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theatre - Page 20

  • Lisbeth, Hermione et Winifred sont dans un bateau...

    Ces trois filles là font toutes jeunes encore, mais elles ont déjà tout des grandes, et le quatrième -le jardinier- essaie brievement de danser Buto, un très bon point; on pourra tout lui pardonner ensuite. C'est au final sans reproche et sincère, juste encore un peu trop d'impatience medium_flyerlisbeth.jpgpeut-être, péché vertueux, l'envie de tout dire tout de suite, et fort, il manque juste encore un peu de silence ici et là.

    Pourtant qui va les voir chaque soir, pas loin derrière la place du Colonel Fabien? Qui va donc les voir, quand ce n'est pas l'anniversaire du technicien lumière? Les passants? C'est bien Winifred qui hier dans la rue nous a abordé pour venir voir le spectacle, trop tard on avait déjà réservé, attiré par le titre peut-être- " Lisbeth est completement pétée" -et par les yeux sur l'affiche aussi. 

    Quoiqu'il en soit, on entre et on écoute le texte d'Armando Llamas (1950-2003), une écriture excessive, violente, innocemment provocatrice, et l'on pense à Copi,en plus adulte -pourquoi? Les mêmes origines argentines? Une proximité partagée avec la mort en tout cas, qui ronge un monde gagné par une entropie croissante, ivre d'un trop plein de biens matériels et de références culturelles. Ici plus contemporaines que seventies. Mais la chanson reste la même.

    Guy

     

  • Inbal Fichman: buto casher?

    "Je suis Japonaise", dit-elle...

    Pourtant Inbal Fichmanest israelienne. Même quand elle bride les yeux, en quête d'un ailleurs, d'une nouvelle identité.

    Mais israélienne en premier lieu, de tout cet héritage, pas vraiment facile à porter. En témoignent ces symboles qui marquent la peau: l'étoile de David d'abord, mais d'autres aussi qui évoquent les drames indicibles. Il faut alors solliciter toutes les ressources de la danse, du buto, du mime, du chant, du théâtre d'objet, pour traiter le sujet, ainsi mis à distance, et rendu supportable, d'une transformation à l'autre, en en gardant intacte l'émotion.

    C'est évidemment passionnant. c'est inévitablement étrange, c'est bien sur émouvant. Peut-être sommes nous tous des juives nipponnes dansant à Paris, déchirées entre notre passé, notre vecu et notre imaginaire. Essayant de nous rappeler qui nous sommes, et attirés par l'Autre et sa culture, dans les salles de spectacle en premier lieu.

    C'est à l'Espace Falguière, jusqu'à mi novembre.

    Guy

  • Incompris et tant mieux

    Depuis un peu trop longtemps, on avait négligé Montherlant. Et l'intégrale qui lui est consacrée, au T.N.O.

    Mais l'inconvenient des intégrales, c'est qu'il y faut tout jouer, justement. Y compris les pièces que sinon on aurait volontiers oubliées.

    medium_thumb_sp_9977_p.jpg"Un Incompris"appartient à cette catégorie. Jugeons-en d'après l'argument: un jeune maniaque de la ponctualité quitte sa bien aimée, coupable de retards répétés... Sujet surprenant, et même pas une fausse bonne idée, Question texte on reste très très en dessous de "La Reine Morte"-est-il besoin de le préciser? - et question interprétation également. Mais pour les acteurs c'est une gageure. On admire par ailleurs les drames de Montherlant, et encore ailleurs son humour désespéré et grinçant. Mais quand l'auteur s'essaie à faire dans le léger, on découvre que cela ne sonne pas très convaincant. Avec- on ne se refait pas- au détour du texte quelques dérapages plus graves et misanthropes. Les jeunes acteurs, désorientés, sur-jouent un peu pour le coup. Au mieux bravo à eux d'avoir osé.

    Mais l'avantage des intégrales, c'est de nous amener à mettre en perspective ce que l'on aurait ignoré sinon. Ce protagoniste intransigeant, qui devant son entourage exaspéré sacrifie son bonheur-et celui des autres- sur l'autel de ses principes, nous est familier.

    Prenons le personnage, reculons de quelques siècles, rajoutons lui trente ans et un peu de religion. Révélation: C'est Don Alvaro version sitcom d'avant le J.T. - trois quart d'heures, c'est exactement le format.

    Pour ceux qui aiment les curiosités....

