Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

mc93

  • Lettre à la MC 93

    Paris, le 7 octobre 2008

    Bonjour
     
    Je n’aime pas les pétitions et je ne connais pas Patrick Sommier.
    Mais je connais la MC 93, pour y aller souvent voir des spectacles, de théâtre ou de danse, de Shakespeare à Copi, contemporains ou de répertoire, français ou étrangers, qui m’enthousiasment ou m'irritent, mais qui toujours me font réagir.
    J’y ai vu s’y rassembler des publics divers mais qui n’en formaient qu’un: des jeunes et des vieux, des parisiens et des locaux, des candides et des initiés.
    J’ai tenu à lire attentivement le projet mis en ligne par le ministère avant de me manifester. Je n’ai rien trouvé dans ce projet de convaincant ni sincère.
    L’Etat et les collectivités locales déclarent s’inquiéter du devenir de la MC93. C’est sûrement leur droit et leur devoir, mais s’il y a réellement «une baisse de régime » qu’ils cherchent des solutions avec vous!
    J’ai donc le plaisir de vous apporter mon soutien de spectateur.
     
    cordialement
     
    Guy Degeorges, spectateur et bloggeur (Un Soir Ou Un Autre
    )
    PS. : Nous nous sommes fait l’écho de ces événements, sur Un Air De Théâtre.

    Pétition sur le site de la MC 93

     

  • Neuer Tanz: Rien de Neuf

    Il y a de plus en plus d'artistes sur toujours les mêmes scènes pour à peine plus de spectateurs, chaque semaine une nouvelle chaîne de télévision pour diffuser des rediffusions, et jour et nuit du bruit partout, des dégueulis d'information en ligne pour copier/coller les mêmes rumeurs et/ou communiqués mille fois répétés et cent moins souvent vérifiés, des gratuits dans le métro avec des articles de cinq lignes et des journaux payants- au bord de la cessation de paiements- qui ressemblent de plus en plus à des gratuits, des contrôleurs de gestion qui formatent les f_239.jpgnouveaux produits culturels les yeux dans les yeux des hommes de marketing eux scrutant à coups de sondages quotidiens l’âme d'un public sous influence des publicitaires, et dans les librairies deux fois plus de nouveaux titres chaque année qu'il y a trois décennies et toujours un peu moins de livres vendus (sauf le goncourt qu'on achète pour ne pas le lire). On dit, en riant jaune, que les seuls encore à vivre décemment de leur metier dans le monde de l'édition sont les transporteurs, qui chaque semaine livrent aux libraires de pleins camions de nouveautés et en remballent autant d'invendus: c.a.d les nouveautés livrées le mois d'avant et à peine sorties des cartons.

    Pendant ce temps, les dix de Neuer Tanz déballent des centaines de livres pour les disposer sur le sol, jusqu’à pleine occupation du terrain. Avec méthode et frénésie. Pour dessiner au pied de la lettre le vide ou le trop plein d'un paysage culturel désespérant? Ou illustrer littéralement le dicton, selon lequel moins on a de culture plus on l'étale? C'est en tous cas rien de plus que cette activité qui est donnée à voir, ou- pire encore- ce qui en découle en terme de variations chorégraphiques, répétitives jusqu'à l'écoeurement. L’espace visuel est envahi de signes inintelligibles, livres qui jamais ne seront lus. L’espace sonore saturé d’une techno roborative, superposée sur dix platines. Les manutentionnaires y posent à tour de rôle une note de trompette, dos au public façon Miles Davis dernière manière, plus préoccupé de tendances que de musique. Les va-et-vient des personnages dépossédés, sourires figés, entre livres et cartons se transforme en pas de danse sans sens, qui gagnent leurs voisins par contagion. Ce qui est tristement posé est l’impossibilité de l'identité. "I don't want to be anybody" chante l'un avant de ressembler aux autres. La singularité est une maladie mortelle, qui lorsqu'elle fait à terre une victime fige un instant la communauté dans l'effroi et le silence. Mais une femme fatale agonise dans l’indifférence générale, le temps d'une pause sur un mode piano-bar.

    L'exposé est implacable, et tout autant indigeste. Ceux qui avaient trouvé le temps long durant la pièce d'Arco Renz tout à l'heure ne connaissaient alors pas leur bonheur. Arrive enfin le moment où tous les livres sont déballés, la scène entière envahie. Alors le vague espoir d’une sortie du purgatoire. Que quelque chose de vrai survienne. Un commencement. Mais les dix entreprennent aussitôt de tout remballer dans les cartons, tout aussi systématiquement: on prend la triste mesure du temps qui reste, autant qu'on a déja enduré. La démarche tient de l’acharnement. On repart comme aprés avoir subi la fastidueuse démonstration de faits dont on était d'avance convaincu.

