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Un Soir Ou Un Autre - Page 36

  • Fans de nus ? (réponse tardive à "l'épiphanie du nu" de Jerome Delatour)

    Des silhouettes féminines se laissent deviner derrière les rideaux, par morceaux, évaporées dans les rumeurs de la ville. Des chairs floues, déformées, précisées en un lent dévoilement, puis par un brusque éblouissement… Nu absolu: la couleur est annoncée. C'était le cas pour la performance présentée aux plateaux de la biennale il y a quelques mois. Et c’est toute la force et tout le problème de la proposition, un traité du nu en six études…

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    Sur le sujet du nu en général, je ne partage pas tout à fait l’analyse sociétale de mon ami Jérome Delatour (dans sa- trop rare- chronique à lire sur Images de Danse). Dans notre espace public, sur les écrans, les plages, les pelouses, les affiches, les corps me semblent plus que jamais (1) s’épanouir sans complexe, il est vrai à la concession prés du cache-sexe. Et c’est peu de dire que, dans l’espace du spectacle vivant, l’interdit est depuis longtemps tombé (disons depuis plus ou moins 68), ce qui reste toujours reçu diversement selon le contexte et le public. Il n’en reste pas moins que la nudité, quand elle se manifeste dans ce contexte, est rarement anodine ou innocente, d’une force qui ne se laisse pas épuiser…et surtout toujours un peu suspecte d’être instrumentalisée comme simple procédé de séduction, d’aucuns diraient de racolage. A bien les écouter on entend que les artistes sont loin d’être les derniers conscients de ce levier ou de ce risque…. On cède soi-même un peu à cette logique en partageant ici les photos prétées par la compagnie… Il faudrait toujours, dans les propositions concernées, un geste artistique fort et évident pour permettre de dépasser la relation d’exhibition et voyeurisme qui tendrait à s’établir entre artiste et public (je repense au passionnant Magical d’Annie Dorsen et Anne Juren): avec Who too d’United-C, c’est  parfois mais pas toujours le cas.

    En intégral et six chapitres, la nudité ne se laisse pas oublier, à l’avant plan. Fil rouge des propositions: cérébrale, sexuelle, académique, naturaliste, c’est selon. Il est en premier abord dérangeant, mais à la réflexion rassurant, que ces parties prises ensemble ne semblent pas pour autant former un tout homogène, l’inattendu dépassant parfois le parti pris de départ. Pour lire des impressions mieux ordonnées, on se reportera encore à Images de Danse. Je rejoins Jérome pour mettre à part des autres deux scènes qui s'en distinguent par la singularité du point de vue adopté.

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    D’abord Am I big, solo que je vois concentré sur la conscience de soi, matérialisée en monologue parlé. Pièce gorgée d’angoisse et traversée de panique, la femme saisit sa chair par poignées, tyrannisée par les normes. Puis Photograph, pièce dominée par la conscience des autres, la conscience du public. Les deux jeunes femmes sont assises immobiles et de coté sur des fauteuils, sexes dérobés à notre vue. Notre regard est interrogé par leur inactivité, trompé par des gestes d’une l'extrême lenteur. Est ce un défi, un refus, une lassitude? Une femme habillée vient, qui les détaille, nous regarde. Concession à notre attente, des mouvements des mains des danseuses immobiles annoncent d'imperceptibles affaissements, jusqu’à, enfin, la chute.