    Guy

  • Carnet de Baal

    Et si le meilleur de Bertolt Brecht (1898-1956), c'était Kurt Weil? Même si Baal (1919) montré ici est une oeuvre de jeunesse, avant l'Opéra de Quatre Sous.Mais ici déjà, ou rajoutés après, beaucoup de chansons tristes, des complaintes de cabaret medium_file_155_big_gaff_baal.jpgque Kurt Weilaurait pu composer, style spreech-gesang décadent, des histoires de filles perdues mais pieuses et de marins. 

    Mais qui est Baal? Cela serait trop long, trop fastidieux à expliquer. Disons seulement que sur scène il y avait une douzaine d'acteurs, et deux musiciens, un dispositif scénique impressionnant: à gauche de la scène, enchevêtrés, un bistrot et son comptoir, une chambre, un grand mur tagé- pas celui de Berlin-, une cabine téléphonique, un piano, une batterie, une baignoire, un lit, un banc public, un salle à manger, à droite un grand espace vide où errer, bref beaucoup de moyens et de budget pour du théâtre social. Mais un théâtre- de quelle couleur, celui là ?- qui a le bon goût ce soir de ne pas trop se prendre au sérieux, le jeune Bertolt n'était pas encore devenu tout à fait Brecht en 1919, et le metteur en scène -  Sylvain CREUZEVAULT- a refusé de prendre en compte les versions postérieures de la pièce.

    Il reste aujourd'hui de l'essai un peu incohérent- juxtaposition de scènes- juste ce qu'il fautd'outrance, de provocation-tant pis pour le premier rang-, de grincements, de sauvagerie, de confusion, de grotesque et de débraillé. On rit beaucoup, potentiellement, enfin pour peu qu'on puisse en juger au vu d'une première partie seulement (non pas qu'on se soit vraiment ennuyé, mais trois heures et demi c'était beaucoup trop long, biologiquement, et il y a a nouveau demain Moeno).

    A voir encore beaucoup de soirs au Theatre de l'Odeon - Ateliers Berthier. Pas la vraie salle dans le quartier de l'Odéon mais l'atelier réformé, boulevard Berthier. C'est à dire la salle où le théâtre de l'Odéon s'était réfugié les années quand l'Odéon- le vrai- était en travaux. Et qu'ils n'ont pas voulu ou osé fermer quand l'Odéon a rouvert à nouveau. On en parle, c'est Baal au Festival d'Automneet c'est plein à craquer, évidemment.

    Guy 

  • Emmène moi...

    C'etait ce soir la seconde reprise du spectacle, après le Théâtre de la Bastille , et "Trans"au théâtre du Chaudron après.

    medium_claude-degliame.jpg Autant dire que tout le monde a déjà tout écrit. Alors...

    "Emmène moi au bout du monde", au Théatre de la Bastille,d'aprés Blaise Cendrars (1887-1961), m.e.s. de Jean Michel Rabeux, avec Claude Degliame

    Soir après soir jusqu'au 22 octobre

    Guy

  • Les histoires d'amour finissent mal (finissent mal, mal, al..)

    Les histoires d'amour finissent mal, en général, et ce depuis que le Monde est Monde. En tout cas depuis bien avant la chanson, depuis les Métamorphoses d'Ovide (43 avant J.C - 17 aprés J.C.) , au moins.

    medium_fond_echo.jpgSurtout quand l'histoire est unilatérale, telle la passion d'Echo pour Narcisse.

    Echo: "La nymphe qui ne sait ni se taire quand on lui parle, ni parler la première, la nymphe qui répète les sons".Echo, brûlée de désir, qui répète les paroles de Narcisse. Echo qui, rejetée par l'être aimé, se laisse dessécher, jusqu'à ce qu'il ne reste d'elle que la voix, et les os sous la forme d'un rocher.

    Clémentine Baert joue Echo, elle chante et danse le rôle aussi. C'est beaucoup à la fois, et c'est peut-être trop pour ne pas toujours éviter de sembler, techniquement, maladroit.

    Mais au final elle est Echo, larmes aux yeux et émotion à fleur de peau. A cause de cela sans doute on se laisse attendrir, comme à chaque fois quand on écoute une telle histoire, même si l'histoire, surtout celle là, est un peu usée. Mais la ruse du théatre est de toujours nous faire croire à sa nouveauté.