    C'était Das Chrom + & Du, de VA Wôlfi (Collectif Neuer Tanz), à la MC93 de Bobigny, avec les Rencontres Chorégraphiques Internationales de Seine Saint Denis.

    Guy

    photo du site des rencontres chorégraphiques

  • Arco Renz: 80 minutes

    Les néons fluctuent, installent une ambiance très David Lynch. Une manière comme une autre d'abolir le déroulement du temps, avant toute chose. Puis, lumières, et deux danseuses, deux présences douloureuses et crispées, en post-nuisettes transparentes, qui peinent à exister et s'étirent bras tordus. Deux secondes et on a compris: ce sera de la danse organique. On devrait donc aimer. De même qu'on aime Cindy Van Acker.

    Sauf que c'est long.

    C'est beau, mais c'est long.

    C'est même très long.

    Les lumières flottent, la musique aussi. Les danseuses jouent chacune de leur coté l'allégorie de la naissance. On pense à deux poussins qui émergeraient de leur coquille. On trouve ça très buto, mais c'est sûrement personnel. Si quelqu'un prend des photos, elle seront splendides. Deux, trois spectateurs votent avec leurs pieds. Beaucoup plus se plongent dans la performance yeux fermés. Des sons craquent. Pour tromper la temporalité, on relit le texte de la feuille de salle. Les textes des rencontres du 9-3  (signés Gilles Amalvi) sont bien écrits cette année. C'est suffisamment rare (s'agissant de textes pour des feuilles de salle) pour être relevé. Un peu nourri par ces lignes, on recherche de l'oeil des enjeux, jusqu'à guetter au ralenti et au raz du sol les correspondances qui se jouent dans ce faux duo....

    Bref, c'est long.

    _u4n0240.jpg

    Jusqu'à ce qu'une stridence ne réveille tout le monde. Bien joué. Mélanie Lane est en position d'attaque, vive et révoltée. Très princesse guerrière. L'image évoque une affiche de film de science fiction, ou une couverture de comics. Elle bombe le torse, part et s'envole, belle et altière. On aime. On ne sait pas si on aurait autant aimé si l'on ne s'était pas autant ennuyé avant. Puis des ruptures et des interactions entre les deux danseuses: on décroche à nouveau. Suit Lisbeth Gruwez, en solo. Plus sauvage, voire féline. Remarquablement âpre, singulière. C'est plus original, on reste plus à distance. Pourquoi? L'amour ne se commande pas.

    C'était Il2, d' Arco Renz, avec Lisbeth Gruwez et Mélanie Lane à la MC93 de Bobigny, avec les Rencontres Chorégraphiques Internationales de Seine Saint Denis.

    Guy

    Photo de Mélanie Lane avec l'aimable autorisation de Vincent Jeannot- Photodanse 

     

  • Alban Richard: passage au noir

    Ils font leur entrée sur le plateau en courant, cinq ensemble, déjà en état d'urgence. Est ce pour cela que l'on ressent, spontané, comme une évidence, le sentiment d'assister à un évènement fort et singulier? État de chocs. Direct. Sans ménager de montée en puissance. États émotionnels soulevés comme par une vérité aveuglante et corps déjà projetés au paroxysme, comme par électrochoc. Notre réflexion vient après, si elle peut jamais. Mais pour l'instant juste quatre minutes trente, car alors ils repartent en coulisses, nus encore, toujours au pas de course. Et, quelques secondes plus tard, reviennent: répétition de la séquence.

    133470479.jpg

    Et de nouveau les mêmes, trois femmes et deux hommes, sur les mêmes territoires qu'ils s'échangent sans se rencontrer, par mêmes séquences succédées de mêmes durées: pour chacun courses, stupeurs, bonds, brefs états de beauté-ou d'hébétude?-, courtes langueurs, reptations, évanouissements, brusques retours à la conscience, étirements extrêmes, rebonds nerveux. Furieuses recherches d'état d'équilibre, rompus, ou réactions incontrôlées à d'indicibles émotions. Au pluriel. Cinq trajectoires qui d'évidence souffrent, combattent l'invisible, fragiles et instables, mais comme molécules qui pourtant s'ignorent, concentrées sur elles-mêmes: c'est un tourbillon d'essayer de les suivre en ensemble. Et surgit l'évidence de ressentir beaucoup de ce que le buto fait naître souvent, ici développé avec de tout autres moyens de danse. Ces poses dans le sensible font basculer la complète nudité du coté de la vulnérabilité et de l'émouvant. Les corps sont "vrais". S'exposent premiers et entiers, sans apprêts ou intentions. Jeunes ou peut-être un peu moins déjà, l'important est que cela n'importe plus vraiment. A chaque variation de la séquence initiale de quatre minutes trente, la charge émotionnelle rompt ouvertes toutes voies aux interprétations métaphoriques.