    Les autres pieces sont gagnées en commun par la violence des mouvements. Circulaires, répétés, urgents et traversés d’énergie. L’exécution d’une pièce à l’autre est inégale, mais c’est cette brutalité partagée et première qui gagne mon intérêt, cohérente avec la charge visuelle du nu, tout en parvenant par moment à s’en échapper. L’âpreté des gestes contraste avec la vulnérabilité des corps des danseuses, étourdies et étourdissantes. L’une d’entre elle évoque un archétype juvénile de Cranach, c’est de saison. Les soli se transforment en ensembles, entre décharges et temps lents, de la transe à l’unisson, sous le regard sévère et intermittent d’une femme habillée, qui semble jeter sur ce spectacle un regard sévère et distancié du haut de siècles de civilisation, pour jauger et accuser. Des mouvements incessants tournoient à contre jour. La fureur ou la frustration manifestent, s’épuisent en chutes, les jambes rougissent et la peau marque. Dans la mise à l’épreuve de l’interprète, on approche quelque chose de l’ordre de la performance, aussi vrai que la chair dévoilée. Si les corps présentés en eux-mêmes ne laissent plus rien imaginer, les gestes font deviner les tempêtes qui les agitent en dedans. Avec détermination, La danse apparait ici tout sauf sophistiquée: frustre et corporelle à un point qui peut troubler, voire susciter le rejet. D’un dépouillement entêté, l’énergie travaille le sujet jusqu’à l’épuisement, pratique une politique de terre brulée. C’est à prendre ou à laisser.

    Guy

    C’était Who Too d’United C, présenté en Mars à Vanves au festival Artdanthé

    Photo de Van Der Put avec l’aimable autorisation de la companie

  • Square Caulaincourt-2

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    Gyohei Zaitzu- Square Calaincourt Paris- lund 11 avril 2011 14H30

  • Voir, Jouir.

    Au commencement les gestes et voix flottent, obscurs, rêvés…  A rappeler les belles images des Murènes- la pièce précédente de la compagnie. Mais vite, une autre direction est prise: primauté au texte de Racine, implacable et linéaire, qui structure le récit sans répit. Autour de cette ligne de force, les images se fragmentent. Elles nous piègent au cœur du sujet: l’obsession du pouvoir, au point où la vérité se dissout et où s’assèche l’humanité. Les vers s’écoulent clairs et nets mais le rêve du pouvoir désincarné devient aussi onirique qu’en cauchemar.

     

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    La première des réussites est ici de conjuguer intelligence et intelligibilité : ce Britannicus abrégé en quelques plans rapprochés, concentré en 1H30 et 5 acteurs, se laisse saisir sans difficultés, et dans ses implications contemporaines. Le pouvoir jouit ici de voir, non de toucher. Néron exsangue manipule à distance ses pantins prisonniers de l’œil de la camera, agités et impuissants: une Junie charnelle et frémissante, un Britannicus physique, impétueux…. Les jeux et voix sont matures et bien ajustés. Dans cet espace concentré, les corps de ceux qui prétendent vivre libres ne peuvent échapper pas aux regards de ce nouveau docteur Mabuse. Ils n’échappent non plus à l'avidité de nos yeux, autant en chaleur et proximité que les vers de Racine s’élèvent vers l'esprit avec distance et hauteur. Le souverain entend tout et en dit de moins en moins, la possession maladive tenant lieu de passion, l’homme n’est rien et sa puissance ne se nourrit que de rester mystérieuse. Toute ressemblance avec le règne de souverains pas si lointains et informés de tous les secrets ne serait que le fruit de mon imagination. Dans l’ombre du palais se glissent les conseillers et visiteurs du soir, qui tissent des intrigues à tiroirs, au fil d’alexandrins qui scandent l’histoire sans espoir de retour.

    C’était Britannicus plans rapprochés de Racine m.e.s. par Laurent Bazin, à la loge, jusqu’au 19 mai.

    Photos de Svend Andersen avec l’aimable autorisation de la loge

  • Demain vendredi

    LE 29 AVRIL A 18H00 , "UNE ATTRACTION INVISIBLE"

    NINA DIPLA A LA MENAGERIE DE VERRE

    "SPECTACLE DE SOLIDARITÉ AU JAPON" ,10E ENTRÉE. LA RECETTE DE CETTE ACTION IRA À LA CROIX ROUGE.

