se font pas? Un peu trop de tout à la fois ?

    Sosana Marcelino avait pour sa part déserté la scène, et pris possession de l'espace de la galeriemedium_thumb_Sosana_Marcelino.jpgd'exposition du Kiron. Choix judicieux pour que s'impose d'emblée toute la force de son solo. Peu frileuse et un peu folle, la donzelle transformait ce lieu un peu froid en terrain de jeux espiègles, habité d'amis imaginaires. Et de spectateurs subjugués par sa présence d'une rare évidence, le quatrième mur réduit en miettes. Avant, une fois débarrassée de sa jupe de tulle- était ce le passage à l'âge adulte?- qu'elle n'investisse les dimensions les plus inquiétantes de sa féminité, exprimant cette découverte à force de dérèglements furieux.

    C'était, pour finir, le retour (parisien) de Camille Mutel, cette même danseuse qui avait fait une apparition mémorable lors de son passage il y a un an à Bertin Poiré, pour un solo conclu par un devoilement d'une violence extrème, medium_thumb_Camille_Mutel_Kiron.jpgune soirée qui avait inspiré quelques belles lignes à Philippe Verrièle, justement.

    C'est encore du Sexe avec un grand S dont il était question, plus suggéré que montré cette fois ci, mais, pour cette raison même, non moins intensément présent tout au long de cette danse solo. Un solo trop intense et tragique pour que subsiste la moindre trace de vulgarité, en cet abandon douloureux dans cette position torturée, dos au public et renversée en arrière, écartelée, jambes ouvertes et haletante. Un solo plus construit que ce qu'on avait vu auparavant, ménageant quelques apaisements, alors que le le regard osait enfin cette fois se montrer. 

    C'était le festival premiers gestes danse à l'espace Kiron, c'était un peu Buto et on peut voir les mêmes danser demain (mardi), et puis encore le soir d'après.

    Et Sosana Marcelino reviendra -plus longuement- fin mars au Kiron.

    Guy 

  • Blanka était là

    Les vrais gens étaient là, enfin. Dans la salle des fêtes de la mairie du XIX° arrondissement. Décorée de faux marbres et de dorures, trompes-l'oeil champêtres et colonnes antiques, chaises en plastique, jus d'orange et nappes en papier.

    Avec sur la scène une artiste vivante, contemporaine, et des vrais gens pour la regarder, les mêmes gens que l'on voit au bistrot, dans la rue, au marché, et dans les salles des fêtes justement, toujours devant le buffet, mais alors avec vaguement l'air de se demander s'ils sont là à leur place. Les gens à qui il ne viendrait jamais à l'idée d'aller dans une salle branchée et parisienne, telle la MC 93 à Bobigny par exemple. Les gens à qui nous ressemblons peut-être avec leurs rides, leurs mentons et leurs casquettes, leurs lunettes démodées, leurs enfants et leurs camescopes, leurs fringues en solde, et leurs kilos en trop.

    A la différence de Blanka,princesse d'europe de l'est aux yeux fous, maquillée de noir jusqu'aux lèvres et vetue de blanc flou, tissus et cheveux flottant autour d'une présence fébrile et squelettique, toute droite sortie du bal des vampires. Blankaqui s'autoproclame poète folle, danseuse, chanteuse, actrice, modèle, performeuse, journaliste, musicienne, rien de tout cela à la vérité mais un peu de tout quand même, tant mieux pour l'audace et tant pis pour les cases et les règles.

    Tant pis pour la technique aussi, pour toutes les techniques méprisées avec la désinvolture de la beauté: deux accords de guitare répétés en boucle pour supporter les libres vocalises, puis un obscur monologue sur le mal de vivre et d'être là, dit plus tout à fait en polonais, et pas encore en français vraiment, enfin une danse qui se moque de la virtuosité pour emprunter au flamenco quand Blanka tourne, au buto quand Blanka tombe, une danse parfumée de sensualité mortifère- robe raccourcie en jupe à coups de ciseau par le complice- pour s'achever en une immobilité de plusieurs minutes, de quoi perturber tous les gens, vrais ou pas.    

    Juste ce qu'il fallait pour être poète dans cette salle des fêtes, ouvrir un peu cet espace froid vers un ailleurs rêvé, et mériter quelques applaudissements des vrais gens.

    C'était "Dis-moi, Ophelie crie moi... Ophelie!" de Blanka, dans le cadre de la "fête des urbanités", dans la salle des fêtes de la mairie du XIX° arrondissement.