    785704446.jpg

    Mais d'une répétition l'autre, dans les luttes s'épuisent les corps, les lumières se rassemblent au centre et faiblissent, les mouvements se ralentissent pour changer de signification, peut être vaincus dés le début. La musique qui se décharge en flux compacts est trop brouillée pour y accrocher des repères. Cette répétition ad nauseam signifie-t-elle enfermement? Une lutte perdue d'avance? Effets de traumatismes inscrits premiers dans la mémoire immédiate, mais jamais surmontées par la raison ou la volonté, de récurrences en récurrences? Séquences après séquences, de départs en retours, les corps se laissent occulter de pièces de tissu, comme par l'effet d'une contagion par le noir. D'abord tuniques courtes et incongrues qui laissent culs nus ou poitrines découvertes, puis vêtements complets qui étouffent plutôt que de protéger, ensuite robes comme cléricales aux étoffes qui se froissent, enfin pour le pire visages masqués. Les lumières meurent vers le crépusculaire, absorbées par un noir funèbre. Agonies solitaires qui s'agitent encore, presque aveuglées, engourdies par la paralysie. Faute- imagine-t-on- qu'il n'y ait jamais eu rencontres entre eux, qu'ils puissent résister ensemble. Le noir englue. Survivent les faibles ombres des mouvements du début. Seuls survivent les souvenirs de leurs gestes qui agitent les robes noires et raides.

    1062856299.jpg

    C'était la création d' As far as d'Alban Richard-Ensemble l'Abrupt avec Cyril Accorsi, Mélanie Cholet, Max Fossati, Laurie Giordano, Laëtitia Passard, lumières de Valerie Sigward, musique de Laurent Perrier, à la MC93, avec les Rencontres Chorégraphiques Internationales de Seine Saint Denis.

    Guy

    Exprimez vous: vous pouvez laisser un commentaire... et/ou voter ici!

    Photos au coeur du spectacle avec l'aimable autorisation de Vincent Jeannot- Photodance.fr

    A lire aussi: Danzine

  • Simone Aughterlony: peine plancher

    Procès pour flagrant délit.

    Chef d'inculpation: tentative d'assistance à performance malencontreusement subventionnée.

    Verdict: coupable.

    Condamnation: 16 € d'amende et 50 minutes de reclusion.

    1. Fausses entrées de Simone Aughterlony: 10 minutes.
    2. Simone Aughterlony et Thomas Wodianka récitent debout un dialogue à propos d'une performance fictive: 15 minutes
    3. Thomas Wodianka hurle et se tord: 5 minutes
    4. Simone Aughterlony danse en trois pièces et se fait mal : 9 minutes
    5. Simone Aughterlony et Thomas Wodianka gisent: 1 minutes
    6. Thomas Wodianka bouge à poil: 9 minutes et 30 secondes
    7. Aplaudissements: 30 secondes

    Peine purgée. Libération.

    C'était Performers on Trial de Simone Aughterlony avec Simone Aughterlony et Thomas Wodianka, à la MC 93 Bobigny, en ouverture des  Rencontres Chorégraphiques Internationales de Seine Saint Denis.

    Guy

    Pour les récidivistes: extrait vidéo ici

  • Le Songe d'une nuit d'été: Un Shakespeare qui peine à faire réver

    Sept erreurs:

    1. Jouer Le Songe d'Une Nuit d'Eté en noir et blanc
    2. Utiliser un caddie de supermarché sur scène (c'est éliminatoire)
    3. Commencer trés trés lent et en trop lourdes convinences.
    4. Laisser (la remarquable) Claude Degliameen faire beaucoup, beaucoup, beaucoup trop. Dans le genre "je refais Blaise Cendrard. Alors que Marie Vialle (non moins remarquable) se laisse oublier et redécouvrir.
    5. Moderniser la langue de Shakespeare(1564-1616)-de peur de sinon ne être compris?- mais ainsi la banaliser, en vocabulaire de discothèque et de reality show.
    6. Adopter un parti pris de travestissement et d'inversion systématique des sexes. Choix assez laborieux à l'usage. Sur Don Juana, celà fonctionnait meux.
    7. Annoncer du rire, de l'Eros, du  rêve, de la jubilation, de l'ivresse dans la note d'intention... et sur scène commencer exactement à faire l'inverse, dans le décalage et la distanciation. La chair est chic, la chair est triste.