     

    lire aussi ici

     

  • Square Caulaincourt

     

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    Gyohei Zaitzu- Square Calaincourt Paris- lund 11 avril 2011 14H30

     

  • La performance n'est plus ce qu'elle était

    Les temps ont changé. La performance est-elle déjà un art daté? La performance était-elle un art? Qu'était-elle? Comment la perpétuer? Les faits: Martha Rosler, Marina Abramovic et d’autres femmes, il y a quarante ans, jetaient leurs corps en jeu. Les mobilisaient jusqu’à la blessure pour ébrécher par chocs et assauts kamikaze les fausses évidences. Re-évidence: la société a changé depuis, tout sauf comme on s'y attendait, en arrière, en avant... Les aspirations féministes également. Si tout est joué, reste à ré-interpréter à la lumière du monde d'aujourd'hui. La relecture contemporaine de ces performances datées des crus 65-75, mais toujours pertinentes et impertinentes, ne provoque sûrement pas ce soir les mêmes questions qu'alors. C'est fait d'une manière très maitrisée, avec une pénetrante et fertile intelligence.


    YOKO ONO CUT PIECE par TECHNOLOGOS

    Yoko Ono (Cut piece) abandonnait ses ciseaux au public, laissait à celui ci la responsabilité de découper ses vêtements, de la dénuder on non. Ce soir Anne Juren s'exécute toute seule jusqu'au dernier lambeau de tissu, et dans cette logique va bien plus loin encore... mais il serait dommage de révéler l'illusion, sensationnelle à différents points de vue, qui suit, et ouvre sur d'autres significations. Il s'agit bien ce soir une mise en scène contrôlée, une mise en perspective, un prolongement et non une re-création à l'identique. D'une certaine manière un hommage, surtout une interrogation à deux niveaux, sur les significations que pouvait prendre la performance alors, et les implications possibles maintenant. Le public n'est donc ce soir pas invité à participer, pour des raisons techniques sûrement, mais ce choix provoque, quoiqu'il en soit, un glissement de sens, une actualisation par rapport au féminisme- bien qu'ambigu- de la performance d'origine. Ressent-on alors une libre prise de contrôle de la femme sur son propre corps ou l’intériorisation profonde d'une injonction collective, la résignation au rôle d'objet?

     

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    Tous vêtements découpés, la vérité n'est pas toute nue pour autant. Ni une évidemment. Sans nul doute, le sujet se focalise sur le corps féminin, le regard porté sur lui. Mais la forte détermination de la mise en scène, opposée aux incertitudes performatives, ne tue pas pour autant la multiplicité des interprétations. C’est heureux. Les choses ne sont pas ce qu'elles semblent, surtout la magie toujours présente. Ce n'est pas le moindre des paradoxes de cette proposition que de mobiliser ici les techniques de la prestidigitation: un art tout de même historiquement misogyne présentant le magicien surpuissant et l'assistante potiche, aussi déshabillée qu'il soit possible devant un public familial. L'illusion ici permet, fonctionnellement, de ne pas mettre le corps en danger à la différence de ce qui était le cas pour certaines pratiques performatives des années évoquées. Avant tout, la magie est utilisée dans le sens du sens: du lait est tiré de la mamelle de la ménagère modèle durant l'inventaire grinçant de ses ustensiles de cuisine (et de torture), un soutien-gorge appararait mystérieusement... Les tours sont détournés. Pour produire un effet théatral et second degré, qui accentue la mise à distance, au même titre que les autres effets kitsch, qui renvoient à l'anti-nostalgie aux années papier glacé rafraichies par la série Mad Men.

     

     

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    L'attention distraite par les leurres, les attaques surprennent d'autant. Ainsi le contraste entre les actions d’un corps conventionnel et aseptisé, baigné dans une musique d'ambiance qui nous dit "tout va bien" et le même corps qui soudain s'expose frontalement, cette fois sans artifices. Aveuglant, ce corps nu éclairé cru, chairs, seins, ventre, membres et sexe secoués jusqu'à l'indigestion sur une bande son orgasmique, obéissant aux mâles injonctions d'une chanson de Led Zep, objectivisé et le visage dérobé par un masque. Cette exposition se prolonge interminable jusqu'à écœurer tout voyeurisme possible. On n'était pas présent en 1975 pour réagir à la performance source de Marina Abramovic-Freeing the body- mais on a le sentiment que l'entreprise de libération originelle est ici détournée et actualisée vers le constat cynique de notre pornographie quotidienne, signe des temps.