    On se laisse donc attendrir malgré tous les partis pris esthétiques caractéristiques de ce théatre blanc, ce genre de medium_02-echo.jpgthéâtre qui considère dangereusement les mécanismes transparents de sa propre abolition. Le théâtre etait blanc ce soir. Mais malgré cela, Clementine Baert etait Echo.  

    Il existe un théâtre rose bonbon, robe de chambre de mousseline, escaliers roccoco, et répliques appuyées, pour les vieilles et les théâtres à l'italienne. Un théâtre rouge, teinté des obsessions scato-hémorragiques des nouveaux maitres flamands. Un théâtre gris, verbeux, qui montrent ceux qui attendent, qui rassemble tout le monde dans les brumes de l'ennui. Un théâtre noir aussi, des costumes aux rideaux, tragique, intransigeant, acéré, intense, acétique, tranchant, émacié, un théâtre de moines soldats.

    Ce soir le théâtre était blanc. Comme la scénographie, comme le fond d'écran et le tapis de scène. Aussi immaculés qu'un restaurant de Philippe Stark, ou un loft de Madonna. Avec quelques accessoires post modernes: torches-néons, guitariste live, panneau de plexiglass, voix off et projection video. On pourra en juger en video ici. Autant de signes censés tenir à distance l'émotion?

    Mais pas ce soir pourtant.

    A Mains d'oeuvres, et encore pour quelques soirs.

    Guy

  • Des choses cachées...

    "Je dirai, puisque tu le veux, la rose. Qu'est-ce que la rose?

    Ô rose !
    Eh quoi ! Lorsque nous respirons cette odeur qui fait vivre les dieux, n'arriverons-nous qu'à ce petit cœur insubsistant qui, dès qu'on le saisit entre ses doigts, s'effeuille et fond, comme d'une chair sur elle-même toute en son propre baiser mille fois resserrée et repliée?
    Ah, je vous le dis, ce n'est point la rose! C'est son odeur, une seconde respirée qui est éternelle!
    Non le parfum de la rose ! c'est celui de toute la Chose que Dieu a faite en son été !
    Aucune rose ! mais cette parole parfaite en une circonférence ineffable
    En qui toute chose enfin pour un moment à cette heure suprême est née !"

    medium_affiche_cantate.jpgSoyons franc, un peu: passé les premiers instants on renonce à vraiment saisir le sens de ce texte de Paul Claudel (1868-1955). Tant mieux: on abdique, et bientôt on se laisse emporter au fil des mots de "La Cantate à Trois Voix", yeux grands ouverts, au gré des images que ces voix nous évoquent. On accepte tout alors, de même qu'on a accepté de descendre et se laisser guider au plus profond le long des couloirs surplombés par voutes cachées sous l'église Saint Sulpice.

    Pour entendre: "Ô paradis dans les ténèbres !
    C'est la réalité un instant pour nous qui éclôt sous ces voiles fragiles et la profonde délice à notre âme de toute chose que Dieu a faite !
    Quoi de plus mortel à exhaler pour un être périssable que l'éternelle essence et pour une seconde l'inépuisable odeur de la rose ?
    Plus une chose meurt, plus elle arrive au bout d'elle-même, Plus elle expire de ce mot qu'elle ne peut dire et de ce secret qui la tire ! Ah, qu'au milieu de l'année cet instant de l'éternité est fragile, extrême et suspendu !
    _ Et nous trois, Laeta, Fausta, Beata, n'appartenons-nous pas à ce jardin aussi, à ce moment qui est entre le printemps et l'été (...) Ah, l'important n'est pas de vivre, mais de mourir et d'être consommé !
    Et de savoir en un autre cœur ce lieu d'où le retour est perdu, aussi fragile à un touchement de la main que la rose qui s'évanouit entre les doigts! (...)
    Mais toi, mon âme, dis : Je ne suis pas née en vain et celui qui est appelé à me cueillir existe !
    Ah, qu'il reste un peu à l'écart ! je le veux, qu'il reste encore un peu de temps à l'écart !
    Puisque où serait la foi, s'il était là? où serait le temps? où le risque? où serait le désir? et comment devenir pleinement, s'il était là, une rose ?
    C'est son absence seule qui nous fait naître"

    Il fallait sans doute beaucoup d'inconscience ou de témérité à ceux d'Heautontimorouménos pour s'attaquer à ce monument. D'une poésie qui nous parait déjà si lointaine, rare, étrange, surannée, comme si le rapport au monde qu'elle induisait ici était hors de notre atteinte de bien plus que d'un siècle.