    Sans doute les erreurs types que risque un théâtre qui affiche le nom du metteur en scène en aussi gros caractères que celui de Shakespeare.  Heureusement, à la mi-temps, Shakespeare reprend l'avantage. On pourrait dire, pour être polémique, malgré tout. Au bout d'un temps avec, car en couleurs enfin, une Puck toute rousse et un Ane plus que truculent, on s'intéresse. Soyons juste: en prêchant le factice, J.M. Rabeuxfinit par toucher au vrai. L'exagération paye à la longue, le caddie finit par s'envoler aux cintres, le rimmel couler, la pièce dans la pièce se jouer en bouquet final, le grotesque se muer en poétique, comme suivant les intentions, mais in extremis.

    C'était Le Songe d'Une Nuit d'Eté de Shakespeare, mis en scène par Jean Michel Rabeux à la MC 93 Bobigny. Jusqu'à début avril.

    Guy

    On a relu après l'interview de J.M. Rabeux dans La Terrasse. Grave erreur. Plus on lit, moins on comprend. "J'ai monté cette pièce pour des raisons politiques. Je suis effrayé par ce qui se passe aujourd'hui sur le plan des moeurs"? De quoi parle-t-il ? Si quelqu'un a compris, qu'il nous écrive d'urgence. Ou on va peut être ouvrir un débat sur Scènes 2.0. Mais la réponse est peut être contenue dans la question suivante de l'interview.  "Votre relecture du Songe souffre-t-elle d'être en avance sur son temps?" Avec des questions d'une telle impertinence, tout les metteurs en scène doivent rêver d'être interrogé sur la Terrasse...

    Exprimez vous: vous pouvez laisser un commentaire... et/ou voter ici!

  • La Tour de la Défense: Daphné est completement pétée

    Hier soir, la Tour de la Défense se dressait à Bobigny. 1 boulevard Lénine, prés du boulevard Jean Jaurès, avant le boulevard Maurice Thorez.

    medium_tour_01.jpgNon, on plaisantait: cela ne se passait pas vraiment à Bobigny, ou géographiquement tout au plus: c'était plutôt à la MC93-Bobigny, qui est une enclave parisienne et bobo au coeur de la Seine Saint Denis, en compagnie d'un public dont la mixité sociale ne sautait pas aux yeux. Et, pour preuve qu'on n'était pas dans lez 9-3 pour de vrai, précisons qu'on avait acheté notre place via le Festival d'Automne à Paris.  "Parking gratuit et surveillé" nous rassurait la brochure. Alternative au Forum culturel du Blanc Mesnil qui affrète des cars pour aller chercher le public parisien place de la Nation. Mais on aurait pu être à Avignon, où n'importe où ailleurs, on était en tout cas en phase avec le contexte de la pièce: un réveillon bobo-homo de nouvel an, de l'an 1977, année disco.

    Représenté dans un décor, un vrai, splendide et sophistiqué, un décor d'appartement seventies, avec tous les accessoires, même les pires. Ce qui fait tout drôle, tant on s'est habitué au minimalisme contemporain. Réalisme plastique, et intrigue linéaire également, quasi-boulevard ou comédie policière, avec entrées, sorties, exclamations, portes qui claquent et évanouissements à répétition, mais tout est décalé. On croit entendre, en écoutant le texte de l'argentin Copi (1940 -1987) une fascination quasi-enfantine pour la langue française, peut être propre à un étranger qui apprend à la maîtriser, comme un nouveau jouet, et manie cependant cette langue avec une insaisissable étrangeté. 

    Les personnages, comme dans une recherche naîve pour appréhender la complexité de l'existence-c'est perdu d'avance-. enfilent les banalités avec medium_tour_02.jpgune drôlerie déconcertante. Presque une pré-figuration parodique des shows de télé-réalité de nos écrans d'aujourd'hui, promesses sexuelles comprises. Mais d'évidences approximatives en fausses évidences, c'est une manière imparable de nous accoutumer à un glissement très progressif d'un trash presque ordinaire vers l'absurde et l'horreur. Qui se manifestent avec les obsessions habituelles à Copi: rat, serpent, frigo et compagnie, mais aussi par de sinistres prémonitions: hélicoptère s'encastrant dans une tour en feu et enfant congelé au frigo. Soudain on ne rit plus.

    Tous les habitants du 13° étage de cette tour de la défonce sont passionnants, et entre autres Jean(Martial Di Fonzo Bo), étonnant de pédanterie et de de candide brutalité. Mais le pire viendra de Daphné, la seule femme présente, interprétée par Marina Fois, sublime et désinhibée. Daphné d'abord en marge de ce club masculin, celle dont chacun cherche à se débarrasser. Revanche morbide, toute l'action se réorganisera peu à peu autour d'elle. 

    Mais de toute manière, à la fin tout le monde meurt, évidemment.

    C'est "La Tour de la Défense" par la compagnie "les Lucioles", mis en scène par Martial di Fonzo Bo, à la MC93 Bobigny, encore pour quelques soirées

    Guy