    Autre remise à niveau insolente, le manifeste féministe d'origine de Carole Sheeman est recyclé sans sourciller en numéro de cabaret canaille, jouant sur connivence très vendeuse. Quoique tout autant possiblement subversif, à y penser à deux fois. La frontière entre faire et le dénoncer est mince, et renvoi, mais c'est justice, le public à son jugement, à sa réflexion. On ne voit pas, comme dans la performance de départ, un discours à lire que la performeuse semble extraire de son vagin, mais des rubans multicolores , puis des piles alcalines (comme pour faire fonctionner une poupée?)... Les questions sont posées, avec force, mordant et ironie. La proposition finit sur une belle pirouette, un juste retournement: le public à son tour est éclairé par la projection de l'œil du sexe féminin, qui le structe souverain et lumineux.

     

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    Magical de et par Anne Juren & Annie Dorsen, avec le concours du magicien Steve Cuiffo, d'aprés des performances originales de Martha Rosler, Marina Abramovic, Yoko Ono et Carole Sheemann. Au théatre de la Cité internationale, dans le cadre du programme Des-illusions.

    Guy 

     photos de Roland Raushmeir avec l'aimable autorisation du Théatre de la Cité Internationale

    Lire aussi

  • Gyohei Zaitsu danse dans la rue

     ...le lundi 11 avril à partir de 15h30, Square Caulaincourt 75018 Paris.

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    Photo Jérome Delatour-images de danse

  • Musique pour enterrements

    Juste d'abord un ou deux morceaux pour chauffer les oreilles, apres au tour des pieds... La tête loin des grisailles d'ici, dans une cité mythique, port où débarquent et copulent toutes les musiques-sublimée la vraie citée meurtrie dont ce même orchestre avait pleuré les blessures d'aprés Katerina dans une grave relecture de "What's going on". Ce soir rien que de la joie, normal pour une fanfare issue de la tradition des cortèges d'enterrements, en deux temps et trois mesures plus de vie qu'en une heure de l'orchestre trés savant de la première partie. Le marching band des débuts d'il y a 30 ans s'est coulé dans l'espace de la scène, une batterie assise malgré l'impatience a remplacé la caisse claire et la grosse caisse jouées debout à la main, une guitare vient colorer les harmonies de funk et de blues électrique, la rondeur et la souplesse de la colossale basse à vent ancre le son en arrière et le rythme en avant. Les vétérans bedonnants et en survet trompent leur monde , font front devant, deux sax et deux trompettes. Il jouent dirty et à pleines dents, à leur tour de nous faire tous lever, sauter en l'air, nous apprendre à défiler de manière tout sauf militaire, à coup de riffs déchirés par des contre-chants insensés et soli généreux. D'abord un bref tour de parade improvisé collectivement dans les rues de la Nouvelle Orléans, juste le temps d'un hommage aux temps d'Armstrong, ensuite un détour calypso destination caraîbes au large. Puis il est temps de mettre un peu de free dans le dixiland, sans hésiter à mélanger les genres, par fusion dans le chaudron bouillant de la great black music, du be-bop au hip-hop, avec James Brown, les Rolling Stone et les Meters. Sans peur de surjouer, entre suraigus de ténor et eructations de baryton, toujours au bord de dissonner, l'exces exubérant. Les dirty old men font monter malicieux les jolies filles sur scène pour danser, veillent qu'en bas la température ne cesse de monter. Le bonheur, c'est de pouvoir faire des trucs idiots pendant une heure, beugler Fire on the Bayou, sauter trés haut, lever les bras, avec eux, nos pieds ne peuvent nous tromper... Do the mokey.

    C'était le Dirty Dozen Brass Band, (Roger Lewis - Saxophone Baryton ; Efrem Towns – Trompette, voix ; Kevin Harris – Saxophone ténor, voix ; Gregory Davis – Trompette, Voix ; Jake Eckert – Guitare, Voix ; Michael Foster – Sousaphone ; Terence Higgins – Batterie, Voix), à l'Espace Prevert d'Aulnay sous bois, dans le cadre du festival banlieues bleues.