    Mener à bien ce projet, ne serait ce que techniquement, inspire déja en soi le respect. Les trois interprêtes, et si jeunes pourtant, n'en paraissent presque pas intimidées. Elles dialoguent, chantent avec chacune leur timbre propre leur part de ce long poème. Citons les: Camille Cobbi, Clémentine Marmey, Clémentine Pons.

    Leur chant d'abord importe, porté par ces trois corps, autour d'elle un espace sobre nourri d'une lumière mesurée qui laisse sa place au mystère, et le reste est une question de séduction. Entre mélancolie, amour, foi, ferveur, mysticisme, rapport à la terre, absence de l'être aimé, éternel retour des saisons, dans cette profusion de significations est fait ici le choix de la sensualité. 

    Jusqu'à mi octobre, presque tous les soirs et pour pas moins de 12 spectateurs à la fois, à la Crypte Saint Sulpice.

    Guy

  • La Reine morte

    Ines de Castro doit mourir.

    Coupable d'être secrètement mariée à Pedro, fils du vieux Roi Ferrante et héritier de la couronne du Portugal. Pedro promis, pour le bien de l'État, et pour son propre malheur, à l'Infante d'Espagne.

    medium_180px-Inecastro.jpgInes de Castro doit mourir, et c'est le Roi Ferrante qui seul doit en décider. Lui même au seuil du tombeau, desséché de pouvoir et de vieillesse, fatigué de l'espoir, et même de la méchanceté.

    La puissance irraisonnée de la passion (Pasiphae), le dégoût du monde et du vulgaire (Le Maitre de Santiago), l'impossiblité des rapports père-fils (Fils de personne)... les thèmes que l'on a déjà vu abordés dans ce cycle Montherlant s'entremèlent à nouveau ici. Liées par cette terrible noirceur, qui fuse en aphorismes cinglants et venimeux: "En prison pour médiocrité!".

    Pourtant, autant que le pessimisme, l'amour, l'innocence trouvent aussi à s'exprimer, par la voix d'Ines, et cette voix est douce et belle. La pièce s'allège ainsi peu à peu jusqu'à son épure, en un dialogue crépusculaire et intime entre Ines et Ferrante. Ce dernier au bord de se laisser aller à ressentir, presque vivre, une dernière fois.

    S'agissant de la mise en scène de Jean Luc Jeener, on hésite même à en parler. Tant elle est invisible, parfaite d'humilité, et ne cède à aucun effet gratuit. Souligner visuellement les pulsions charnelles qu'éprouve l'Infante pour Ines ne relève que de la lucidité. Tout se concentre sur la force de l'interprétation, dans ce lieu-le T.N.O. -qui organise une proximité extrême avec les acteurs.

    En premier lieu avec Philippe Desboeuf, qui incarne Ferrante. Extraordinaire.

    ♥♥♥♥♥♥ 

    Guy

    P.S. Pour en savoir plus sur l'Ines historique, lire ici .

    Ce qui nous fait revenir un instant au "Maitre de Santiago":on a vu cet été dans une vitrine de musée à Key West (Floride) une médaille de l'ordre de Santagio. Présumée portée par Bartolomé Garcia de Nodal, chevalier de l'ordre, parti sur ordre de Philippe IV aux Amériques. Disparu en 1622 au large de Cuba avec le "Nuestra Senora de Atocha" et sa cargaison d'or. Repéché plus de trois siècles plus tard.

    Le chevalier aurait du écouter Don Alvaro. Bien fait!  

     

  • Myra Breckinridge a 38 ans

    Il faut attendre un bon moment avant que ne soit vraiment abordé le sujet de Myra Breckinridge: le refus des déterminismes sexuels, la remise en questions des rôles masculins et féminins, joyeusement jetés au feu avec les soutiens gorges, le male chauvinist pig, le drapeau américain et tout le reste. Sur fond de rébellion sixties US: Guerre du Vietnam, Women liberation front, psychédélisme et guitares sèches venant ébranler - ou peut être pas tant que cela- le star system et le californian way of life.

    L'intrigue est secondaire et bancale: Myra Breckinridge,pretendue veuve de Myron Breckinridge vient revendiquer l'héritage de ce dernier: une école de future stars tenue par son oncle Buck. Myra, devenue professeur, inculque à ses élèves des leçons à sa façon.