    Guy

  • Avec Maki Watanabe, Marteau Rouge casse ses jouets

    On continue, porté par les encouragements de Florence, mais comment rendre compte de ces souvenirs, d'hier déja?

    medium_06_10_04_Maki-22.2.jpg

    Surtout de ces souvenirs- là, d'impressions que ne soutenaient dans l'instant d'alors aucune narration, de sensations à prendre ou à laisser. Qu'a-t-on vu et entendu? Sûrement pas un groupe accompagnant une danseuse, selon un scénario préétabli, ni une danseuse de buto improvisant sur une musique qui lui aurait été imposée. Les territoires semblaient plus incertains, plus poreux: par sursauts Maki Watanabe hurlait sa plainte, et les musiciens de Marteau Rouge faisaient le spectacle également, se donnaient à voir autant qu'à entendre: gestes délicats et puissants, spectaculaires à dessein du percussionniste (Makoto Sato), posture introvertie du guitariste -(Jean François Pauvros) arquebouté sur l'instrument, le visage caché en avant sous tignasse, position du clavieriste (Jean Marc Foussat)en savant fou, plus qu'inquiétant, triturant des machines dont débordaient des câbles par dizaines. Imagerie d'une mythologie somme toute classique: celle de la possession du musicien par la musique.

    Yeux fermés un triangle musical, une figure riche et idéale, celle de la liberté collective, du risque et de l'improvisation (On a un peu peur d'employer ce dernier mot trop fourre-tout, car il faudrait s'attaquer à l'expliquer). Longs développements, un seul par set. On pourrait appeler le résultat du free jazz, peut-être celui qu'a laissé Coltrane derrière lui au bout de sa course, version bruitiste, versant electrifié. Cela évoque aussi, entre mille autres choses, les moments les plus bruts de King Crimson, époque "Red" justement.
    podcast

    Maki Watanabe est vêtue de noir et ample, seuls le ventre et le visage découverts. Plus qu'un détail: car l'attention se focalise dés lors sur l'économie générale de ses mouvement-sur le corps en son entier-, et sur son visage, extraordinairement expressif soudain. Méconnaissable de blanc, expressif jusqu'à l'effroi, inhumain, trop humain. Quant à cette économie, elle se caractérise plutôt par une dépense contrôlée mais généreuse, à envahir furieusement tout l'espace autour d'elle, sans compter.

    Double improvisation, et faire l'expérience de l'improvisation de l'un nous fait ressentir et comprendre différement l'improvisation de l'autre. A l'exact opposé du "n'importe quoi": il faut obligatoirement maîtriser la technique, toutes ses règles, avant de les transgresser. Connaître ses arpèges sur le bout des doigts avant d'attaquer la guitare du tranchant de la main, ou à l'archet. Dans le trio toujours l'un des instruments-et pas toujours le même- reste dans la structure, afin de permettre aux autres de s'en affranchir. De ce contraste, de cette rupture, naît l'inquiétude et l'excitation.

    Maki Watanabe en offre l'équivalent visuel, surprenante de discipline mise au service de la liberté, de violence, de medium_photo_Maki.jpgrapidité, de justesse. Surtout surprenante tout court. Il y a dans ce qu'on voit matière à 10 soli, sans cesse interrompus, sans cesse repris. Portée par la musique de Marteau Rouge, la danseuse ne tombe pas dans le piège de l'imitation, de la simple transposition du rythme. Elle danse en contre-chant, s'unit à eux dans l'esprit plus que dans la lettre. La musique et la danse investissent tout l'espace des possibles en terme de rythmes, de timbres, de structures, de climats, d'humeurs, de volumes.

    Marteau Rouge casse ses jouets, et maltraite les instruments, Maki Watanabe avec eux met son propre corps en jeu, sans calcul ni prudence. C'est la morale du jouet selon Baudelaire,cet objet détruit, dé-construit, éventré, disséqué, pour l'éclairer du dedans, ici la note ouverte à vif pour en faire jaillir une vérité neuve, et le geste arraché au corps, démarche furieuse et psychanalytique

    C'était Marteau Rouge et Maki Watanabe à l'Olympic Café, au coeur de la goutte d'or.

    Guy


    P.s; On pourra voir Maki et d'autres aux Voûtes, dimanche soir

     

  • Transit: retour aux sources

    Vendredi soir dernier l'Espace Culturel Bertin Poiréefaisait cave pleine (pour ceux qui l'ignoreraient, Bertin Poirée est une enclave nippone au coeur du Paris bobo). Et peut-être même que parmi les spectateurs il n'y avait pas que des danseurs de buto. C'était au moins avéré s'agissant de cette jeune femme à la candeur bienvenue, qui demandait à l'entracte à un chorégraphe au français hésitant quelle histoire racontait au juste la danseuse prostrée au début de son solo, ou si elle cherchait quelque chose qu'elle aurait perdu par terre avant.

    medium_Cinzia_et_Cecile_-_Buto_18_1.jpgMais pour un public "initié", ce solo, celui de Cinzia Menga évoquait ce que l'on peut habituellement voir de sincère et de bon niveau dans cette même salle. Une performance à tout point de vue dépouillée, mis à part les "Grains de Sable"répandus sur le tapis de scène. Dans tout celà le plus original était le corps en lui-même- car c'est de corps dont il s'agissait avant tout, un corps proche de la nudité, un corps aux formes réinventées par la lenteur toute hypnotique des mouvements. Ce corps offrait en premier lieu juste un peu plus de rondeurs que celles que les danseuses s'autorisent généralement. Cela suffisait, exascerbé par le contexte, pour qu'il en devienne charnel à l'extrème. Surtout c'était un corps occidental, et non pas japonais, et sur les mêmes gestes notre regard en était changé.