    Guy

     

  • On n'a pas sonné

     

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    Revolver, corde, matraque, poignard, chandelier, clé (évidemment) anglaise... Sur scène c’est toute l'artificialité glacée d'énigmes sans réponses possibles, jouées au milieu de nowhere par des personnages vêtus tout de noir et blancs, inexistants, dans un univers U.K. absurde et désincarné tels que ceux théorisés par François Rivière. Comme dans un théâtre de marionnettes…paradoxalement très vivantes: le texte blanc d'Ionesco se laisse traverser de terribles éclats et éclairs, cette belle troupe s’y connait en humour noir. Les corps sans causes dansent et se révoltent, tendus comme des arcs, drôles et terrifiants, avec des silences lourds et des regards féroces, d’inexplicables colères. La logique est hachée menue par le nonsense, la conscience de soi et celle des autres réduite au néant, les mots vides mais les voix pleines, en couleurs. Chaque instant d'absurdité est ce soir habité avec une exceptionnelle intensité: c’est qu’il faut vivre quand même!

    C'était la Cantatrice Chauve d'Eugene Ionesco, par la compagnie InfraKtus à l'Aktéon pour encore plus trop longtemps.

    Guy

  • Au crepuscule

    Déja habitué à Rambert, on est quand même toujours surpris par cette approche d'une simplicité étudiée: la nonchalance affectée de l'interprête, qui se change sur scène et semble venir créer la pièce sans plans préconçus, la présence sur plateau plutôt nu des inévitables accessoires post-modernes: mac noir et iphone blanc...

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    Impossible de ne pas reconnaitre immédiatement les accords de knockin' on heaven's door ,la première de trois versions, c'est le thême ici imposé. Tamara Bacci, souvent vue chez Cindy Van Acker, l'air de rien danse en réponse, s'essaie, bascule entre verticalité et horizontalité étirée, d'une pureté géométrique appuyée (jusqu'au tic?), avec une aisance de contorsionniste. On cerne peu à peu le sujet: le rapport entre le metteur en scène et la danseuse, son désir, ses attentes. Le metteur en scène est absent mais omniprésent, sur l'écran de l'ordinateur, voire symboliquement en la guitare, instrument rock' roll mâle par excellence. La danseuse lui parle, propose ses mouvements, joue pour lui, évolue dans l'oeil de sa webcam. Répétée, déclinée, accélérée la danse prend, le geste juste s'impose. On réussit etonnament à s'inviter dans ce duo qui surprend (avec une brêve pensée navrée pour les journalistes, presse trop spécialisés qui persistent à s'interroger sur la juste part de danse ou de théatre dans le prochain festival Avignon). Tamara Bacci danse la guitare, soulevée entre ses jambes, joue du feed back, fait l'amour à l'ampli Marshall. Sans commentaires et au second degré, décliné ensuite en masque et cagoule.

    L'essentiel n'est pas là, loin de là. Dans la même salle se jouait il y a un an un beau duo chorégraphiée par Pascal Rambert,Libido Sciendi, avec Ikue Nakagawa et Lorenzo De Angelis, autour du rapport amoureux. Cete piéce était déroutante, troublante, à un point tel que mes tentatives d'écriture sur le sujet étaient restées vaines. L'ambition de Libido Sciendi était de suspendre l'instant de la rencontre nue du couple du début de 'A., faire durer une éternité ce moment. Surtout, pourtant, cet instant était crépusculaire, littérallement, juste alors éclairé par une ouverture dans le toit du théatre de Genevilliers. Inexorablement la nuit tombait, emportait le temps, la lumière et les regrets, jusqu'à l'obscurité. It's getting dark too dark to see, chante Bob Dylan, dans knockin' on heaven's door, écrit pour le film tout aussi crepusculaire de Sam Pekinpah, chaque fois que les yeux d'un des personnages se ferment à jamais. Le désir de faire durer encore des moments simples et au bord de mourir, peut-être tout l'art de Rambert ne tend qu'à celà, tout simplement...et c'est trés important

    C'était Knockin' on heaven's door de Pascal Rambert avec Tamara Bacci , présenté avec (en alternance) Obvie, Lanx, Obtus et Nixe de Cindy Van Acker. au théatre de Genevilliers.

    Guy 

    photo par Isabelle Meister avec l'aimable autorisation du théatre de Genevilliers