    Le texte de Gore Vidal(1925- ) était il, déjà en 1968, si baroque et décalé, qu'il n'a pour cette raison pas tant vielli que cela? Sa conclusion grinçante anticipe en tout cas les lendemains amers des utopies fleuries d'alors. 

    Reste une histoire à tiroirs, lesquels s'ouvrent sur quelques scènes audacieuses et surprenantes, dont celle- on avait jamais vu nulle part quoi que ce soit qui se rapproche de ça- du viol littéral d'un bel et jeune étalon à Stenson par l'heroîne, outillée comme il se doit pour cela. Étonnant, et pourtant cohérent avec le propos

    Mais tout est trop lent encore: le temps perdu au départ n'est jamais rattrapé: arrive inévitablement tôt ou tard un moment où tout cela n'en finit plus. Question de rythme que la compagnie - Franchement Tu- n'a pas trouvé. Le phrasé se veut distancié mais ne parvient le plus souvent qu'à sonner scolaire et appliqué, plombé par les hésitations. Les chanteuses et le guitariste paraissent plus à l'aise dans "California Dreaming" qu'en s'attaquant au "The Man I love" de Guerschwin. Les entrées et sorties de scène sont proscrites, pour laisser à vue et exposés des acteurs inactifs et embarrassés.

    Bref un résultat inégal et inabouti. Avec de bonnes idées, dont la projection en fond d'écran de bandes d'actualité sixties et d'un mélo chromo de Douglas Sirk. Contrepoint d'une innocence idéalisée. Avec un Rock Hudson, dont la virilité parait rétrospectivement ambiguë dans ce contexte. Mais le procédé est à double tranchant: le regard s'attarde sur le film, au detriment de ce qui se passe, où de ce qui ne se passe pas devant.

    Mains d'oeuvres hier et aujourd'hui, et encore la semaine prochaine (15/16 septembre.)

    Guy

    P.S.: On a découvert à cette occasion que le roman-culte ?- de Gore Vidal fit l'objet en 1970 d'un film trés improbable, avec Raquel Welch(Myra), John Huston(Uncle Buck), et une Mae Westseptagénaire incarnant Laetitia Van Halen, impresario consommatrice de jeunes talents. Ainsi que John Carradine, Farah Fawcett et Tom Selleck. Les photos évoquent quelque chose comme du Russ Meyer à trés gros budget. Comme quoi, durant les sixties, absolument tout pouvait arriver. Et même à Hollywood.

  • Fils de...

    Pas de musique, pas d'effets multimedia. Pas de bruitage, pas de trucage, pas de décors. Pas de prologue, ni de commentaires au second degré, ni clins d'oeil, aucune mise à distance. Ni mouvement de projecteur, ni hémoglobine, ni fumée, ni chorégraphie, ni pluridisciplinarité, ni nudité, ni violence physique, ni costume hors contexte.

    medium_sp_10480_g.jpgMais juste trois interprètes sans défauts, sur un simple plateau, au service des mots de Montherlant, pour que ceux ci résonnent d'une incroyable violence, d'autant plus efficacement dans ce contexte dépouillé. D'une violence essentielle: celle - toute psychologique- qui s'installe au coeur d'une relation familiale. Entre un père imbu de lui même et son fils retrouvé, le "Fils de Personne".

    Le fils est un adolescent, ni plus ni moins que cela, un coeur pur et simple. Le père ne peut l'accepter tel quel, s'obstine à la recherche impossible d'un autre lui-même. Un double idéal. Tel un Don Alvaro laïque, il occille entre élans d'affection et morgue, et la mêre, témoin, n'y peut rien. Les personnages de Montherlant, décidément, ont bien du mal à aimer.

    On a rarement l'occasion d'entendre des mots aussi cruels sur une scène de théâtre, tels ceux que le père déçu adresse à son fils, et cela constitue une provocation bien plus efficace que toutes les outrances visuelles.

    Par provocation, entendons la capacité de provoquer chez le spectateur des réactions, dont l'impact survit à la sortie de la salle.

    Le contexte- la France d'après la débâcle de 1940 qui a sépare tant des familles- est discrètement restitué par le phrasé, par les costumes, par le maquillage, par les quelques accessoires. Sans que cela n'ait au fond d'importance, sans que cela ne date la pièce. Universelle, au coeur de son sujet.

    Montée par Edith Garraud, et suivie de "Demain il fera jour"- avec les mêmes personnages et les mêmes interprètes, qu'on ira voir- promis- bientôt.

    Toujours au T.N.O. 

    Guy