    Le buto est né bruyamment il y a bientôt 50 ans, au Japon mais fruit des amours illégitimes et passionnées de forcesmedium_1er_fragment.jpg culturelles issus de divers points du globe, et de diverses disciplines. Juste retour aux origines, il est passionnant de voir aujourd'hui en France, aux cotés de Moeno Wakamatsu, de Maki Watanabe, Gyohei Zaitsu,de Yuko Ota, pour n'évoquer que la dernière génération(la 4° ou la 5°, mais on arrêté de compter), des artistes venus d'autres horizons, tels Camille Mutel, Inbal Fichman, Regina Georger, Moh Aroussi , Noura Ferroudj, Céline Angèle, Maléna Murua, Cécile Raymond...

    Ces trois dernières danseuses, de la même compagnie Transit, assuraient la seconde partie, et créaient la surprise. Un ouragan radioactif semblait avoir dévasté, durant l'entracte, la salle de spectacle, envahie désormais de divers reliefs de la société de consommation: sacs plastiques, canettes vides- ne manquait que le polonium 210. Espace habité par trois mutantes, primitives ou post industrielles, pitoyables survivantes de cataclysmes intimes ou planétaires, enlaidies, hagardes, gémissantes, habillées de rebuts en "Fragments", maquillées de projections vidéo et de sons en direct. Elles se tordaient, rampaient, déambulaient imprévisiblement, frayaient leur voie à travers les grappes d'un public privé de sièges et de tout point de repère, pour créer les nouveaux chemins de la laideur et de la beauté.

    Nous étions un peu bousculés, au propre et au figuré, pour regagner ainsi un peu de liberté d'esprit, ce qui n'avait pas de prix.

    C'était la Compagnie Transit, Bertin Poirée.

    Guy

    P.S. : et Kazuo Ohno a eu 100 ans, le 27 octobre dernier.

    P.P.S. du 25/2: On a rajouté, avec l'aimable autorisation de Transit, 2 photos (signées Estelle Fenech) de cette soirée.

  • Môh Aroussi: buto schubert ?

    S'agissant d'art, faut-il tout essayer? C'est nécessaire, vital, salutaire, courageux évidemment. 

    Pour autant, Schubert et le buto sont-ils fait pour se rencontrer? Le seul moyen d'en juger est de voir "La jeune fille et la Mort".

    Mais le dialogue a-t-il seulement lieu? Est ce art organisé d'un coté, et organisation du chaos de l'autre? Deux émotions qui s'ignorent? Pourquoi se surprend-t-on à ressentir que les moments les plus remarquables ceux qui sont "en marge", des moments incertains, tel celui où Moh Aroussi- au physique si remarquable- tombe, tombe et retombe encore, tel celui, interminable, où sa partenaire emmêle d'un peigne ses cheveux? Schubert est un peu oublié, et la musique également, à l'exception des ponctuations libres, et précieuses alors, du seul violoncelliste? 

    C'est "La Jeune Fille et La Mort" tous les mercredi jusqu'à fin décembre, par le Quatuor Bedrich, Moh Aroussi et Valentina Miraglia, à l'Espace La Comedia.

    Guy

  • Inbal Fichman: buto casher?

    "Je suis Japonaise", dit-elle...

    Pourtant Inbal Fichmanest israelienne. Même quand elle bride les yeux, en quête d'un ailleurs, d'une nouvelle identité.

    Mais israélienne en premier lieu, de tout cet héritage, pas vraiment facile à porter. En témoignent ces symboles qui marquent la peau: l'étoile de David d'abord, mais d'autres aussi qui évoquent les drames indicibles. Il faut alors solliciter toutes les ressources de la danse, du buto, du mime, du chant, du théâtre d'objet, pour traiter le sujet, ainsi mis à distance, et rendu supportable, d'une transformation à l'autre, en en gardant intacte l'émotion.

    C'est évidemment passionnant. c'est inévitablement étrange, c'est bien sur émouvant. Peut-être sommes nous tous des juives nipponnes dansant à Paris, déchirées entre notre passé, notre vecu et notre imaginaire. Essayant de nous rappeler qui nous sommes, et attirés par l'Autre et sa culture, dans les salles de spectacle en premier lieu.

    C'est à l'Espace Falguière, jusqu'à mi novembre.

    Guy